Aujourd’hui, deux bouquins mais un auteur. Un auteur qu’est devenu aujourd’hui une tarte à la crème. Mais entre nous, quelle chance d’avoir des tartes à la crème aussi bonnes, aussi talentueuses que Lewis Trondheim. Honnêtement, c’est la classe d’avoir des gars comme lui bien vivants, bien en forme, qui tous les ans pondent comme ca leurs deux-trois bouquins.

Alors c’est vrai que le dernier ciglé Trondheim, Omni-visibilis, dont j’vous avais parlé y’a quelques mois, était un grosse daube… mais comme le titrait je sais plus quel site : « Trondheim est en forme ». Deux bouquins, super différents, d’un coup. On commence par lequel ? L’espèce de marronnier ?

Tous les ans, à date plus ou moins fixe, Trondheim nous livre ses Petits Riens et là c’est sa 5ème année. Dans ce journal, auto autocentré, notre Trondheim, nous livre ses fulgurances et autres pensées à la manière d’un Desproges. Alors attention, quand je dis à la manière, c’est pas « comme », hein, c’est juste livré de manière sèche, en un strip, en traitant avec gravité et beaucoup de sévérité un sujet léger et inversement… De là surgissent des remarques saisissantes, plus ou moins drôles, plus ou moins pertinentes sur les acariens, la grippe H1N1, les angoisses, les crises cardiques, les micoses, les toilettes… Oui, notre Trondheim a une fâcheuse tendance à l’hypocondrie ou dans d’autres situation à  l’agoraphobie. Le tout livré avec un certain cynisme, un regard noir mais bienveillant sur nous, ses congénères.

Souvent, ça ressemble aussi  à l’histoire de ce gars, peut-être vous, qui se dit qu’il casserait bien la gueule à ce gros connard, mais qu’il le fera pas parce qu’il est plus balaise que lui. C’est des moments de couardises, ces renoncements inavouables, ou ces moment d’autosatisfaction, de survalorisation, d’autocélébration, mêlés avec ces pensées vaguement haineuse mais toujours joliment enveloppées.

Alors là, Trondheim nous emmène du Mozambique à Strasbourg, en passant par New-York ou le Japon avant qu’ca pète.

Tout est très perso, j’vous dis ça puisque ça nous conduit jusque dans ses toilettes. Mais c’est tellement bien raconté qu’on a l’impression d’être dans sa tête, inside Trondheim. Et quand, comme moi, vous pensez que c’est l’un, sinon, le meilleur, raconteur d’histoire de cette génération, vous avez l’impression de toucher, du bout du doigt, le quotidien, un morceau de génie.

Son autre sortie, c’est Ralph Azham, avec un titre comme ça, ça sent l’anagramme… Bref, Ralph Azham c’est le retour de l’heroic fantas décalée dans l’univers de Trondheim. Avec son bon copain Sfar, y’a bien une 15aine d’année, il a dépoussiéré le genre avec la série Donjon.

Là, on laisse de coté les édifices en pierre et tout se passe dans le bled d’Astolia. Un bled bien naze. Un endroit de cul terreux, dirigé par des pleutres. Tous les boss du village attendent en fonction des cycles les invasions, les razzias… Le village se fait ruiner, piller ou juste racketter… C’est pas à Dijon que ça arriverait ça, avec not’ bon maire, il ferait disparaître le village, et les horribles black blockeurs serait bien dégoutés. Ils pourraient pas ruiner le village, le tram serait pas attaqué par les indiens et le G20 des universités pourrait se tenir…

Bref, dans ce coin de lose, y’a quand même un super héro avec un super pouvoir : Ralph Azham. Mais mais, son super pouvoir en fait est tout pourri. Avec, y fout le bordel dans le village, le gars sait qui couche avec qui… Alors forcement ça plait pas, mais derrière, tout va s’emballer..

La suite j’vous la dit pas, vous la lirez. L’histoire, c’est pas tout ce que j’vous ai raconté, c’est aussi une belle histoire qui donne le sous-titre de ce premier tome du conte initiatique : est-ce qu’on ment aux gens qu’on aime ? On verra ce qu’un papa est capable de faire par amour… C’est beau. C’est drôle et c’est super bien écrit.

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Ralph Azham, Dupuis, 45 pages.
Les Petits Riens de Lewis Trondheim, tome 5, Le Robinet musical, Shampooing / Delcourt – les deux autour de 11 euros

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