Dimanche 24 juin. Entre deux cupcakes dégustés dans l’herbe face à la Péniche Cancale à l’occasion d’une « Pop corn à la plage » ensoleillée, on a fait la connaissance du staff communication des Plages électroniques. Yann, Yan et DaveTV ont passé tout le week-end à Dijon pour promouvoir le festival cannois qui se tiendra les jeudis 05, 12, 19 juillet, puis 02 et 16 août. Retour sur l’identité de cet événement qui verra notamment défiler sur la plage du Palais des festivals C2C, Ellen Allien, Seth Troxler, Dave Clarke, Busy P ou encore Maceo Plex.

Comment est né le festival ?
À la base il y a David, le Cannois de l’étape, qui organisait déjà des petites soirées et qui travaillait pour un magazine de presse écrite sur place. Gaby qui travaillait chez feu Coda magazine. À cette période Coda essayait de développer le concept Plages électroniques dans l’hexagone. Il y avait les Pelouses électroniques à Paris le dimanche, au Buttes-Chaumont. Et tu as Ben le responsable de Panda06 Production, une association sur Nice qui était la plus active et à même de pouvoir assumer l’organisation d’un événement un petit peu ambitieux. Ces trois personnes se sont réunies pour organiser les Plages électroniques à Cannes. Connaissant un peu les acteurs politiques locaux, David les a sollicités. Il a tout de suite reçu un bon accueil. Le deal étant que la ville de Cannes nous mette à disposition la plage gratuitement et qu’en échange l’association reverse 50% de ses bénéfices à des associations caritatives du bassin cannois.

Ça a commencé véritablement quand ?
Un an plus tard, en 2006, avec notamment DJ Vadim, Krikor… et 400 personnes. L’idée, c’était de faire 5 soirées, 5 thématiques musicales, 5 euros. A la première soirée il y a eu 400 personnes et on a terminé la dernière avec 2000/2500 personnes environ. Ça a grandi de manière exponentielle. Au fur et à mesure l’équipe s’est étoffée. Le festival explose en 2008 avec Boys Noize. On attendait 3.000 personnes et 10.000 ont déboulé. On s’est fait démonter. C’est à ce moment que le crew s’est forgé, un peu spontanément. Et voilà, maintenant on en est à la 7ème édition.

Le principe d’organiser le festival de manière étalée, sur tout l’été, c’est venu comment ?
En fait, ça a toujours été comme ça, un jour de semaine. Déjà on ne voulait pas s’installer le week-end pour ne pas entrer en concurrence avec d’autres événements. On voulait aussi proposer quelque chose en semaine parce que les gens sont en vacances, et l’offre festive s’établissait uniquement le week-end. L’idée, c’est de monter un petit truc sympa en milieu de semaine. Ça a toujours été soit le mardi, soit le mercredi, soit le jeudi. Et le fait d’en faire 5 pendant l’été, c’était pour parcourir les 5 courants musicaux.

 

« On essaie vraiment d’être ‘populaire’ : de proposer de la musique qualitative, exigeante, tout en s’adressant au plus grand nombre.

 

Le tarif d’entrée est fixé à 10 euros pour chaque soir, c’est vraiment abordable.
On est passé par 5, puis 8 euros et maintenant 10. Après, la ville de Cannes et notamment son premier adjoint, avait comme idée de renouveler l’image de sa ville qui, comme beaucoup de villes de la Côte d’Azur, se traine une réputation de ville de vieux. Au final, cet événement n’a pas coûté un rond au contribuable cannois. Alors au début il a eu des couilles parce qu’il nous a fait confiance, mais en 2010 ils ont bénéficié du truc énormément. Y’a eu un 20 heures sur France 2, sur TF1, un article dans Le Monde, « Cannes n’est plus une ville de vieux », enfin tu vois le truc. Pour lui, cette opération, c’était de la balle. A côté de ça, il y avait aussi l’idée de changer l’image « ville de VIP, strass et paillettes ». Là, il fallait donc proposer quelque chose qui soit accessible à tout le monde.

Et pour la musique ?
Ça a permis aussi d’apaiser un peu l’image des musiques électroniques. Bon, aujourd’hui ça va, la musique électronique est sur les ondes. À l’époque, t’avais encore cette image de free party, de drogue, etc. Tout comme le jazz ou le rock ont souffert de ça. On a donc décidé de mener quelques actions de prévention. Ok, de la drogue, y’en a. Comme dans tous les événements festifs. Mais c’est ni une nécessité, ni une obligation. On a un positionnement assez pragmatique par rapport à ça. On n’a jamais déclaré en conf’ de presse ou face aux élus qu’il n’y avait pas de drogue aux Plages électroniques. Mieux vaut admettre le problème et chercher des solutions.

Quelles actions vous mettez en place ?
Depuis le début on met en place des stands de prévention, des points d’information, on fait en sorte qu’il y ait une fouille sérieuse à l’entrée, sur les produits dangereux mais aussi sur les produits stupéfiants. On fait notre part du boulot. Mais si les gens viennent la veille pour cacher des trucs dans le sable… on va non plus passer avec un détecteur. J’en ai vu faire ça, après, je leur souhaite bonne chance pour arriver à récupérer quelque chose !

Quelles sont les nouveautés pour l’édition 2012 ?
Les 5 thématiques évoluent d’une année sur l’autre, même s’il y a des constantes. La techno-minimale est là depuis le début. Y’a quelques années on avait une soirée complètement drum & bass – jungle, aujourd’hui elle se transforme en soirée bass music. La deep house fait une apparition cette année parce que c’est ce qui a pris le contrôle des des charts en Europe. La soirée breakbeat a complètement disparu. On essaie vraiment, dans tout ce qu’on fait, d’être « populaire » : de proposer de la musique qualitative, exigeante, tout en s’adressant au plus grand nombre. Que ce soit pas uniquement pour les pires afficionados de musique électro. Que les gamins ou les plus agées viennent aussi découvrir la musique électronique. L’ambiance, c’est plus « bonne enfant » que « rave-trance ». Forcément les courants qu’on programme doivent coller à une certaine demande. Mais c’est aussi ce qu’on écoute, nous. On parcourt des festivals toute l’année, on programme toute l’année, donc on se tient aussi forcément au courant de ce qui arrive.

Votre coup de cœur perso pour la prog’ de cet été aux Plages ?
Yann : Dave Clarke parce que je suis vieux.
Yan : Moi aussi, mais j’attends de voir C2C. Cela dit, tu peux te retrouver à préférer une soirée que tu attendais pas forcément parce que c’était pas ta couleur musicale de prédilection. Y’a 7 ans j’étais pas trop techno minimale, j’étais plus jungle – breakbeat. Je me rappelle d’un set de Damian Lazarus, ça avait été le gros coup de cœur en 2008. Et si je devais en garder qu’un pour les Plages, ça serait celui-là.

Il y aura des artistes locaux également ?
Oui, la formule en termes de line up c’est toujours : une légende qui est là depuis quelques années, le mec qui buzz actuellement et que tout le monde s’arrache, le mec qui commence à faire parler de lui et un DJ « local », du quart sud-Est on va dire. Sur la Côte d’Azur on a une scène électronique assez hallucinante, des mecs qui sont programmés régulièrement à Berlin, à Barcelone, mais pas assez populaires ici. C’est un peu la mission de Ben, l’un des instigateurs des Plages avec Gaby et David. C’est de réveiller le sud.

 

« En fait, on ne fait rien d’exceptionnel,
on amène du son sur une plage »

 

C’est quoi le futur ?
Les Plages maintenant, c’est devenu aussi notre carte de visite pour aller faire un festival en Martinique par exemple. Notre idée commune, c’est pas forcément d’aller promouvoir les musiques électroniques parce que c’est un peu dépassé comme formule. Mais on a envie d’aller « faire des Plages » dans le monde, amener notre concept à droite à gauche. Il y a Martizik qu’on fait depuis 3 ans, les Pistes électroniques, également un truc à Miami qui est en train de se préparer, quelque chose en Guadeloupe peut-être. Ce qui est classe c’est qu’on a commencé, il y avait 400 personnes, c’était nos potes. Puis ça s’est élargit aux amateurs d’électro et maintenant on retrouve toutes les classes, tous les âges. On est fier de proposer un truc aux gens qui n’ont pas les moyens d’aller mettre 50 euros dans l’entrée d’un club ici et 20 euros pour se prendre une conso. On remplit notre rôle d’animateur populaire, et quand on voit les gens kiffer alors qu’ils ne connaissent pas forcément à fond, on a le sentiment de faire un truc bien. Tant sur le fond que la forme. On considère la musique électronique comme populaire, mais pas dans le sens péjoratif du terme.

Vous voulez toucher tout le monde.
On n’est plus trop dans un délire de démocratisation de l’électro ou de défendre le truc comme a pu le faire Technopol. Il n’y a plus du tout chez nous ce rapport de « syndicat de la musique électronique ». Parce que ça a suivi le même chemin que le jazz, le rock ou le hip hop à une époque. On est arrivé au bon moment finalement, on avait cette formule, ce lieu magnifique et c’est ce qui explique la réussite. En fait, on ne fait rien d’exceptionnel, on amène du son sur une plage. À la base on est plutôt Niçois que Cannois, et là où on galerait à Nice à une époque, et bien grâce aux Plages à présent c’est beaucoup plus facile. Maintenant on a aussi un festival à Nice qui s’appelle Crossover et qui correspond plus à Nice, un peu plus arty et adulte.

Au fait, la mairie vous soutient toujours à fond ?
On a un énorme soutien de la mairie de Cannes. C’est clair et suffisamment rare pour être souligné.

L’idée des « pré-soirées » un peu partout en France avant l’été, ça date de quand ?
Ça date de 3-4 ans. On avait fait Lyon à l’occasion des Extras Nuits Sonores. On va aussi régulièrement dans un super lieu dans le Var (le mas des Escaravatiers), dans un domaine viticole. On va également à Marseille, à Paris… On s’est rendu compte avec DaveTV que Dijon était un peu le centre du monde de la musique électronique avec l’An-Fer à l’époque. Faut savoir que dans les années 90, on ne pouvait pas y aller, mais on savait ce que c’était. Et on en était presque jaloux. Nous dans notre belle région, il ne se passait rien. Alors c’est venu très logiquement avec Dave : pourquoi ne pas faire un truc à Dijon avec les associations locales ? En Martinique on avait aussi tenu à faire ça avec une asso locale. On fait très gaffe à tout ça. En fait, on choisit pas vraiment les destinations de manière stratégique. En général c’est une histoire, une anecdote ou une rencontre…

Comment avez-vous ressenti ce week-end et les festivités à Dijon, ça vous a plu ?
Le vin était très bon (rires). Plus sérieusement, c’était vraiment cool. Un public à la fois ouvert et connaisseur, des gens simples qui avaient envie de faire la fête. Il y avait 150 personnes hier, c’était plein, et une pure ambiance. L’accueil des gens est incroyablement généreux et familial. Tout le monde a joué le jeu. Disons que cette année, l’idée n’était pas de faire de la compét’ d’entrées payantes, etc. C’était plus un état d’esprit, pour voir si ça plaisait aux gens. De faire aussi connaissance avec les structures locales. On a maintenant encore plus envie de s’investir pour faire un truc encore mieux l’année prochaine. Voilà, on peut pas en dire plus, mais il y a une plage à Dijon…

Le mot de la fin ?
Merci à DaveTV d’avoir mis en place ce week-end avec tout le monde, à la Péniche Cancale, à Octarine, Risk, Soul Food, Pop Corn et à Sparse pour le soutien.

 

– Propos recueillis par Pierre-Olivier Bobo