Il en a mis du temps à arriver, ce troisième James Bond. Après l’excellent Casino Royale et le beaucoup moins bon Quantum of Solace, la naissance du dernier épisode ne s’était pas faite sans difficultés. Pas de réalisateur, faillite de la MGM, scénario sans cesse réécrit, grosses galères financières, batailles juridiques… bref, tout pour démarrer dans de bonnes conditions. Ainsi, le come-back de Bond a tout de la résurrection.

Sous la direction de Sam Mendes, ce nouvel épisode traduit la mise à mal du plus célèbre agent secret du cinéma. À l’instar du Batman de Nolan, on peut tout tenter pour le détruire, le héros se relèvera de sa chute, pour renaître de ses cendres. Skyfall, ou la résurrection de l’agent 007.

Ce dernier volet de la saga propose en vérité de renouveler le mythe pour mieux le moderniser. Difficile en effet de faire du neuf avec un personnage déjà vieux de 50 ans. Mais Nolan a tout bouleversé dans l’univers du blockbuster hollywoodien en prouvant qu’il était possible de faire un film d’auteur intelligent avec un gros budget. Skyfall en est le nouvel exemple. Derrière l’image un peu trop lisse de l’espion de sa majesté, on découvre un personnage meurtri au passé sombre et mystérieux, à l’image d’une lande écossaise légendaire. Un nouveau moyen d’humaniser un peu le mythe.

Ce qui n’empêche pas d’avoir une multitude de scènes d’action brillamment orchestrées (suffit de voir la scène d’ouverture, celle dans le gratte-ciel de Shangaï ou encore dans le manoir écossais). Autre bon point : l’humour, par petites touches dans des dialogues savoureux, notamment grâce au personnage de Javier Bardem, dont l’ambiguïté sexuelle nous fait sourire. Et les James Bond Girls ne servent toujours pas à grand chose. Bref tous les ingrédients chers à la saga originelle sont là.

Le réalisateur d’American Beauty en profite pour faire de Skyfall l’épisode de la réflexion sur les liens entre le passé, le mythe (oui, j’aime ce mot) et la place du héros dans la société actuelle. Pour ceux qui n’étaient pas encore convaincus, Bond est certes un agent vieillissant, il évolue et traverse sans problème les époques, dans l’intrigue du film, comme dans le cinéma. Daniel Craig trouvait déjà une alliée précieuse en la personne d’une hackeuse dans Millenium, c’est de nouveau le cas dans ce Bond : la version 2012 de Q est un geek et le méchant albinos incarné par Javier Bardem (capillairement parlant, je le considère comme le Nicolas Cage espagnol) est un terroriste hacker de génie qui n’a pas résolu son complexe d’œdipe. La question de la filiation est d’ailleurs un des aspects peu subtils du scénario, mais on oublie ça rapidement.

Car Skyfall a beau durer pratiquement 2h30, pas d’ennui à l’horizon, le suspens est omniprésent. Comme Batman, Bond se la joue old-school, castagne comme un dur, à l’ancienne, et reste fidèle aux valeurs sûres, à savoir smoking, martini dry et Aston Martin. Indémodable, ce Bond.

– Alice Chappau