Aujourd’hui, déjà une de mes bédés de l’année (on n’est qu’au mois de janvier); et le dernier Bastien Vivès, La Bande Dessinée, le 6ème livre de cette série de petit format qu’il sort en l’espace d’un an.

 

D‘abord commençons par le le Vivès. Et comme je vous en parle à chaque fois, j’ai peut-être pas besoin de vous re-présenter le bonhomme et son style ? Les strips, le noir et blanc à la palette numérique. Super beau. Le strict minimum sur le page mais super expressif quand même. C’est bon ? Alors là, après La Guerre, ce nouveau tome auto-référentiel a la belle ambition de montrer -c’est Vivès qui le dit quelque part dans un dossier de presse- « que les auteurs de BD ne sont pas tous forcément des puceaux ».

Ça commence vraiment comme une espèce d’exutoire. La bédé va souvent avec la souffrance et la déception dans ce Vivès. D’ailleurs, soit en dit en passant, Vivès reste drôle mais il est de plus en plus sombre, j’espère qu’il nous prépare pas une petite dépression. La première histoire, c’est simplement un psy qui rassure une maman. Son fils s’exprime de manière étrange, il est vrai. Il dessine dans de drôles de petites cases, fait des récits séquentiels qui bout à bout s’appellent de la bande dessinée. Oui, il pourra quand même aller à l’école, rencontrer des gens, y’a rien à soigner mais non, par contre, il ne pourra pas rencontrer de filles normales.

Noir, j’vous dis, comme par exemple cette histoire avec un papa qui tarte et re-tarte son enfant parce qu’il lui pique ses éditions collectors d’Astérix. Le môme ne bronche pas, pas une larme, il encaisse sans rien dire ni comprendre. C’est une des histoires les plus sombres, mais le style Vivès est comme concentré là, cadrage serré à la hauteur de l’enfant : profil, haut du buste et les jambes du père, à ses côtés, sa main qui lui tombe dessus. Et l’enfant stoïque et triste.

Y’a aussi bien sur des drôleries, mais là encore souvent, somme d’échecs : Vivès qui voit son livre, Le Goût du chlore, récompensé à Angoulême il y a quelques années, adapté en film par Pénélope Cruz et Tom Cruise. Les acteurs trouvent le texte nul, n’arrivent pas à le jouer et le réalisateur est obligé de menacer de leur pêter la tronche pour qu’ils daignent le jouer. Et puis, il y a aussi toutes ces situations incongrues, les strips où Vivès, des auteurs de bédé, craquent complètement en interview ou en conférence de presse. Ils sont vieux, incritiquables et complètement démagos.

Bref, le monde de la bédé selon Vivès a tout, et lui le premier, pour devenir horrible et névrosé dans 30 ans. C’est encore très bon et très drôle, même si je m’inquiète de plus en plus pour Bastien Vivès.

 

Un village moyenâgeux qui semble
frappé par une malédiction…

 

Deuxième livre, Varulf de Gwen de Bonneval et Hugo Piette. Et alors déjà une bédé de l’année 2013 !

Ça faisait quelque mois que j’avais pas lu un livre qui me faisait autant plaisir. C’est un bouquin qui sent bon la fraicheur, par un dessinateur que je ne connaissais pas vraiment, Hugo Piette et un scénariste, de Bonneval, qui m’avait déjà bien emballé avec son Messire Guillaume. Avant de vous parler de l’histoire, d’abord, le dessin. On est dans un style ligne claire assez classique  semi réaliste qui n’est pas sans me faire penser par moment à Émile Bravo. Piette joue sur des atmosphères interlopes, des jeux d’ombre très simples et très chouettes. Le dessin est épuré. J’vous l’dis : classique mais agréable.

L’histoire, bien gaulée, est celle d’un village moyenâgeux qui semble frappé par une malédiction. Depuis plusieurs jours, semaines, le village est attaqué par des animaux sauvages, loups, ours et autres serpents. Et les parents sont tués, que dis-je, massacrés. Alors, pour une raison que je ne vous dévoilerais pas, les enfants s’enfuient dans les bois mais se trouvent suivis, pistés par un étrange cavalier. C’est du fantastique, un brin heroic fantasy, et pour l’instant ça prend la forme d’un thriller.

On suit l’évolution des rapports humains à travers la troupe : séduction, confiance, rapport de force… Mais ce n’est pas vraiment là l’essentiel. C’est juste le tome 1 et c’est super frustrant. J’espère que ça ne tirera pas à la ligne, que ce ne sera pas une histoire à rallonge. Oui, déjà un de mes coups de cœur de l’année.

– Martial Ratel 

Varulf, tome 1 – La Meute, de Bonneval et Piette – Gallimard,  autour de 16 euros
La Bande Dessinée, Bastien Vivès – Delcourt, 10 euros

La chronique bédé est un partenariat avec Radio Dijon Campus.