Depuis plus de 15 ans, Grésilles en fête propose chaque année un temps fort fait de festivités et de rencontres artistiques au cœur du quartier des Grésilles. Porté par la ville de Dijon en lien avec ses nombreux partenaires, cet événement s’articule notamment avec l’implication de la Maison des jeunes et de la culture (MJC) des Grésilles. Mais en fait, c’est quoi réellement Grésilles en fête ? Objectif, implication, renouvellement, urbanisme… On en parle sans langue de bois avec Mathieu Depoil, directeur adjoint de la MJC.

GEF

Comment s’est créée la MJC des Grésilles ?
C’est une association qui a été créée en 1961 par les habitants du quartier de l’époque. À l’origine, c’était une asso de loisirs. Il y avait trois activités : un club de majorettes, un cours de dessin et de peinture, une petite salle de musculation. L’association s’est développée, avec de plus en plus d’activités socio-culturelles pour tout le monde. En 1983, la ville de Dijon a construit le bâtiment actuel qui a été délégué à l’association. Aujourd’hui, la MJC, c’est 1.500 adhérents à l’année et une bonne trentaine de salariés.

Quel est son rôle au sein du quartier ?
Le projet de la MJ s’articule autour de deux axes. Un premier axe d’éducation populaire : c’est l’action socio-culturelle avec tout un tas d’activités accessibles : danse (on fait beaucoup de danse ici), dessin, peinture, piano, gym, bébés nageurs… une vingtaine d’activités au total, pour tout le monde. C’est à dire pour les gens du quartier, ceux qui vivent hors quartier, hors Dijon et hors agglomération même. On est vraiment sur un principe d’accès à la culture pour tous et on fonctionne avec des tarifs différenciés. Plus tu es riche, plus tu paies cher. Plus tu es pauvre, moins tu paies. 

L’autre axe, c’est ce qu’on appelle chez nous la jeunesse et la proximité. Une activité dédiée à 100% au quartier. C’est un accueil jeune 12-18 ans, un secteur jeune 18-25 ans, des actions culturelles de proximité comme les cinémas de quartier, Grésilles en fête, les rendez-vous des Grésilles. On accueille aussi les femmes du quartier, on fait du suivi de jeunes de manière individuelle et collective avec une médiatrice socio-culturelle. On anime le territoire et on pilote de nombreux projets sur le quartier. Pour résumer, c’est de la mixité des publics et une action de quartier, ce qui nous différencie quand même d’une maison de quartier.

C’est à dire ?
La maison de quartier est pour les gens du quartier, la maison du citoyen est pour les gens de l’extérieur. Nous, on a les deux secteurs en une structure. Ce qui fait qu’ici, tu peux croiser la bonne famille de St Apollinaire, le bobo du centre-ville, les  jeunes et moins jeunes des Grésilles… tout le monde cohabite dans le même espace.

Tu bosses ici depuis 6 ans maintenant. Comment le quartier des Grésilles a-t-il évolué ?
Quand je suis arrivé, il avait déjà beaucoup changé. Au tout début 2007, les grosses tours étaient déjà tombées. Billardon, Epirey et les Lochères étaient tombées… Je suis arrivé sur la phase finale du renouvellement en quelque sorte. Les bâtiments symboliques, je ne les ai pas vus tomber. Le quartier s’est redessiné. Pendant 3-4 ans, c’était détruit donc ça ressemblait à Beyrouth. En fin de compte, il y a des gens qui sont contents et d’autres qui sont mécontents. Certains disent : « Imagine, je viens dans ton village et je détruis tes maisons ». D’autres au contraire expliquent : « Super, on a des appartements plus grands ». D’autres encore : « Ils forcent la mixité donc ils augmentent les loyers et ça oblige certains à partir ». Voilà, on entend tout et son contraire. Je crois que c’est un encore peu tôt pour évaluer tout ça.

Votre rôle dans Grésilles en fête, il consiste en quoi ?
Il y a toutes les actions que porte la MJ, et toutes les actions partenariales. Sur la MJ, on anime le parc des Grésilles. On travaille depuis deux ans avec le collectif Grésilles Culture, un collectif créé en 2007 avec la MJC, Zutique Productions et le centre social, qui rassemble autour d’un même projet tous les partenaires du quartier : MJC, Zutique, le centre social, la ville de Dijon (la Direction de l’animation des quartiers, le service lien social), le Service Prévention Spécialisé Acodege, la coursive Boutaric, la médiathèque, le centre multimédia… et d’autres… Ce collectif a pour mission d’échanger, de s’informer et donner une cohérence culturelle aux actions. Pour Grésilles en fête, ce collectif anime et met en place des actions hors les murs. On a décidé de mettre toutes nos forces pour animer l’espace public. Le rôle de la MJC est de coordonner les actions avec le soutien de la ville de Dijon. Chaque partenaire porte un mini projet en interne. Toute la semaine, on va être sur l’espace public : sur les places, en bas des bâtiments. On diversifie beaucoup les actions, ça peut aller du pique-nique aux contes, aux chants, avec des concerts, des animations pour les enfants, du cinéma…

Qu’est-ce que Grésilles en fête vous apporte, en comparaison à votre activité le reste de l’année ?


Déjà, il fait beau. (rires) Plus sérieusement, c’est une dynamique qui est particulière parce qu’on peut imaginer des choses qu’on a moins le temps de faire le reste du temps. Et c’est le moment où les gens sortent ! On sait que les habitants du quartier vont sortir. C’est un moment qu’ils attendent énormément. Une fête populaire, qui historiquement a toujours marqué les esprits. Des jeunes que j’ai connus il y a 6 ans, aujourd’hui devenus majeurs, attendent toujours Grésilles en fête eux aussi. Avec les partenaires, c’est la dernière ligne droite de l’année, les gens sont contents de faire ça. C’est une émulation collective qui est assez intéressante.

De manière générale, les habitants du quartier sont impliqués dans Grésilles en fête ?
Pour moi, ils sont encore au statut de spectateur. Ils attendent l’événement en temps que spectateurs, c’est le moment où ils sortent en famille. Tout le monde sort dans le parc, les familles sortent les nappes et s’installent dehors. Il y a quand même des habitants qui s’investissent dans l’organisation mais ça reste des habitants qui sont accompagnés par les travailleurs sociaux. À la MJC on accompagne des jeunes, des mamans. Si on n’était pas là, je pense pas qu’ils auraient l’initiative d’intégrer Grésilles en fête. Mais c’est ce qu’on essaie de faire depuis un an avec le collectif Grésilles culture : arriver à impliquer les habitants, avec un travail en amont. Le centre social le fait très bien, Zutique le fait aussi à travers la Casbah Boutaric notamment, nous on le fait à travers nos actions propres. Mais ce n’est pas encore acquis.

Comment on se renouvelle sur Grésilles en fête ?
Déjà, le collectif Grésilles culture a apporté de nouvelles choses. Avant il y avait des actions la semaine et un gros temps fort le samedi de clôture. Depuis deux ans, ce collectif a décidé d’animer vraiment toute la semaine ! C’est une nouvelle formule qui fonctionne bien.

Cette année vous bossez avec le Théâtre Dijon Bourgogne autour de « Bienvenue dans l’espèce humaine ». Cette pièce pose notamment la question : « Est-il raisonnable de vouloir changer le monde ». T’en penses quoi, toi ?
Pas tout seul. C’est raisonnable de vouloir changer le monde s’il y a des gens, un collectif qui veut le changer. Sinon ce n’est pas raisonnable, ça s’appelle une dictature.

Si tu devais choisir 3 mots pour définir Grésilles en fête, ça serait quoi ?
Populaire, déjà. Mixité, ensuite. Il y a des gens hors quartier qui viennent, c’est super important. Si on se cantonne à sectoriser : le centre-ville a son concert, les Grésilles ont leur concert… tu n’as pas de mixité. C’est donc très important et c’est une volonté de la ville de Dijon, des MJC et des partenaires du quartier. Et puis aux jeunes, ça leur fait du bien, il faut se dire que tout le monde est mobile. À ces jeunes, on leur a tellement dit « ton identité, c’est les Grésilles » que certains, jusqu’à 12-13 ans, pensent que les Grésilles, c’est une ville. T’habites pas à Dijon, t’habites aux Grésilles.  Le dernier mot que je choisirais est « proximité ». Il y a cet esprit de village. Il y a du lien ! Les gens attendent vraiment ce moment…

– Propos recueillis par Pierre-Olivier Bobo
Crédit photo : Louise Vayssié

Grésilles en fête, jusqu’au 15 juin 2013.
Programme complet à découvrir ici.
Journée de clôture samedi 15 juin avec des espaces de convivialité, salon de thé, cuisine du monde, stands divers, jeux, animations surprises, concerts dans l’après-midi et le soir avec Gnawa diffusion.