Ceci n’est pas un publi-rédactionnel pour Télé 7 Jours : Cendrillon de Kenneth Branagh, à voir en ce moment dans ton cinéma Olympia ou au Cap Vert.

cendrillon

Cher Kenneth,

Je tiens une petite chronique cinéma depuis quelques semaines pour un très grand journal franco-dijonnais, Sparse (je te joins un bon de commande, il y a une aussi une version papier). Et je viens d’aller voir ton dernier film, Cendrillon.

Honnêtement cher Kenneth, j’avais quand même un a priori plutôt négatif (j’aime bien aller voir les films avec des a priori négatifs). Je pensais revenir colère même. Et bien non. Peut-être parce que je reste une fille avec tout ce que la théorie du genre m’a collé dans le corps. Tu me mets une grande robe bleue qui fait « frout-frout » et je suis inoffensive, à la limite du con-con. Je peux tenir quelques heures sans rien demander. Tu n’es même pas obligé d’alimenter une fille nourrie aux « frout-frout »  des robes des héroïnes Disney, t’imagines.

Bon très franchement, j’imaginais aussi être un peu surprise. J’osais penser qu’un mec intelligent comme toi, à la réalisation certes généralement un peu ampoulée, aurait apporté quelque chose de nouveau. Tu es quand même le mec qui a rendu Shakespeare « cool ». Toute une génération d’élèves a pu citer des titres de lui grâce à toi. Visiblement, ça n’a pas marché autant que tu l’espérais. Donc en 2011, tu reviens à la réalisation. Pour être franche, je ne savais même pas que tu avais fait ça. Je t’avais perdu de vue, je me souvenais de toi dans Much Ado about nothing, et de mes bouffées de chaleur en te voyant cheveux au vent et chemise ouverte déclarer du vieil anglais. Et qu’apprends-je ? Tu as réalisé Thor. Au final, Cendrillon, c’est pas si mal comme projet, ça fait presque plus sérieux. Tu aurais pu faire des persos stéréotypés des contes, des héros shakespeariens, pourquoi pas ? Un peu torturés, hantés, un peu fous même. Non, les personnages de contes restent des personnages de contes, univoques et monolithiques.

Sur le papier, le casting me paraissait prometteur aussi : rencontre entre Downton Abbey et Game of Thrones. Disney allait chercher ses nouvelles stars dans les séries télés (à DA populaire, héros populaires). Sauf que Rob Stark a les yeux trop bleus et a nettement moins de panache que comme pourfendeur de Lannisters. Lily James est vraiment trop cruche. Son personnage de la série est autrement plus frondeur. Du coup, ce couple est très ennuyeux.

Kenneth, t’es pas bête je le sais. Tu aurais peut-être pu faire de toutes ces filles autre chose qu’un groupe de nunuches hystériques à la recherche d’un mâle qui pourrait s’occuper d’elle quand papa décède…Revivifier un peu la jeune fille de Perrault, ça aurait pu être intéressant. Je sens bien que tu as tenté quelque chose avec Cate Blanchet, de lui donner plus d’épaisseur et même un poil de psychologie. Mais ça ne prend pas. Du coup, on se tape une nouvelle génération de fifilles qui va attendre le Prince Charmant (celui qui a des lentilles bleues). Frout-frout.

Je vais te dire honnêtement, au point où on était tu aurais pu même te fendre d’un faux débat : verre ou vair ? Disney avait déjà tranché (ben oui, le verre quoi) dans le premier DA. À nouveau la bonne fée lui pond une paire de chaussures en verre. Tranquille. Sauf qu’il n’y a pas de Dancingallnight de Sholl à l’époque, j’ai fait des recherche. Alors, oui, il faut retrouver notre « âme d’enfant » et croire à la magie aux citrouilles et aux souris mignonnes. Enfin perso moi je n’écoutais plus le reste de l’histoire tant cette histoire de pompes m’intriguait (du coup j’ai enfin découvert que le Prince la retrouve à la fin). En plus, moi, ce qui me pose problème c’est plutôt la pantoufle. La prochaine Love Boat, je la tente en pantoufles.

A bientôt cher Kenneth, j’espère te voir à nouveau prochainement en prise avec Shakespeare. Bisous.

– Melita Breitcbach