À l’occasion de la sortie de son dernier album, Naâman et ses musiciens se sont lancés dans une tournée nationale pour faire jaillir de mille feux leurs rayons de résistance. Et quel meilleur message à diffuser que ce dernier avec les temps qui courent ? Rencard à la Rodia.

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Après avoir fait la ronde des festivals et planifié des dates dans les plus grosses villes de France (Paris, Toulouse, Lille, Lyon…), c’est samedi dernier, à La Rodia de Besançon, que ce grand reggaephile est venu déposer ses skanking shoes et son timbre de voix plutôt impressionnant. Impressionnant, c’est le mot. À l’écouter sans le voir, la première chose que tu dois te dire c’est : «Trop stylé, c ki ce gros bonhomme des îles ? ». Eh bien, mec, ce gros bonhomme, c’est un petit blondinet normand de 23 ans et d’un mètre soixante quinze qui chante, qui rappe, qui danse. Et ce, pour notre plus grand bonheur. Pour le sien aussi, surtout. Un pari tenu (et gagné) auprès de ses parents il y a deux ans quand il a décidé d’arrêter ses études pour se consacrer uniquement à la musique et au virus du reggae. Et putain, qu’est c’que c’est contagieux…

En plus, à la Rodia, on fait les choses bien. Une soirée programmée sur six heures non-stop de musique. Apéro avec Riddim Sound qui nous a revisité les meilleurs chansons reggae du moment histoire de bien nous mettre dans l’ambiance. Une première partie avec Sara Lugo, la toute petite meuf à la voix aiguë et sa djette qui, elle aussi, nous a joué quelques morceaux de son album avec, en prime, une reprise d’Alicia Keys (celle là, on sait qu’elle l’a faite pour moi). Autant vous dire que la salle était déjà bien chauffée. C’est alors qu’est venue l’heure pour Naâman de faire (enfin) son entrée sur scène. En un quart de seconde, sans vraiment trop comprendre, on a vu la salle se blinder, les gens se pousser, se bousculer pour admirer (tant bien que mal) le grand Naâmanitou.

Silence total. Il commence à jouer, chanter. Et le silence ne durera que très peu de temps, puisqu’au moment de la deuxième chanson, on passe alors d’une seule personne au micro, à neuf cents en cœur. Et putain, qu’est c’que c’était beau.

Turn Me Loose, Chill Out, Rebel For Life, House Of Love, le chanteur nous a fait vivre en live ses plus gros succès et a fait exploser le taux de rebonds autorisé. Mais, au final, ce qu’on a préféré nous, c’est le moment où les basses se sont éteintes. Il part. Et là, moment acoustique oblige, revient avec sa guitare et un sourire encore plus ravageur que dans ses clips. On ne parlera pas des groupies saoules, reloues (et plutôt nombreuses) qui ont du repartir sans voix chez elles. (À un moment j’ai même eu droit à « Il m’a regardé, J’TE JURE QU’IL M’A REGARDÉ ! »). Ou des mecs de deux mètres de haut qui se croient en festival et se mettent à lancer des pogos et te renversent leur bières dans les cheveux. Sympa. Heureusement, ses messages de paix, d’amour et de ralliement nous ont fait garder notre sang froid, et monter l’émotion de chacun.

Après trois rappels, le concert s’est finalement arrêté sur Outta Road et toujours un public et des artistes qui chantaient à l’unisson et énergiquement. On fume donc une dernière clope, on boit une dernière bière et on décide de s’en aller, retourner dans le froid hivernal de la Franche-Comté. Et tu crois que c’est fini du coup ? Raté. Riddim Sound nous attendait tous devant la salle de concert.

On change d’avis. « Vas y, on reste encore cinq minutes ». Puis dix, puis trente. On est réuni, on rit et contre toute attente, c’est Naâman et Sara Lugo qui rejoignent la foule. Petit pas de danse, micro à la main, les deux se mettent à freestyler, l’ambiance est à son top level et les gens n’en reviennent pas une seule seconde. Un moment de partage comme on n’avait rarement vu. De vrais artistes, sur aucun piédestal, plus proche que jamais de leur fans qui, eux, ne regrettent pas d’être venus.

– Kenza Naaimi
Photo : MeshPhotography