À moins d’un mois de la troisième édition des Francos Gourmandes à Tournus, on a passé un petit coup de fil à son directeur, Olivier Boccon-Gibod. Pour en savoir un peu plus sur ce festival musical et gastronomique du sud de la Bourgogne. Entretien terroir.

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Quel est le principe fédérateur des Francos Gourmandes ? L’idée, c’est de proposer au public une expérience de bien-être et de détente, c’est à dire mêler le plaisir sensoriel par la gastronomie et la convivialité des grands concerts. Souvent, le confort sur les festivals est la dernière des préoccupations. Là, au contraire, c’est celle qu’on a mise au devant de toutes nos prérogatives.

Le bilan des éditions précédentes, il est plutôt positif ? Oui, on est très content, d’autant que c’était un gros pari. Il y a eu un vrai succès populaire dès la première année. Du coup, on a même dû re-paramétrer la seconde édition pour avoir une offre gastronomique plus amplifiée en termes de volume. Puis les médias s’en font l’écho au niveau national. Je sais aussi que ça circule beaucoup entre les artistes, pour commencer sa tournée des festivals l’été, c’est l’endroit idéal pour passer un bon week-end. Au final, c’est l’esprit détente qui séduit les gens, qu’ils soient professionnels, médias ou publics.

Pourquoi s’être installé à Tournus ? Tournus, c’est quand même une grande étape gastronomique dans le panorama français. Dans une ville de 6.000 habitants, il y a quatre chefs étoilés, ce qui fait une grosse densité ! Il y a une belle tradition culinaire, historiquement, entre Paris et le sud de la France, et ça a développé toute une culture de l’excellence avec des produits du terroir de première qualité. Une grande culture du vin également. Et puis le cadre que nous offrait la ville était absolument magique. La ville de Tournus est située en bord de Saône, on est sur une jolie prairie, avec le coucher de soleils c’est magique !

Cette année, le chef Yves Camdeborde est parrain de l’événement. Comment l’avez vous choisi ? Le critère, c’est sa démarche. On recherchait un chef qui, à travers sa cuisine, transmettait des valeurs communes aux nôtres. On a très vite pensé à Yves, parce qu’au delà d’être le chef médiatique de Masterchef, c’est surtout le chantre de la « bistronomie ». À savoir, mettre l’excellence gastronomique à la portée de tous. Il va très loin dans cette démarche là puisque son hôtel 5 étoiles est attelé non pas à un restaurant gastronomique mais à un bistrot. Un bistrot pour lequel il est aussi exigeant qu’un chef étoilé, avec le service non-stop, de 6h à 22h. Et cette idée de populariser la grande cuisine, c’est exactement notre enjeu aussi, puisqu’on propose un grand événement populaire, et on veut que les gens aient le sentiment d’être accueillis comme dans un petit château.

Le public justement, il ressemble à quoi ? Il est assez large. On a à la fois les habitués et les jeunes qui viennent pour s’éclater au festival. Mais aussi un public plus familial qui vient rechercher une ambiance conviviale de pique-nique, pour découvrir les saveurs de la Bourgogne, goûter la cuisine des chefs étoilés. On se rend compte que de plus en plus, les gens viennent sur les deux jours alors qu’on a deux soirées artistiquement assez différentes. Le vendredi, c’est très énergique avec Skip The Use, Dub Inc… donc plutôt orienté pour la jeunesse. Et le lendemain, c’est plutôt chanson, familial, avec Christophe Maé, Ben l’Oncle Soul, Louis Bertignac… 

Il y aura aussi des groupes du coin. Je pense à Teldem Com’unity ou Lou di Franco… On y tient absolument et cette année, on les invite sur la grande scène pour qu’ils soient visibles dans les mêmes conditions que les têtes d’affiches. Ils ne seront pas sur une petite scène comme c’est souvent le cas.

La particularité des Franco-Gourmandes, c’est donc la bouffe. Avec notamment Les Chefs en Folies et les shows culinaires. Qu’est-ce qu’il va se passer concrètement ? Deux binômes vont « s’affronter ». Deux chefs « contre » deux chefs. À chaque fois, c’est un chef bourguignon qui aura invité un chef d’une autre région. Il s’agira d’improviser une recette à partir d’un panier garni dans un temps chronométré de 40 minutes. Tout ça sous les yeux du public, c’est donc une cuisine sans les murs avec retransmission sur écran géant. Pour eux, c’est aussi l’occasion de sortir de leur cuisine, montrer le savoir faire, prendre du plaisir au contact du public.

Lier musique et gastronomie, apporter quelque chose en plus, c’est obligatoirement par là qu’on doit passer pour faire un festival aujourd’hui ? Ce n’est pas obligatoire, mais je pense qu’un festival doit avoir une ligne directrice, une vision et une proposition personnelle. Ça peut-être une couleur musicale, bien sûr. En tout cas, il doit faire sens et le public doit vivre quelque chose de réfléchi, qui défend des valeurs. Nous, clairement, c’est ce volet là. C’est la sensation d’assister à une créativité. La cuisine peut ainsi devenir un spectacle.

La mise en valeur du patrimoine culinaire local occupe alors une place importante. Que va-t-on pouvoir goûter ? Tous les trésors de la Bourgogne, à tous les niveaux de finesse du travail. On aura une rotisserie gourmande avec les produits du terroir quasiment bruts : de la volaille de Bresse, du bœuf Charolais… On pourra aussi retrouver des plats oubliés et des plaisirs simples. On mange de moins en moins de poissons de rivière ; là, ils seront simples et frais, travaillés en sauce. La volonté est double : mettre en valeur des trésors du territoire mais aussi s’inscrire dans une démarche écologique réelle, en respectant les circuits courts et en travaillant avec les ressources les plus proches possibles.

Pour la ville de Tournus, les retombées économiques doivent être plutôt sympas. La ville quadruple sa population le temps d’un week-end ! De notre côté, on a une convention avec Pôle Emploi donc on embauche exclusivement en Saône-et-Loire, on travaille essentiellement avec des prestataires locaux. Puis ensuite, accueillir 20.000 personnes le temps d’un week-end, ce n’est pas anodin en termes de consommation pour les commerçants.

– Propos recueillis par P.-O.B 

Francos Gourmandes, 13 et 14 juin 2014 à Tournus
Plus d’infos : www.francosgourmandes.fr