20 ans… 20 ans que le premier week-end de février, tous les amateurs de vin du coin se tournent vers le Jura pour la percée du vin jaune. Au programme, deux jours de balades et de dégustations dans les rues d’un village jurassien. Cette année c’est donc le vingtième anniversaire et l’organisation a décidé de mettre le paquet. Je suis donc parti avec quelques fidèles acolytes à Lons le Saunier pour voir si le rendez-vous allait tenir toutes ses promesses.

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Je te préviens tout de suite, ici, on va pas parler de petits Dijonnais qui débarquent et découvrent le vin jaune. Non, la percée, c’est une sorte de tradition franc comtoise et je n’en suis pas à mon coup d’essai. Bref, le samedi je prends tranquillement le train de Dijon direction Dole et ensuite c’est parti pour un bus pour aller à Lons le Saunier. Mais à Dole, je dois poireauter une heure, la raison ? Il n’y a que deux bus pour emmener 150 joyeux drilles à Lons, du coup une cinquantaine de personnes restent sur le carreau vu que « le prochain bus est à 14h ». Je suis donc obligé de prendre un train pour Besançon pour ensuite repartir vers Lons. Bref, ce fâcheux incident donne tout de même une info : tout le monde est chaud pour aller à la percée.

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Pour ceux qui ne connaissent pas, le principe est simple : une soixantaine de caveaux sont dispersés dans la ville et toi tu payes 14 euros, on te file un verre et dix tickets de dégustation. À toi ensuite de te faire ton itinéraire et de t’acheter quelques bouteilles sur le chemin. Mais attention, t’as intérêt d’être patient parce que la percée, c’est l’enfer. Genre le black friday jurassien, où on a tous nos petits tickets de dégustation et donc tous prêtS à s’entasser dans les caveaux pour boire le précieux nectar doré.

Cette année, c’est la capitale Lons le Saunier qui accueille. Évidemment tu vas pas te balader dans toute la ville, c’est donc un bon morceau du centre-ville qui est réservé pour l’événement. Une fois mon équipe bisontine retrouvée vers 14h, on arpente les rues histoire de faire un peu le tour. L’ambiance sonore se situe entre le speaker qui tente d’animer une émission sur la journée, les fanfares qui déambulent et les ambulances. Parce que oui, on pourra dire ce qu’on veut et expliquer toute la noblesse de la dégustation, ce genre d’événements est aussi perçu comme une occasion de s’en coller une belle. On croise des gens déguisés (par exemple en gaulois, tu vois le genre), mais aussi des petits jeunots qui alternent entre un bon Savagnin et une 8,6 de festoche, sans commentaire. Après ce petit tour d’introduction vient le moment où on veut enchaîner les caveaux et commencer à chercher les bonnes affaires. Cette année, je n’ai pas repéré une perle rare, mais une qualité plutôt bonne pour la plupart des caveaux que ce soit en vin jaune ou vin blanc (Chardonnay, Savagnin). Alors oui, certains n’hésitent pas à boire du rouge ou du crémant à la percée : ce sont des cuistres. Mais pour pouvoir se faire une idée, il faut pouvoir goûter. Et pour ça il faut se taper des files d’attentes : cette année, il fallait compter une demi-heure par caveau. Surtout, les caveaux étaient répartis en zone, plus que dispersés un peu partout. Difficile de trouver un petit coin tranquille un peu perdu, vu qu’il y avait surtout trois grosses zones où tout le monde s’agglutinait. Ça fait un peu penser à un disneyland du vin, on s’attend presque à voir le panneau : « à partir de ce point, 45 minutes d’attente ». En même temps, les chiffres parlent de 60 000 visiteurs en deux jours.

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Après, cela ne change pas tellement l’ambiance bon enfant de la percée ; l’alcool étant un excellent lubrifiant social, on discute avec tout le monde et on découvre que finalement les gens viennent de pas mal de coins différents. Haute Marne, Savoie, Bouches du Rhône. Tous ont au moins un pote qui leur a vanté l’événement et la plupart ne repartent pas déçu. On va être honnête, les discussions ne vont jamais très loin : « Tu viens d’où ? Tu fais quoi ? C’est ta première édition ? Euh… on boit un coup ? ». Enfin une fois ta liasse de tickets terminée, il est temps de rentrer au bercail, surtout que les caveaux ferment à 18h. Pour cette édition, le comble étant qu’on a dû se précipiter pour finir nos tickets, tellement l’attente était longue, on attendait assez longtemps pour dessoûler entre deux verres. En même temps, je t’ai dit que j’étais un habitué donc je sais gérer le sprint final. Il suffit de demander des doubles doses avec les tickets restant. Un peu de blabla, du marchandage et paf t’es reparti. Quand t’as grillé toutes tes cartouches, y’a plus qu’à prendre le train. C’est le moment préféré de certains, lorsque que tu vois des dizaines de mecs bourrés s’entasser dans des trains SNCF et continuer à faire ce qu’ils ont fait toute la journée : boire du vin et aussi chanter comme des cons. Tout cela devant des contrôleurs patients et compréhensifs qui se retrouvent convertis en moniteur de colo.

Au final, cette percée 2016 aura été un cru plutôt moyen. Le vingtième anniversaire n’a finalement pas été tellement mis en avant, et le temps d’attente entre chaque caveau était redoutablement long. Mais pour les plus tenaces, il y avait tout de même de bonnes adresses et une ambiance (si on est pas allergique aux fanfares et à Michel Sardou) qui reste sympa. En tout cas, il faudra attendre désormais 2018 pour la prochaine percée ; l’association qui gère l’événement va pas mal bouger et il a été décidé d’annuler la percée 2017, pour revenir dans deux ans avec une formule sûrement modifiée. Sans alcool ? Non, je déconne.

– Romain Mac Gaw
Photos : DR