À la suite de notre enquête sur la BA 102 dans la cuvée numéro 12 de ton magazine papier préféré, l’Armée de l’air nous a contacté pour nous proposer de rencontrer le colonel Real. Le big boss de la base aérienne dijonnaise. L’homme aux cinq barrettes dorées sur les épaules. Direction Longvic, sur la base presque transformée en ville fantôme, pour discuter avec le commandant de la BA, ancien pilote de chasse. On a causé de la Guerre froide, de l’avenir du personnel dijonnais et même de la guerre du tur-fu. Parce que la guerre ça fait flipper, et encore plus avec des drones style Terminator.

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Quelle était l’importance stratégique de la BA 102 à l’époque de la Guerre froide ? Dijon est effectivement une base centrale pour tout ce qui était défense aérienne. C’est une base qui était bien placée en couverture Est mais elle n’était pas non plus collée à la frontière allemande.

C’était plutôt vers la frontière allemande que c’était critique ? À l’époque du mur soviétique s’ils avaient dû attaquer, on connaissait un peu leur plan en détails, il y avait un plan d’invasion qui mettait d’abord l’Allemagne, la Belgique en première ligne. Ils n’allaient pas débarquer par Biscarrosse.

« On montre à la Russie qu’elle n’est pas chez elle »

Aujourd’hui, avec le contexte actuel sur la Russie, parce que les Russes tournent beaucoup autour de la Scandinavie, on en entend parler. Oui, vers le Nord. Il y a des missions de police du ciel dans le cadre de l’OTAN, un certain nombre de missions appelées « Air Baltique ». Il y a des pays de l’OTAN et de l’UE qui n’ont plus d’armée de l’air, qui du coup n’ont plus la capacité ou une capacité extrêmement réduite de faire la police du ciel comme on sait faire chez nous. On montre à la Russie qu’elle n’est pas chez elle. On met des avions de chasse. Ça pouvait être des avions de Dijon à l’époque. Donc Dijon était bien placé pendant la Guerre froide parce que ce n’est quand même pas trop loin de l’Est. Mais avant que les Russes arrivent ici en avion, il aurait quand même fallu qu’ils traversent un certain nombre de choses.

Ils ne pouvaient pas venir tout droit ? Ça serait peut-être arrivé mais c’était moins exposé que Colmar, Strasbourg, les bases d’Allemagne de l’Ouest qui, elles, étaient vraiment en première ligne.

Maintenant la menace, c’est plus le Sud ? On n’a plus ce besoin de disperser nos avions rapidement en cas de conflit parce qu’on s’imagine qu’on aura le temps si jamais une menace revient à nos frontières, la Russie ou je ne sais pas, on le verra venir avec suffisamment de préavis pour avoir le temps de refaire des plans comme ça.
En ce moment, on sanctuarise le territoire avec la dissuasion nucléaire, la police du ciel et on fait des opérations extérieures. Pour faire ça, on n’a pas besoin d’avoir autant de dispersion. Déjà on a moins d’avions et quand on va opérer à l’extérieur, on trouve toujours un pays pour nous accueillir.

Dans ces guerres en Syrie ou en Libye, c’est beaucoup l’Armée de l’air qui est impliquée ? L’Armée de terre est impliquée aussi, la Marine aussi, mais c’est évident que le moyen aérien est hyper important dans ces déserts, des territoires grands comme l’Europe. Pour intervenir rapidement, pour surveiller. Il faut des points d’appui avec des avions, des drones, parce que le drone a l’avantage de ne pas se fatiguer et il peut rester en l’air tant qu’il a de l’essence. On a plutôt besoin de points d’appuis parce qu’on a besoin de bien protéger nos moyens, que ça soit en France ou sur les territoires extérieurs, et il faut que ça soit relativement concentré. On est plutôt sur une logique de concentration des moyens, notamment pour les protéger de menaces comme les terroristes. Et comme on a moins de moyens et que ça coûte de plus en plus cher, on a un souci de préserver le potentiel. Tout ça explique qu’on a besoin de moins de base parce que l’entretien d’une base aérienne, c’est extrêmement coûteux.

Donc on concentre. La cohérence globale est là. Il y a tout un processus opérationnel. Après c’est évident qu’il y a une partie d’aménagement du territoire ; ça c’est la partie politique. L’Armée de l’air ne s’occupe pas tellement de ce problème-là, même si elle y est attentive. Au final c’est bien l’entité politique élue, légitime, qui va trancher. Mais pour avoir un tout petit peu œuvré dans les milieux de décision, je vous assure que tous les arguments sont bien pesés. C’est pas uniquement des donnés technocratiques : « ça va coûter tant ».

Donc il y a quand même une part stratégique ? Voilà, opérationnelle et stratégique. Une vraie part politique d’aménagement du territoire. Les politiques élus ont quand même le devoir de s’intéresser à ce qui va se passer, en terme de redistribution de nos impôts.

C’est le président de la République qui prend la décision ? Ça monte à ce niveau-là, oui.

Quand vous avez pris le commandement, la décision de la fermeture n’avait pas été annoncée mais vous saviez déjà que ça allait arriver ? Disons qu’on savait. Même avant, il y avait des articles publiés, des choses qui trainaient sur le sujet, on savait que la base de Dijon fait partie des bases où il était possible qu’on annonce qu’elle ferme. Mais je vous dis, tant qu’il n’y avait pas d’annonce tout était possible.

Quelles ont été les explications fournies aux militaires pour justifier la fermeture ?
Il y a des militaires mais il y a aussi des personnels civils sur la base, sur une proportion d’à peu près 10%. Le militaire est relativement flexible, c’est inscrit dans les textes de loi qui régissent les statuts des militaires : il est mobile. Donc il faut parler aux militaires mais il faut aussi en parler aux civils.

« On a eu des phases de colère très rentrées. Ce n’est pas non plus la manifestation, on n’est pas dans le cadre de conflits type Air France. Tout le monde est toujours ressorti avec sa chemise »

C’était votre rôle d’en parler aux civils ? Bien sûr. Quand il y a eu l’annonce des restructurations, ça a été fait devant tout le monde. Toute la base a été convoquée dans un grand hangar, qui sert à ce genre d’allocutions. Le général qui commandait les forces aériennes, qui était ici, a réuni tout le monde. J’étais à sa droite, il avait un calendrier pour 2016 et il a expliqué tout ce que je viens de vous dire.

Toutes les considérations… D’ordre budgétaire. Donc ça été fait. Après, évidemment, c’est comme un processus de deuil. Vous prenez ça dans la figure quand quelqu’un décède, c’est d’abord un coup de massue. Ensuite vous passez par tout un tas de phases : le déni ; « c’est pas possible », la colère ; « pourquoi nous ». Voilà, c’est un vrai processus de deuil.

Sur le moment de l’annonce, est-ce qu’il y a eu un mouvement de mauvaise humeur dans les rangs ? Non. Encore une fois ce n’était pas une décision surprenante. Il y a des gens qui ont vraiment été surpris mais la majeure partie des gens se doutait que la base était en sursis donc il n’y a pas eu de mouvement de foule. La première réaction face à un deuil, c’est plutôt l’abattement. Les phases de colère viennent après.

Vous avez eu des phases de colère ? Oui, enfin ce sont des phases de colère très rentrées. Ce n’est pas non plus la manifestation, on n’est pas dans le cadre de conflits type Air France. Tout le monde est toujours ressorti avec sa chemise.

Donc ils arrivent à faire la part des choses et à s’élever au-dessus des considérations personnelles ? Avec plus ou moins de facilité, mais encore une fois, on n’est pas comme tout le monde. Des fois on a des dialogues assez francs mais on arrive toujours à déboucher sur des solutions. On essaie vraiment d’arriver avec des solutions de reclassement pour tout le monde, que ça soit pour le personnel miliaire, encore plus pour le personnel civil. On ne s’y prend pas la veille pour le lendemain. C’est quand même un processus qui dure depuis un an et qui va durer jusqu’à l’année prochaine et c’est un processus qui mobilise énormément de monde au niveau RH.

« Quand je suis arrivé, on a souligné que j’étais à Reims au moment où la base a fermé. Mais si vous prenez tous les commandants de base en poste actuellement, on a tous été à un moment à un endroit où ça a fermé »

On peut mettre fin à leur contrat ? C’est prévu ? Il n’y a jamais de décision unilatérale de la part de la Défense. La Défense ne va pas dire : « vous partez parce qu’on restructure ». Je n’ai pas d’exemple où, à la fin, ça s’est fini par : « bon bah vous avez refusé tout ce qu’on vous disait donc… ». Parce qu’on pourrait arriver à ça et je n’ai pas d’exemple, et pour l’instant sur la base je n’ai pas d’exemple non plus. Maintenant il y a aussi des aides au départ, à la reconversion, et on a des gens plutôt jeunes, mais pas seulement, qui disent : « ok moi je prends le pécule, je prends votre formation, et ciao ».

En proportion vous savez combien ça représente à peu près ? C’est pas beaucoup. Je ne vais pas vous dire de bêtise mais on est très largement sous les 10%. Les gens sont attachés au ministère de la Défense, ils préfèrent y rester, quitte à faire des kilomètres de plus. Après quand ils ne veulent vraiment pas bouger, on trouve des solutions. Dans les eaux et forêts ils recrutent pas mal de gens. Donc on a quelques niches comme ça. Ça, c’est pour le personnel civil. Pour les militaires, eux, ils sont dans un cycle de mutation qui est quasiment normal.

Ils n’ont pas le choix quoi. Non. De toutes façons ils sont mutés tous les trois, cinq, sept ans pour ceux qui bougent le moins donc ils arrivent dans ces moments-là. C’est quasiment un cycle de mutation normal.

Vous disiez que vous aviez des conversations franches donc ça n’a pas été trop difficile pour vous de devoir gérer justement cette période de transition ? Il y a des espèces de moments où c’est plus compliqué qu’à d’autres. En fait c’est traditionnel dans la psychologie de l’être humain mais l’être humain a horreur de l’inconnu. Le but c’est vraiment d’essayer de donner un maximum de perspectives. C’est pour ça que quand vous êtes derrière un camion, vous allez vouloir le doubler, parce que vous ne voyez pas ce qu’il y a derrière. Donc là c’est pareil, les gens savent qu’il y a un processus, qu’on ne va pas les virer, mais il faut leur donner des perspectives. Ça, c’est mon contrat. C’est quasiment ce à quoi je m’emploie à plein.

Vous, personnellement, vous pensez qu’on vous a affecté à cette position pour vos capacités ou parce qu’on savait que c’était en sursis ? Le travail que je fais, n’importe quel commandant de base le fait. Enfin c’est pas qu’on est tous interchangeables mais on arrive tous à un certain moment de la carrière où on a vu un certain nombre de choses. On a un petit sens politique si vous voulez. Maintenant, le processus de mettre un commandant de base à un endroit, c’est quand même des enclaves qui sont assez impénétrables. Ce n’est pas comme l’élection du pape, c’est relativement complexe, il y a tout un tas de critères qui rentrent en compte. Quand je suis arrivé, on a souligné que j’étais à Reims au moment où la base a fermé. Mais si vous prenez tous les commandants de base en poste actuellement, on a tous été à un moment à un endroit où ça a fermé. Il y a tellement de restructurations dans les armées que tout le monde a vécu au moins une restructuration donc je ne crois pas que ça soit un critère. Mais sur la base il y a toujours une activité opérationnelle ; les commandos déployés en opérations extérieures.

« À Valduc, il y a des composantes de notre dissuasion nucléaire et c’est la base de Dijon qui s’en occupe »

Ah oui c’est vrai qu’il y a toujours le CPA 20 (ndlr : Commando parachutiste de l’air n°20). Parce que j’avais lu que le CPA justement devait quitter la base l’été dernier.
Ils le quitteront l’été prochain. C’est l’EFCA (ndlr : Escadron de formation des commandos de l’air) qui est parti l’été dernier. Effectivement, le CPA 20 doit les rejoindre à Orange cet été. Le temps qu’ils restent ici, ils sont encore là avec toutes leurs missions. Après il y a encore des activités de formation ; l’école qui forme les gens au sol sur Mirage 2000 se fait sur Dijon. Donc Dijon forme encore tous les futurs mécaniciens et pilotes sur Mirage 2000. On a un bureau des archives et des réserves. Alors ça ne fait pas très opérationnel ni très sexy, mais c’est quand même un endroit qui est très important parce que c’est là qu’on centralise un certain nombre de dossiers qui servent à la vie des unités. Donc vous voyez, il y a toute une vie opérationnelle qui est là. Il y a des activités qui sont un petit peu plus secrètes, par exemple le centre militaire de Valduc.

Secrètes dans le sens vous ne pouvez pas en parler ? Dans le sens où si vous me demandez ce qu’il s’y fait, je ne vous répondrais pas. Donc à Valduc, il y a des composantes de notre dissuasion nucléaire. Ça se passe dans le Morvan et c’est la base de Dijon qui s’en occupe.

C’est des personnels de la BA 102 qui sont détachés là-bas ? C’est des personnels de la BA 102, et après on va prendre sur d’autres bases aériennes qui s’occupent de nucléaire. Mais c’est nous qui pilotons l’affaire.

Ce sont des fusiliers-commandos ? (ndlr : chargés de la protection et de la sécurité des sites de l’Armée de l’air en France et en opérations extérieures) Oui, effectivement. On s’occupe aussi de sites-radars. Je vous ai parlé de la police du ciel, on a des sites radars qui dépendent de Dijon. Sur la base il y a des sites radars qui fouillent l’espace aérien, en gros le quart sud-est de la France. On a un site radar en Haute-Saône ; c’est une ancienne base de l’OTAN, qui sert à regarder l’orbite basse, qui permet de voir comment vont nos propres satellites, est-ce qu’il y a d’autres satellites qui sont en approche. Tout ça, c’est Dijon qui s’en occupe aussi. Donc si vous voulez, ça nous maintient une activité opérationnelle malgré qu’il n’y ait plus d’avion. Comme vous pouvez le constater, c’est quand même une activité sérieuse.

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Tout ça va être muté d’ici décembre 2016 ? Oui, c’est ça. On est en train, en ce moment, de transférer sur d’autres sites.

C’est en cours d’évaluation ou on sait déjà où ça va partir ? On a des bonnes idées sur le sujet mais l’Armée de l’air n’a pas encore pris sa décision donc je ne peux pas en parler. Tout n’est pas certain. Ce qui est sûr, c’est que ça sera repris. Ce ne sont pas des activités qui ont vocation à s’arrêter parce que Dijon ferme, et donc elles vont être forcément reprises par d’autres bases aériennes.

Donc dans le processus de la dissolution de la base, on décide déjà de fermer la base et ensuite on prend les décisions de déplacer ça ici ? Oui, c’est pour ça que ça prend deux ans. C’est parce qu’on ne prend pas la décision du jour au lendemain, parce qu’on a besoin de transférer un certain nombre d’activités pérennes et qu’il faut se laisser le temps de le faire. L’Armée de l’air a quand même une idée des processus qu’il faut employer donc on sait qu’on va y arriver, mais ça prend du temps.

C’est toujours le personnel militaire qui s’occupe de l’aéroport civil ? Non, non. L’aéroport civil a été transféré à un exploitant commercial et la gestion du site elle-même est transférée à ce qu’on appelle le syndicat mixte, qui est la réunion du Grand Dijon et du Conseil régional.

Ça fait longtemps que vous ne vous occupez plus de tout ce qui est tour de contrôle ? Été 2014.

Donc c’était avant la décision de la dissolution ? Ce qui était un signe assez fort, effectivement.

Je suis tombé sur une tribune qui parlait du rôle du pilote de chasse aujourd’hui, parce que c’est vrai que dans l’imaginaire on a Top Gun, avion contre avion. Aujourd’hui on a plus l’impression que le pilote balance son armement et qu’il revient. Donc vous pensez qu’à terme ça sera remplacé par les drones ? Je n’ai pas de boule de cristal sur le sujet. Les drones c’est quand même un système qui est piloté à distance. Ce n’est pas le drone qui décide tout seul de tirer son missile à tel ou tel endroit. Il y a toujours un être humain qui prend la décision, et qui prend la responsabilité surtout, de délivrer le feu. Maintenant, le cœur du métier du militaire, ce n’est pas forcément de piloter un avion ou de piloter un char ou de piloter un bateau ; le cœur du métier militaire c’est quand même de remplir une mission, où là ce que vous avez décrit c’est d’aller délivrer un armement, à un endroit précis, à une heure précise, etc. Donc c’est quand même quelque chose de compliqué. De nos jours il y a quand même une judiciarisation autour des conflits. C’est normal, mais même sans ça un militaire doit remplir sa mission exactement dans les bornes qu’on lui a laissé, droit international ou pas.

« La ligne rouge qu’on pourrait imaginer, c’est de laisser une machine décider du droit de vie ou de mort »

Donc ça peut outrepasser le droit international ? Ce n’est pas ce que je veux dire. Ce que je veux dire, c’est que ça a toujours été la mission du militaire d’avoir tout un tas de contraintes. Le cœur du métier c’est de faire simple et donc tout ce qui peut vous alléger la tâche, on le prend. Si l’avion est plus facile à piloter et permet de bien se concentrer sur ce qu’on est en train de faire, tant mieux. Le cœur du métier n’est pas dans le domptage d’un engin technique, il est dans la réussite de la mission. C’est vrai que les avions ont évolué dans ce sens-là. Donc c’est pour vous dire qu’on se sert de systèmes qui utilisent toute la technologie moderne, qui sont très automatisés et en ultime on arrive au drone, effectivement, où là il n’y a carrément plus personne dans l’engin volant. On verra jusqu’où nous amène la technique. La ligne rouge qu’on pourrait imaginer, c’est de laisser une machine décider du droit de vie ou de mort. Peut être qu’on y arrivera un jour, parce que c’est comme ça, mais je pense qu’il y a une vraie ligne rouge, où même les militaires diront : « ce n’est pas une bonne idée ».

Tout ça, comme vous en parlez, ça a déjà été évoqué ? Quand on parle de drone, forcément on s’interroge sur la place de l’homme dans la boucle.

En fait c’est une intelligence artificielle ? Ce serait un outil pensant, qui prendrait une décision tout seul.

Comme dans les films de science-fiction. Je sais pas si vous avez vu ce film qui s’appelle WarGames, c’est un très bon exemple. C’est le mythe de Frankenstein, la machine qui prend le pas sur son créateur et là c’est l’ordinateur. C’est aussi le mythe de Terminator. Je pense que là, à un moment, le militaire dit : « ce n’est pas à une machine de prendre la décision de commettre l’acte de violence ». Il faut qu’il y ait un homme qui prenne cette responsabilité-là.

Plusieurs hommes même ? En général c’est plusieurs hommes. Il y a une autorité politique, qui s’appelle le Président de la République, qui prend un ordre et qui autorise un certain nombre de choses.

Ça vient toujours du Président ? Même quand c’est une frappe de drone ou des avions en Syrie ? Ça peut monter assez haut quand on a des doutes. Peut être pas au niveau du Président, mais je sais qu’en Libye ça montait des fois au niveau présidentiel. Maintenant, si on est sûrs qu’à un endroit précis il y a des ennemis ou qu’on a un mandat très précis, c’est-à-dire à droite vous pouvez faire ce que vous voulez, à gauche non, on peut descendre le niveau de décision jusqu’au plus bas niveau. Il y a bien un moment où c’est au pilote ou au fantassin de prendre sa décision.

Donc là, par exemple en Syrie où c’est du bombardement d’installations terroristes, c’est à quel niveau de décision à peu près ? Je ne suis pas dans l’opération, et ce sont des choses qui sont un peu classifiées, mais je pense que… Il y a deux théâtres : un en Syrie, un en Irak. L’Etat Islamique est à cheval mais on n’a pas le même comportement, quand je dis comportement c’est les règles d’engagement, d’ouverture de feu, quand on est sur le territoire irakien et quand on est en Syrie.

Qu’est-ce qui est différent ? On n’est pas au même endroit. Il y a un pays, en gros, où l’EI est partout. Et puis il y a un endroit, en Syrie, où il y a l’EI, les milices qu’on a envie d’aider face à Bachar Al-Assad, les troupes de Bachar Al-Assad elles-mêmes, les Russes, et donc on essaie de ne pas faire n’importe quoi.

– Propos recueillis par Loïc Baruteu, (octobre 2015)
photos : L.B.