Batman. Superman. Les deux superhéros les plus mythiques face à face sur un ring. Il fallait au moins ça pour venir rafler une part du gros gâteau que se tape Marvel depuis plusieurs années avec ses Avengers, Iron Man, Spider-Man, etc. Alors, qui gagne à la fin ? Sûrement pas toi.

BVS-21584rv5.0.0

L’Aube de la Justice est une suite directe à Man of Steel, sachant que l’histoire débute pendant les ultimes instants de ce dernier, d’un autre point de vue. Alors que Superman et son ennemi le Général Zod cassent Metropolis en deux, on suit Bruce Wayne qui déboule dans les rues à la rescousse de ses employés de Wayne Financial. C’est la fin du monde et le mec va sauver ses comptables, c’est avec ce sens des priorités qu’on devient milliardaire. Dès ces premiers instants, on relève déjà quelques débilités ; comme lorsque Wayne appelle ses salariés pour leur dire d’évacuer l’immeuble. Les types attendaient sagement la permission pendant que toute la ville s’écroule déjà autour d’eux. Il y a aussi la gamine sauvée par Bruce et dont la mère se trouve trente étages au-dessus, dans un building qui s’effondre. Mais qu’est-ce que tu foutais là toute seule ma petite ? Attention aux prêtres lyonnais qui pourraient traîner à Metropolis. Bref, c’est peut être un peu pointilleux de relever ces infimes détails quand le réal veut nous montrer du point de vue de l’Humanité que Superman est un gros éléphant dans un magasin de porcelaine, mais ça la fout mal quand le budget s’élève à des centaines de millions de dollars et qu’un auteur oscarisé est crédité au générique.

Avant cette scène épique, le film s’ouvre sur les origines de Batman : papa et maman tués sous les yeux du petit Bruce en pleine rue, partie de cache-cache avec des chauve-souris dans une grotte, etc. On l’a vu bien vénère dans la trilogie de Christopher Nolan et là c’est encore pire. Le gars marque carrément les voyous qu’il arrête au fer rouge. Une bat-marque synonyme de vie raccourcie en prison, où le code d’honneur incite la communauté pénitentiaire à faire le tri dans les gros méchants envoyés là par Batman. Le justicier masqué n’a donc plus aucun scrupule dans cette version de Zach Snyder, déjà réalisateur du très sombre Watchmen, adaptation des comics éponymes d’Alan Moore.

En ce qui concerne le pitch de L’Aube de la Justice, il est pire que simple : après que Superman a démoli Metropolis avec ses yeux-lasers, les gens commencent un peu à flipper. Est-ce que ce type en costume ultra skinny (mais sans slip rouge maintenant) ne représente finalement pas une menace pour la survie de l’espèce ? Sûrement pas rassurée par les thèses de Darwin, une commission se pose sérieusement la question. Bruce Wayne, de son côté, est affirmatif et veut même aller plus loin en exterminant la vermine alien. Une belle occasion pour Lex Luthor, limite plus cinglé que le Joker ici, de comploter pour mettre en œuvre ce combat entre un homme et… un dieu.

7782401406_superman

Car Superman est bel et bien considéré comme un dieu et la thématique théologique est omniprésente, dans la continuité de Man of Steel qui multipliait déjà les références à ce bon vieux Jésus. La mythologie autour de Clark Kent (David Carradine en parle très bien dans Kill Bill) est très peu abordée ici alors qu’elle reste l’un des traits les plus fascinants de Superman. Le reporter du Daily Planet (qui est un grand journal respecté et distribué dans tout le pays, comme Sparse) apparaît beaucoup plus sans ses lunettes et pour distribuer des gnons que dans son rôle de grand benêt. Mais pas le temps de palabrer, le public veut des tirs en rafale, des explosions et sortir du ciné avec des acouphènes. Verra-t-on un jour un film intello sur un superhéros ? Pouet.

Finalement, que retenir de cette superproduction qui a dû être tournée presque entièrement sur fond vert ? Pas le jeu des acteurs, qui sont sûrement ici grâce au lobbying de leurs agents. Ben Affleck a pris dix kilos de muscle mais tire la gueule tout le long et Henry Cavill, censé jouer un fermier du Kansas, se donne des airs de solennité dignes d’un premier ministre français. Un peu de tendresse dans ce monde de brutes, on retiendra Gal Gadot, très mignonne et crédible en Wonder Woman mais qui n’apparaît que sept minutes au total dans le film. Sans doute pour laisser plus de place à tous ces ressorts scénaristiques bas du front dont est truffé le blockbuster.

Quoi qu’il en soit, même si ce film s’est fait défoncer par les critiques, il a décroché le meilleur démarrage au box office de l’année en cours. Et il vaut mieux car il paraîtrait que le budget total, en incluant les coûts marketing, approcherait le milliard de dollars. Mazette ! te dis-tu. Car c’est un record historique. Mais on ne s’inquiète pas pour DC. Ni pour Marvel. Le ton austère de L’Aube de la Justice lui a été largement reproché, surtout après le succès du récent Deadpool… de Marvel. DC va ainsi lancer toute une gamme de superhéros déclinée en une masse de bouses films pour contrer son rival et sa ribambelle de jojos déjà en place. Joie.

– Loïc Baruteu
Photos : DR