On est allés à la Minoterie de Dijon pour regarder « Fracasse ou les orphelins des Vermiraux », spectacle de la Compagnie des Ò réalisé à partir d’une histoire incroyable mais vraie qui s’est déroulée en Bourgogne. On y a trouvé les étudiants des E2C de Côte d’Or, de l’Yonne et de Saône-et-Loire, qui participaient à la représentation avec les comédiens.

Le vendredi 16 mars dernier, les élèves des Écoles de la 2e Chance (E2C) de Côte d’Or, de l’Yonne et de Saône et Loire ont fait la connaissance de Nicolas Turon, de Laura Zauner et de Fayssal Benbhamed, comédiens de la Compagnie des Ô. Les acteurs vont jouer mais, surtout, ils vont amuser les ados. Ces écoles luttent contre le décrochage scolaire et accompagnent les jeunes lors de leurs parcours pour obtenir un sérieux projet professionnel. Avec cette activité ludique, ils sortent de la routine. C’est la deuxième fois que les trois institutions de ces départements travaillent ensemble.

Un show de lapins

La rencontre permet aux stagiaires des E2C de la Bourgogne de se plonger dans le monde du théâtre et de comprendre le métier de comédien à travers des jeux en groupe. Le but ? Apprendre à exprimer les émotions et à gagner de la confiance en soi. Thomas Bonnevie a 17 ans et étudie à l’E2C de Saône et Loire. Il y a quelque temps, il a pensé à être comédien, mais c’était une idée passagère. Cependant, pour lui, cette activité est vraiment bénéfique parce qu’elle va plus loin : elle aide les jeunes les plus timides à gagner en confiance face au public. Pour mettre en pratique ce qu’ils ont appris, les étudiants participent à la représentation de Fracasse ou les orphelins des Vermiraux avec les trois comédiens professionnels. Dans les dernières minutes de la pièce, chaque élève a joué son texte, l’a travaillé avant pendant l’atelier…

Nicolas Turon a écrit cette pièce. Une merveille qui mélange la fiction et la réalité. D’un côté, il récupère l’histoire du Capitaine Fracasse, roman de cape et d’épée écrit par Théophile Gautier en 1863 et en vieux français. C’est un livre un peu lourd à lire aujourd’hui, mais reste calme, Nicolas le réinvente. De l’autre, il se documente sur le cruel épisode de maltraitance auquel les enfants de l’orphelinat des Vermiraux, proche d’Avallon, ont été soumis au début du XXe siècle. 

Un jour, les gosses se sont révoltés. Pour la première fois, la justice française a pris en compte les gamins et les tortionnaires ont été mis à l’amende puis emprisonnés. Une histoire qui gagne à être connue. Comment ces deux histoires peuvent être fusionnées ? Grâce aux rôles d’Azalon, de Basque et de Fracasse. Nicolas invente ces trois orphelins qui volent le livre du Capitaine Fracasse. Ce sont des gosses fascinés par les aventures de ce héros et ce qu’ils lisent du roman les pousse à la révolte.

Décorum minimal

Il n’y a pas de scène. Le décor est minime, mais fonctionnel. Deux lits, deux tables et quelques chaises, c’est tout ce que les comédiens utilisent pour émouvoir le public, qui est assis sur des tabourets disposés en désordre dans la salle. Les comédiens, en habits ordinaires, décrivent les lieux où les actions se déroulent, mais tu les crées dans ta tête, magie du théâtre, plus frappant qu’un décor somptueux.

Soixante-cinq minutes sur un tabouret, ça peut être très long et faire mal au cul, mais pas dans ce cas (ceci n’est pas une pub pour un tabouret). La pièce est tellement dynamique qu’elle tient les spectateurs en haleine du début à la fin. Les comédiens se déplacent au milieu du public, qui fait partie intégrante de la mise en scène. Il y a de l’interaction, de la participation, du contact visuel, des émotions… 

L’histoire traite les trois niveaux temporels. Passé, présent et futur. Ou ce que les personnages appellent « misère », « amour » et « mort ». Azolan, Basque et Fracasse ont été orphelins lors de son enfance. Aujourd’hui, ils sont adultes. Ils sont ici avec toi, assis autour d’une table, en buvant une tasse de café et en te racontant leurs souvenirs.  Et ensuite ? Comment seront leurs vies ?

On se demande ce que le mot « fracasse » veut dire exactement pour la compagnie des Ô. Laura nous explique que ça représente « une chose qui t’arrive quand tu es un gosse et qui t’oblige à grandir de coup. Ça te marque ». Ces trois gamins ont dû être adultes à marche forcée. Tout le monde a son côté « fracasse ». C’est pour ça que le thème touche tout le monde. C’est un miroir où tu peux facilement te refléter. Mais il y a toujours quelque chose qui te sauve. Le roman a libéré les enfants.

Si tu as envie d’aller voir la pièce, voici le lien de la compagnie, histoire de savoir par où elle passe. Clique ici

 

  • Judith Sal.