Rencontre avec le chanteur des Têtes Raides. En tournée avec son nouvel album solo After / Avant, Christian Olivier s’est posé jeudi 9 novembre à La Péniche de Chalon sur Saône. Un homme passionné qui enchaîne les rencontres, les projets et les pieds de nez.

Christian Olivier aime surprendre et se surprendre. Il casse les codes et sort des cases. Il va là où on l’attend… ou pas. Chanteur, auteur, musicien, graphiste, comédien, l’homme-orchestre se renouvèle sans cesse. Ne lui parler pas de routine, ça l’emmerde. La zone de confort, ça fait longtemps qu’il l’a explosée. Il va là où son instinct le guide. Il se lance dans des créations à lui et s’embarque dans les projets des autres, si tant est qu’ils partagent ses valeurs. Faut de l’humain, de l’engagé et de la créativité pour Christian Olivier… et des rencontres aussi.

Il suffit de regarder son actualité pour mieux le cerner. Actuellement en tournée avec l’album After / Avant, il joue en parallèle un spectacle sur Prévert avec Yolande Moreau. Christian a d’ailleurs sorti un album sur Prévert, à la suite de On / Off l’album qui a précédé After / Avant. Vous suivez ? Il propose des lectures, musicales ou pas, compose une musique pour une pièce de théâtre, continue de travailler le graphisme avec les Chats Pelés. Il a aussi composé la musique du film « on a 20 ans pour changer le monde » sur l’environnement, le climat, les sols, la bouffe, la malbouffe et les gens. Il mène tout de front, crée des jeux de ping-pong entre ses différentes activités musique, lecture, cinéma, dessin. On en oublie sûrement.

 

Arrêtons-nous un temps sur ce nouvel album…

Cet album, c’est la continuité d’On / Off avec de nouvelles sonorités. J’ai cherché à pousser un peu plus loin un univers que je n’ai pas forcément approché avec Têtes raides. L’idée du break avec le groupe c’était d’aller fouiller d’autres horizons et de faire d’autres rencontres.

Ton parcours semble justement semé de rencontres. A chaque rencontre une création et réciproquement. Quelle rencontre a guidé ce nouvel album ?

Il y a toujours une rencontre. Ça peut être sur un album, une chanson. Quand j’ai commencé à écrire cet album, j’ai tout de suite pensé au groupe The Ex, basé à Amsterdam. Un groupe de punk expérimental, avec des rythmiques plutôt africaines que j’aime énormément. Je suis allé à Amsterdam et nous avons enregistré 3 morceaux. J’ai aussi travaillé avec un quatuor à cordes.

Dans cet album, tu parles d’une période de transition. Qu’est-ce que ça veut dire pour toi ?

Nous sommes à la fin d’une période, avec une accélération des choses. On bascule dans une autre manière d’agir, de fonctionner, de penser. Dans ce monde qui va vite, il me semble important de conserver des espaces temps où l’on s’arrête. Notre rôle au niveau de la culture c’est d’avoir des petites fenêtres où l’on prend le temps de regarder, d’écouter, de lire. On lutte avec la poésie. Je ne sais pas combien de personnes écoutent un album du début à la fin, mais pas beaucoup à mon avis. Avant, quand on écoutait un album, c’était un ensemble, une œuvre. Aujourd’hui on écoute un bout par ci par là, si on écoute.

Comment tu as transposé cette idée dans l’album ?

Il y a une urgence dans After / Avant et aussi 2-3 morceaux sans texte, uniquement instrumentaux. J’avais envie de faire résonner la musique. J’aime travailler dans le silence, créer des suspensions. Une note qui va tenir pendant un moment, ça va raconter quelque chose.

Quand tu écris les textes des chansons, qu’est-ce qui vient en premier le texte, la mélodie ?

Le plus souvent, c’est le texte qui lance les hostilités mais tout est lié. Dès que j’ai 3 – 4 bouts de phrases, je démarre une mélodie. Je ne me fixe pas de règles. J’écris et on voit ce qui se passe.

Quand tu écris, c’est entre deux ou tu te ménages des temps d’écriture ?

Au début j’ai un monde qui se met en branle. J’écris dans ma tête. C’est un moment que j’affectionne. Un temps de réflexion, d’introspection. Après j’écris. Je me mets à table, comme quand tu vas bouffer. Là je me mets à écrire et c’est un temps consacré uniquement à ça. Parfois je vais y passer une heure et écrire 3 mots, mais 3 mots ça peut suffire. Le processus d’un texte, d’une chanson, ça peut être très lent. Il existe des fulgurances, un texte qui arrive vite mais en général c’est long. 1 mois, 2 mois, 6 mois… 

Tu es né au Mali. Qu’est-ce que ça fait quand on découvre la France à 8 ans ?

Ça fait un changement radical… sur le rapport entre les gens, au monde animal. Il y a aussi une différence de climat bien sûr. Je me souviens quand on est arrivé, on était sur la Nationale 7. Il pleuvait, tous les gens étaient dans leur imperméable alors qu’à Bamako quand il pleut tout le monde est dehors, c’est la fête. Les gamins se lâchent. C’est la vie, alors que là c’était plutôt l’enfermement.

Ces origines t’influencent dans ta création ?

Obligatoirement, il y a quelque chose qui traine.

 

Pour un amoureux des mots, je te propose le questionnaire de Bernard Pivot. Ton mot préféré ?

« Trace ».

Le mot que tu détestes ?

« Apartheid ».

Ta drogue favorite ?

La littérature

Le son, le bruit que tu aimes ?

Le vent

Le son, le bruit que tu détestes ?

La connerie humaine quand je l’entends.

Ton juron favori ?

« Dégage »

Un homme ou une femme pour illustrer un nouveau billet de banque ?

Une femme. Marguerite Duras, par exemple.

La plante, l’arbre ou l’animal dans lequel tu aimerais être réincarné ?

On va repartir en Afrique. Un manguier.

Si Dieu existe, qu’aimerais-tu l’entendre te dire ?

Rien, puisqu’il n’existe pas.

Question Bonus. Quelle est la question que tu aimerais que l’on te pose ?

Comment ça va ?

Alors comment ça va ?

Ça va, je vais bien.

 

Quand on le voit sur scène, on le sent, c’est effectivement là qu’il est bien…

  • Erika Lamy

Crédit photo : Thomas Lamy