5 méthodologies d’épidémie et de confinement, pour tous les goûts. Boccace a inventé le confinement pendant une période de peste au 14ème siècle en Italie. Vous avez du mal à gérer votre vie familiale ? Huis Clos, de Sartre est un enfer de confinement. Vous pouvez aussi préparer votre fuite comme un hussard avec Giono. Vous avez le choix.

Le Décaméron / Boccace – (1349 – 1353)

Boccace a inventé le confinement, après la peste noire qui a frappé Florence en 1348. Il prend sa plume et commence la rédaction du Décaméron. En plus comme il vient de se faire briser le coeur, il sait dès le début que ce livre, il le destine au lectorat féminin. Didier Boccace Raoult se lance dans “Le Livre des 10 journées”.

7 jeunes femmes entrainent 3 jeunes hommes avec elles, loin de la ville, en attendant la fin de l’épidémie. Pour passer le temps, tout le monde se raconte une histoire par jour et par personne pendant 10 jours. Tous les jours, la reine ou le roi de la journée choisit le thème. Du romantique au comique en passant par le tragique, et même l’érotique, il y a tout, dans le Décaméron. Mode d’emploi du confinement.

“Combien de vaillants hommes, que de belles dames, combien de gracieux jouvenceaux, que non seulement n’importe qui, mais Galien, Hippocrate ou Esculap auraient jugés en parfaite santé, dînèrent le matin avec leurs parents, compagnons et amis, et le soir venu soupèrent en l’autre monde avec leurs trépassés.”

La Peste / Albert Camus – 1947

Si Albert Camus n’était pas mort d’un accident de la route dans l’Yonne, il serait très heureux du Covid-19. La Peste se vendait comme des spaces petits pains avant la fermeture des librairies. 

L’histoire se déploie dans les année 40, à Oran, en Algérie. La peste frappe la ville, les autorités tardent à réagir mais coupe finalement la ville du monde. Ils sont en quarantaine. Les habitants deviennent des chroniqueurs moraux de la situation, qui réagissent différemment face au fléau. La peste chez Camus, c’est le nazisme.

“La peste avait supprimé les jugements de valeur. Et cela se voyait à la façon dont personne ne s’occupait plus de la qualité des vêtements ou des aliments qu’on achetait. On acceptait tout en bloc.”

Huis Clos / Jean-Paul Sartre – 1943 

“L’enfer c’est les autres.” Cette petite citation qu’on rêve tous de tweeter quand on passe un mauvais lundi, bah elle vient de Huis Clos. Ça valait le coup de sauter le passage sur Le Décaméron pour arriver ici, non ?

Bon, Sartre met en place trois personnages, Joseph Garcin, Inès Serrano et Estelle Rigault qui viennent de mourir et se retrouvent dans une même pièce. Ils ne connaissent pas, ne se ressemblent pas, n’ont pas les mêmes sensibilités. Dans la pièce, les trois personnages vivent un procès à huis-clos, où ils jugent et sont jugés. En quarantaine, face à eux-mêmes. J’espère que vous êtes confinés avec les bonnes personnes.

“Inès : Vous allez voir comme c’est bête. Bête comme chou ! Il n’y a pas de torture physique, n’est-ce pas ? Et cependant, nous sommes en enfer. Et personne ne doit venir. Personne. Nous resterons jusqu’au bout seuls ensemble. C’est bien ça ? En somme, il y a quelqu’un qui manque ici : c’est le bourreau.

Garcin, à mi-voix : Je le sais bien.

Inès : Eh bien, ils ont réalisé une économie de personnel. Voilà tout. Ce sont les clients qui font le service eux-mêmes, comme dans les restaurants coopératifs.

Estelle : Qu’est-ce que vous voulez dire ?

Inès : Le bourreau, c’est chacun de nous pour les deux autres.”

Le hussard sur le toit / Jean Giono – 1951

On est en 1832, une épidémie de choléra ravage la Provence, les villes sont recluses et les routes sont barricadées. Angelo Pardi est un colonel de hussards qui fuit le Piémont après avoir tué un officier autrichien. Il doit retrouver son ami Giuseppe. Il arrive à Manosque (comme toujours chez Giono). Accusé d’empoisonner les fontaines, il se réfugie sur les toits, et hop, voilà une bonne explication de titre. Il rencontre une fille, Pauline, (eh oui, l’épidémie n’arrête pas l’amour). La ville est évacuée, Angelo et Pauline sont croque love dans les montagnes, mais elle doit rejoindre son mari à Gap. Relou. Alors Angelo retourne en Italie faire la révolution (qu’on peut suivre dans Un bonheur fou, de Giono, paru en 1957). Il existe une adaptation cinématographique cool, à mater sur un canap de niveau 6.

Pour compléter le cycle Giono, lisez Regain, paru en 1930, le repeuplement d’un village où il ne restait qu’un seul habitant, c’est la fin des solitudes et le début des solidarités. 

“L’homme est aussi un microbe têtu.” 

Ravage / René Barjavel – 1943 

L’histoire commence en 2052, en France. L’histoire s’articule autour de François. Le chaos se déploie sur la civilisation, après la fin de l’électricité, provoquée par une tension guerrière entre l’Amérique du nord et l’Afrique du Sud. Plus rien ne fonctionne, dans cette dystopie où Barjavel déploie un regard pessimiste sur la course au progrès de l’Homme. François quitte Paris avec un petit groupe de gens, auquel appartient Blanche, qu’il aime. Le groupe traverse une France ravagée par le choléra et la violence. L’idée de cette exode, c’est un retour à la terre, dans le village natal de François et Blanche. Le groupe y vit, après les ravages, une vie nouvelle, stricte et saine.

“Les hommes ont libéré les forces terribles que la nature tenait enfermées avec précaution. Ils ont cru s’en rendre maîtres. Ils ont nommé cela le Progrès.” 


  • Arthur Guillaumot