Retour farté cette semaine avec deux bédés d’un même auteur : Pascal Rabaté. Deux bédés totalement différentes. Un auteur qui revient à la bédé après un virage au cinéma. Il a sorti coup sur coup deux films. En 2010, Les Petits ruisseaux avec Daniel Prévost, une adaptation d’une de ses bédés. Et en 2011, Ni à vendre ni a louer avec Jacques Gamblin…

Je précise tout de suite que l’une des deux, Bienvenue à Jobourg!, est une réédition de 2000. L’autre, Crève Saucisse, est toute nouvelle. Rabaté est au scénario et Simon Hureau est au dessin.
Les deux ont un univers personnel très fort et très proche, c’est finalement assez logique qu’ils soient associés.

Rabaté traite des histoires de pauv’ gens, en rupture, à la marge, mais toujours populaires. Ses histoires se déroulent presque toujours chez un sous-prolétariat, parfois voyous, voleurs de poules, carrossiers et autres proprios de chiens loups méchants… Des gens dans un quotidien finalement tout à fait banal. Il a pas peur non plus de s’intéresser, comme avec Les Petits ruisseaux, aux petits vieux du coin de la rue… Même s’ils sont souvent des bras ou des gueules cassées, il les traite avec humour et tendresse.

Hureau, le dessinateur, je ne connais de lui qu’un seul de ses bouquins. C’est Colombe et la horde, et là aussi c’est, de souvenir, une histoire de férailloux pas très fins avec au milieu, une petite fille toute mimi, toute gentille qui subit la bêtise crasse de sa famille. Toujours de souvenir, c’est glauque, voir très glauque et très tristoune.

Alors, vous ne serez pas surpris de découvrir que Crève Saucisse se déroule au coin de votre rue, chez le boucher d’à côté, au camping de vos vacances. L’histoire, j’vais essayer de vous en dire un maximum sans en dévoiler trop. C’est un mélo sous la forme thriller. C’est pas super drôle, c’est l’histoire d’un cocufiage. Le cocufiage du boucher de votre village ou de votre petite ville moyenne. Le gars se fait trahir par sa femme et par… le pote avec qui la petite famille part en camping l’été.

On suite l’histoire à travers notre boucher Didier, ses espoirs, ses peines et quel mécanisme il va mettre en place pour se venger.

Va-t-il se venger, va-t-il reconquérir le cœur de femme ? Va-t-elle revenir dans les bras de son mari alors que son amant semble l’avoir plaqué ? L’histoire, pas très joyeuse vous en conviendrez, est super bien racontée. C’est sombre sans être larmoyant, l’atmosphère est pesante. On suit l’histoire à travers notre boucher Didier, ses espoirs, ses peines et quel mécanisme il va mettre en place pour se venger. Tout ce que je peux vous dire, c’est qu’une bédé de Gil Jourdan donnera à notre boucher le mode opératoire de sa vengeance. Le dessin de Hureau est rond. Tout doux comme pour arrondir les angles de l’histoire, entre caricature et réalisme. Y’a beaucoup de plans serrés pour renforcer le poids de l’intrigue, forcément. La couleur numérique, bon bah, bof, c’est pas ce que je préfère… mais ça se lit très bien, ça glisse sur les yeux comme un bon osso bucco glisse dans la bouche.

Deuxième bouquin de Pascal Rabaté : Bienvenue à Jobourg!  Là, rien à voir avec avec l’histoire précédente. C’est presque une autobiographie. Un voyage que Rabaté a fait à Johannesburg en 2003.
Une plongée dans les faubourgs des ghettos, par le versant social, entraide, assez loin de l’image d’Épinal raciste, post apartheid, d’un pays hyper sécuritaire, dangereux. C’est noir et gris, avec de la mine de plomb un truc comme ça. C’est joli, le trait est assez orignal et sort de ce que Rabaté propose habituellement. C’est pas mal, mais très honnêtement cette réédition n’intéressera que les acharnés de Rabaté.

 

– Martial Ratel

Bienvenue à Jobourg!, Pascal Rabaté – Futuropolis, autour de 15 euros.
Crève Saucisse, Pascal Rabaté avec Simon Hureau – Futuropolis, 17 euros

La chronique bédé est un partenariat avec Radio Dijon Campus.