Le réalisateur de Blue Valentine nous raconte une nouvelle histoire de famille tourmentée, autour des figures du père et du fils. Vaste sujet.

The Place Beyond the Pines est un film en 3 parties, construit comme un collier de perles, où chaque personnage est relié par un événement tragique. 3 parcours, 3 hommes perdus cherchant à contrôler leur destin. Ils vont bien entendu se rendre compte qu’il est impossible de le maîtriser. Derek Cianfrance signe avec sa seconde œuvre fictionnelle un film feuilleton, étalé un peu trop longuement sur 2h20 et 15 années. Un conseil : pour avoir une vision optimale du film, abstenez-vous de lire le synopsis ou de voir la bande-annonce, votre surprise n’en sera que plus efficace.

Impossible de ne pas penser à James Gray avec ce drame patriarcal sur la question de la filiation incessamment posée, tous comme la corruption de l’homme. Une belle histoire que n’aurait pas renié Dostoïesvki, dans un trou perdu où rien n’est censé se passer. Mais The Place… manque de rythme, entre les scènes de braquage nerveuses et les pauses de blabla trop longues qui font retomber la tension comme un vieux soufflé. Dommage en sachant que le passage entre les 2 premières parties est excellent grâce à une scène de course-poursuite où l’on passe du point de vue du poursuivi au poursuivant. Pas facile de jongler entre 3 univers différents même s’il est marrant, justement, de se demander où va donc ce film dès les premières 45 minutes. C’est surtout au bout de la première moitié que le ralentissement se fait trop sentir avant  de redémarrer grâce à un effet d’attente de confrontation inévitable.

Tatouage dégueulasse et soutien-gorge

Chaque acteur apporte sa nuance à des personnages imparfaits, humains en somme. Ryan Gosling joue de sa figure de rebelle de cinéma en cascadeur braqueur un peu moins mutique que dans Drive, Bradley Cooper en jeune flic héros malgré lui et le jeune Dane Dehaan, peut-être le plus complexe, prêt à exploser à tout moment (on se souvient encore de lui dans Chronicles faut dire). Et puis on aime les détails qui tuent comme les tatouages moches, l’absence de soutien-gorge d’Eva Mendes dès sa 1ère scène ou les tee-shirts à l’envers de Mister Gosling. Enfin n’oublions pas les seconds rôles avec 2 acteurs qu’on avait déjà vu dans Killing Them Softly : Ray Liotta en flic pourri et Ben Mendelsohn en garagiste  pouilleux.

Côté musique, car il est important de la souligner, la composition de Mike Patton est saisissante, en accord avec le Fratres de Arvo Pärt, décidément beaucoup utilisé ces derniers temps (déjà dans À la Merveille de Malick).

Difficile de trancher sur ce film, certes ce n’est pas excellent mais il serait bête de passer à côté. Reste la beauté hypnotique de certaines séquences, à l’instar de Blue Valentine où chacun finira son chemin sur la route, beyond the pines…

– Alice Chappau