C’est l’histoire d’un raté. C’est ce que raconte en gros le dernier film de Nicolas Winding Refn. Mais c’est aussi le cas de son film. Car oui, malheureusement, avec Only God Forgives, Nicolas s’est bel et bien planté.

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Alors certes, on retrouve les thèmes chers au cinéaste danois : un personnage toujours en lutte contre la société, sa volonté d’être libre quoiqu’il en coûte, un souhait dont l’issue est rarement heureuse. L’homme finit la plupart du temps écrasé. Il échoue à trouver sa place mais peu importe, il continue son chemin. Il suffit de voir Pusher, Bronson ou Drive pour le constater. Dans Only God Forgives le personnage de Ryan Gosling, Julian, est pourtant à l’opposé de celui de Drive, sans panoplie de (super) héros des temps modernes. Mutique, il cogne sans qu’aucune expression ne soit détectable sur sa belle gueule. Jusque-là ok, ça ressemble plutôt à Drive. Mais la seule chose qui le différencie du robot, ce sont ses rêves, entre fantasme et prémonition. Un personnage fade, pas du tout mystérieux. Il éprouve tout de même un peu d’humanité, contrairement au reste de sa famille de dégénérés, digne des Lannister de Game Of Thrones. Gosling joue ici un (beau) loser, castré par un frère psychopathe et une mère démoniaque et incestueuse (Kristin Scott Thomas en parfait contre-emploi de ses rôles habituels). Julian finira par accepter le sacrifice comme ultime issue à ce parcours chaotique et violent. Un sacrifice auprès de Chang (pourquoi l’asiatique doit toujours s’appeler Chang dans les films, hein ?), celui qui tire les ficelles, Dieu dans sa ville, le flic thaïlandais qui punit et pardonne à coup de mini sabre pour ensuite chanter de la soupe locale dans les bars.

Une musique (trop) présente 

Autre élément clé de la filmo de Refn : la violence. Si elle arrivait à nous surprendre dans ses films précédents, dans Only God… on s’ennuie ferme devant des séquences interminables et débiles. Ou comment passer de la violence pure à l’onirisme planant, comme un moyen d’échapper à la dure réalité. Il réussit parfois à créer une atmosphère hypnotique qui n’est pas sans rappeler David lynch. Une impression renforcée par la musique encore une fois très réussie de Cliff Martinez, évoquant l’œuvre de Badalamenti (compositeur favori de Lynch justement). Le problème, c’est que la musique prend le pas sur l’image et devient omniprésente, la qualité de la mise en scène étant très inférieure à celle de la bande originale.

Refn aime les travellings dans les longs couloirs où l’horreur peut surgir à tout moment, un peu comme dans Shining ou certains films d’horreur asiatiques. Le réal aime les citations, on le sait depuis le début de sa carrière, sauf qu’ici c’est sans aucun intérêt. Et puis hé, on ne fait pas un film avec 20 minutes de travelling lent dans des couloirs à la symétrie parfaite avec de belles lumières rouges.

En gros, Only God Forgives, c’est un peu une arnaque, une jolie forme mais sans aucun fond, la culture du vide, la palme du film vain (il était en compétition à Cannes).

Peut-être que Nicolas W. Refn a voulu faire son 1er film expérimental (raté) ou bien est-ce simplement un cruel manque d’inspiration… Ou le succès de Drive lui est-il monté à la tête ? Ou tourner des pubs pour des parfums lui a-t-il cramé le cerveau ?

Essayons d’oublier ce beau plantage, espérons enfin un nouveau tournant dans sa filmo et rematons Bronson et le Guerrier Silencieux, histoire de se consoler un peu.

– Alice Chappau