Une bédé qui pourrait aussi être une pièce radiophonique puisqu’elle est accompagnée d’un CD de Barbara Carlotti : La Fille de Christophe Blain. Oui, bédé et CD ne faisant qu’un dans ce projet.
Je vous rappelle qu’on parle bien de la même Barbara Carlotti qui fait de la chanson française et qui a sorti quatre albums jusqu’à présent. Mais avant de vous parler de la partie musicale du projet : le livre. La Fille n’est pas vraiment un bande dessinée. Tel que présenté, le livre serait plutôt un roman graphique voire une pièce de théâtre illustrée. D’un côté, on trouve le dessin, page de droite et de l’autre les dialogues et la description des scènes dessinées.
Blain évite l’erreur où le dessin ne serait que l’illustration des textes. Son talent graphique fait que son dessin est forcément intéressant. Son style est tellement chouette, entre style comix 70’s et patte perso élastique, dégingandée. C’est pas compliqué, visuellement on est très proche des Freaks Brothers de Shelton. Cette bédé américaine psychédélique et fortement droguée dans laquelle les espèces de pieds nickelés n’ont qu’une obsession : toucher la meilleur came. Là, Blain nous transporte dans cette Amérique fantasmée, sans âge où des Harley-Davidson croisent des cowboys à stetsons et moustaches. Sauf, que la came est remplacée par… l’amour.
L’histoire. Une fille très sexy se ballade dans le wild wild west perchée sur sa moto Triumph. Elle croise un bande d’amazones, elles aussi à moto mais sur Harley. Elles l’embarquent dans leur groupe mais… elle se barre. Son truc à elle c’est la solitude, la liberté sur son gros cube. En plus, le jeu préféré des amazones, c’est attaquer des villes et tabasser les hommes. Elle, la fille, c’est pas son truc. Elle tombe sur un tout petit bonhomme qu’elle cache dans son pantalon. Sa belle moustache l’a séduit et chaque fois qu’ils font l’amour, il grandit. Un peu plus chaque soir, jusqu’à ce qu’il atteigne une taille normale. Le type est un séducteur mais il devient vraiment amoureux d’elle. Alors, ils achètent ensemble un librairie. Puis elle disparaît… La retrouvera-t-elle ? C’est toute l’intrigue finale du bouquin. Vous voyez, ça part dans tous les sens : le sensuel, le fantastique, le road trip, la fable moderne… Ça touche à tout ça sans vraiment s’y arrêter, et c’est bien comme ça.
« Là où les dessins de Blain savaient éviter la simple illustration, le CD s’en contente »
Reste le CD, et là je suis un peu embêté. Sans être grand fan de tout ce que fait Barbara Carlotti, j’aime bien en général ses chansons, son univers, son son – ses productions sont toujours très léchées. Et j’aime beaucoup aussi sa voix rauque et rieuse, mais là j’vois pas trop l’intérêt du CD. À moins que ce ne soit une espèce d’audiodescription du bouquin pour les aveugles. Barbara Carlotti dit principalement les textes du livre et compose quelques chansons. Mais du coup ça coince. Là où les dessins de Blain savaient éviter la simple illustration, le CD s’en contente. Alors, c’est vrai, il y a 4/5 chansons originales mais le reste des 25 pistes audio, c’est le texte et un peu d’habillage sonore. C’est maigre et ça n’ouvre sur rien. Je suis vraiment très déçu…
Je me suis fait mon histoire à moi, ma raison suffisante à ce combo Blain/Carlotti.
La fille, c’est Barbara, le gars, c’est Christophe. Ils sont ensemble, ils s’aiment. Lui fait du dessin et sa nouvelle copine chante. Elle aime son coup de crayon ses histoire de lovers, ses persos façon machines sexuelles qui tombent amoureux. Lui, aime sa voix, son corps longiligne, ses petits seins, ses cheveux longs… Ils décident d’un projet commun pour sceller cet amour. Lui, dessinera avec style et elle, dira, chantera de belles chansons.
Comme ils aiment les États-Unis, berceau du rock et de la bédé, ils imaginent une histoire d’amour fantastique où en filigrane on pourra lire leur passion sans borne, filant sur la route 66 de leur amour, longeant les montagnes des Appalaches, symboles de tous les obstacles qu’ils rencontrent pour faire accepter leurs sentiments. Voilà, si c’est pas ça, l’association du livre et du CD n’a aucune raison.
– Martial Ratel
La Fille par Blain et Carlotti – Gallimard, autour de 20 euros.
La chronique bédé est un partenariat avec Radio Dijon Campus.