Tu t’en doutes, Manchester, ce n’est certes pas que les frères Gallagher, Ian Curtis et la rivalité entre City et United. Une authentique scène hip-hop y existe, et The Mouse Outfit n’est évidemment pas étranger à sa bonne santé actuelle. Ils en sont des membres actifs et ont très vite été reconnus pour la qualité de la musique proposée. Compte-rendu de leur récente venue à la Péniche Cancale.

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Leur premier album, nommé Escape music, n’a rien de ce hip-hop agressif, acariâtre et absolument pas avenant, que j’inflige quotidiennement à ma mie. D’ailleurs, même elle qui n’aime pas ce type de musique a su apprécier ce que The Mouse Outfit a pu proposer vendredi dernier à la Péniche Cancale. De fait, l’album est bien cool à écouter chez soi, alors que le groupe envoie du gras sur scène. C’est à peu près ce qu’on demande généralement à ce type de musique.

The Mouse Outfit arrivait à Dijon juste entre un concert à Paname et un pas loin de chez eux, à Leeds. Apparemment ils vont tourner pas mal en France dans les prochains mois encore. Rompus à l’exercice (ils ont déjà fait les premières parties de pointures telles que KRS-One, Slum Village et même le Wu-Tang), ils mettent rapidement le public à l’aise, et on se rend compte que le groupe possède sa propre identité alors qu’on aurait pu craindre qu’ils se contentent de proposer du rap UK bien connu à la Dizzee Rascal ou Mike Skinner. L’inquiétude liée à l’accent du nord de l’Angleterre est aussi dissipée dès les premiers mots – on avait pu les entendre un peu discuter à leur arrivée, et ça faisait flipper.

Chemise de bucheron et look d’opticien 

Les gars sont neuf, dont deux rappeurs (Dr. Syntax et Sparkz) auxquels il faut rajouter un bassiste, un guitariste, un batteur, ainsi que deux cuivres : un saxophoniste et un trompettiste. Ouf ! Il y’a encore d’autres gars qui gèrent les samples derrière. On sent qu’une attention particulière a été portée sur les choix des instrus, millimétrées.

Dr. Syntax a déjà une bonne carrière derrière lui outre-Manche. Il a une allure tout à fait insolite, ressemblant davantage à un gentil prof de techno qu’au type du MC auquel on peut être bêtement habitué. Il porte une chemise de bûcheron de hipster, a une certaine nonchalance mais il garde un flow dynamique. Ses phrases sont convaincantes, il tient le baraque. Le p’tit gars qui l’accompagne, comme le reste du groupe, paraît vraiment très jeune, genre la vingtaine, et le complétait parfaitement avec un phrasé hyper rapide mais toujours maîtrisé. Il avait fière allure avec sa goufa.

Toujours dans le jugement gratuit des apparences, on se sera aussi étonné de la touche du mec au synthé qui avait plus une tête à vendre des lunettes chez Optic 2000 qu’à poser du gros son hip-hop. Mais passons. Les influences diverses pourraient rebuter certains puristes, mais les mélanges de jazz, funk, voire de reggae (et il faut bien admettre -la mort dans l’âme- que c’est un des meilleurs titres qui a été joués hier soir) avec le hip-hop ont depuis longtemps faire leur preuve. Ce rap instrumental met vraiment en valeur les cuivres et le bassiste.

De la spontanéité, de la fraîcheur, de la bonne humeur. J’ai personnellement songé, dans un style plus californien, aux blanc-becs de The Ugly Duckling, surtout dans la capacité à jongler avec différents styles : les titres sont fort disparates et ce n’est pas plus mal, surtout quand on connaît la propension de certains rappeurs et collectifs à tourner en rond, à resservir des recettes éprouvées mais aussi éculées. A cet égard aussi, The Mouse Outfit aura fait du bien à la scène dijonnaise. Une bonne humeur communicative, le sentiment donné que cela leur fait vraiment plaisir de tourner et de passer dans notre patelin. Seul regret, les 1h15 du show sont passées vraiment vite.

Bon, après les concerts de The Coup et Reverie, on espère bien que les shows hip-hop vont se multiplier à la Péniche. Si on ajoute le bien trop fameux planteur local et l’after Boom Bap à la hauteur, on avait à n’en pas douter la recette pour passer la soirée coolos du vendredi soir à Dijon. Ce qui n’est, il faut bien l’admettre, pas toujours gagné.

– Tonton Stéph