On ne peut pas tous les jours aller chez Frachot ou Derbord. Pourtant, ça nous conviendrait bien, même si cela impliquait que le monde entier crève la dalle autour de nous. C’est ainsi. Life is a bitch. Et puisque, malgré tout, il te faut des nutriments et en particulier un ratio imposant de protéines, Sparse ne lâche pas le bout de gras et te propose une fois de plus de pisser à la raie de tous les vegans, en particulier les plus rageux et donneurs de leçon. Bref, on est allés à la Braserade.
La situation-même de l’établissement correspond à son concept : un peu à l’écart, pas très loin du char de l’avenue du Drapeau, discret, mais blindé. Blindé de monde : les quatre fois où je m’y suis rendu les douze dernières années, il était toujours plus ou moins complet. Une foule bigarrée d’individus -dont certains exhibent ostensiblement leur goût immodéré pour le rugby- compose plutôt bruyamment avec une déco quelque peu montagnarde. Un peu comme là où tu vas pour bouffer ta raclette, à la foire gastro. Si, assume, on sait que tu y vas pour acheter ton balai vert fluo.
Le dispositif phare du lieu est en lui-même un sujet de curiosité pour une ville comme Dijon, où les restos ne se battent pas non plus pour proposer des concepts un peu différents : un gros braséro sera déposé sur votre table, c’est-à-dire, pour les putain d’incultes, un espèce de caquelon à charbon, sur lequel tes grillades souffriront comme toi bientôt en enfer. Bien sûr, la chaleur n’est pas forcément très agréable et tu risques fort de sentir le graillon en ressortant. Mais cela reste supportable.
Là où le bât blesse, c’est au niveau des viandes. Certes, elles sont de qualité relativement correctes, mais on ne peut pas dire qu’elles soient particulièrement originales : boeuf, poulet, dinde… et pour les plus aventureux chipolatas, lard, voire foie. Pas de quoi se pâmer franchement de plaisir. Heureusement que de l’agneau est proposé, permettant tout de même de relever le niveau. La viande cuit très rapidement. Ce qui implique, au bout d’un certain moment, de rappeler le serveur pour lui redemander de la graille. Là aussi, petit souci : les membres de l’établissement, eux, sont raisonnables, et ne vous rapportent que de toutes petites assiettes de viandasse. Le message est clair : certes, c’est « à volonté », mais pas la vôtre, de volonté. Cela dit, deux rappels de bidoche devraient sincèrement suffire à affoler votre taux de mauvais gras sur les parois de vos artères, donc rassurez-vous. Petit message à l’équipe de serveurs, au demeurant fort sympathique : pourquoi apporter authentiquement ce panaché de sauces mayos si imposant ? Avez-vous vu vraiment certains clients n’en manger ne serait-ce que la moitié? Si je peux me permettre, misez davantage sur la qualité que sur la quantité : elles ont sensiblement le même goût et ne mettent pas vraiment les viandes en valeur, là où même Hassan, chez Cool +, donne vraiment de lui-même pour rendre sa sauce blanche savoureuse et singulière. Et puis pourquoi, quitte à vendre la bidoche plus chère, ne pas chercher à la faire mariner, à la chiader un peu ? Mais je comprends, vous ne vous foulez plus vraiment. C’est une recette qui marche, donc pas la peine de prendre des risques…
Comptez tout de même 23 euros pour le bordel, soit deux fois le budget bouffe des étudiants résidant à Mansart, chaque semaine. Fais tes comptes, ça fait un bon paquet de steack-frites au RU : à ne pas négliger. La Braserade vous proposera également deux sortes de fondues de viandes, alternatives, qui peut s’avérer également appréciable. Dans le même genre…
La carte intègre un nombre conséquent de digestifs – de la poire, de la prune, mais aussi des hard liquors à la fraise des bois et à la framboise vouées à dissoudre toutes ces parties d’animaux que vous avez intégrées à votre carcasse, sans aucun égard pour l’écosystème. Pour résumer, et comme vous vous en doutiez, voilà un petit restaurant sans prétention, qui mise avant tout sur la convivialité. On vous le recommande pour une soirée entre potes ventripotents, le lieu étant par ailleurs assez bruyant.
– Tonton Stéph
La Brasérade, 5 rue Gagnereaux à Dijon