Six mois dans la brume de ta cuvette dijonnaise. Ta vue a baissé, t’es blanc comme un chanteur de cold wave et tellement lumino-déficient que ton médecin t’a prescrit du carotène depuis le mois d’octobre dernier. Dès les premiers rayons de soleil fin mars, un mouvement étrange d’hystérie collective s’empare du Dijonnais… C’est la fin de l’hibernation.

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Et pour quelques semaines, il est prêt à faire la fête dehors, dans les rues du centre-ville au risque de braver l’inévitable coup de fil des voisins aux flics dès 22h30 alors même que ces fumiers pourraient loger dans un pavillon en banlieue, s’ils veulent vivre sans bruit. En plus y’a de la place pour garer la bagnole. Bref… C’est incroyable et ça ne dure pas très longtemps, alors profites-en avant qu’on retourne s’enfermer. Le chômage a ça de bon que ça laisse du temps pour étudier ce phénomène printanier, regarder les gens passer en se moquant, et évoluer en fonction du soleil pour un maximum de coefficient vitamine D, le tout, en terrasse bien orientée, ce qui est quand même plus classe que de se claquer des 8°6 dans un parc. Sourires, jupes et pantacourts. Parcours chronologique d’une vraie journée de touriste. Si tu travailles, considère que cette journée est un samedi.

Le Kent : 11h-13h

On te fait commencer la journée à 11h, sans se brusquer (on ne sait pas ce que tu as fait la veille), avec un petit café sur le marché. Il y a du monde les jours de marché, forcément. Faut être à l’affût. L’Équipe et le BP à dispo si t’es pas passé acheter la presse. Pour les plus jeunes d’entre nous, la presse, c’est comme une application, mais en papier. Beau mélange de bobos du marché, de trainiaux de centre-ville, de vieux habitués et de communauté tunisienne (au jugé) qui vient se prendre son petit express. Le maraîcher d’à côté t’hurle dans les tympans mais l’équipe est à la cool et tu n’attends pas 15 plombes pour te faire servir.

L’Industrie : 13h-15h

À 20 mètres du Kent, pratique. Va donc te faire un steak à l’Indus’. La rue des Godrans est super agréable depuis qu’ils l’ont piétonnisée. Mais c’est un canyon. Un goulot d’étranglement. Le soleil y passe brièvement, faut profiter. À peine le temps d’aller pisser que tu l’as raté. Si tu es dans le timing, la lumière qui tape sur cette petite pierre de Comblanchien est au poil. Le patron t’amènera une petite liqueur trop sucrée après le dessert. Mais tu la boiras sans hésiter car c’est gratuit.

Le Point d’Eau : 15h-17h

Je te l’ai calé en milieu d’après-midi mais point de vue soleil tu peux y aller n’importe quand, c’est plein sud. Terrasse urbaine. Trottoir bord de rue Jeannin. Street shit. Ce qui fait son charme. Y’a un flipper AC/DC, le meilleur jeu de fléchettes de la ville et un demi à 2,20, ce qui, mine de rien, ne se trouve plus beaucoup dans le coin.

O’Zaviat : 17h-19h

L’établissement a réouvert il y a peu. Pour être honnête, on ne le fréquente jamais l’hiver. Ce qu’on aime, c’est la terrasse. Pour boire des pastis. Soleil de fin de journée sur la place Emile Zola, une des dernières où il reste un peu d’arbres… Mais qui ne gêne pas la terrasse des aviat’. On en prend plein la gueule. En plus, c’est le seul café de la place. Et pas un resto sans âme. De l’âme, y’en a. Quelques chiens aussi, et un public pour lequel l’alcool n’a plus aucun secret. Des pros.

La Péniche Cancale : 19h-21h

Tu finis ton parcours à peine plus loin, port du Canal. Un peu de fraîcheur parce que tu as déjà pris cher. À cette heure-là, le soleil décline ;  si ça te tente de profiter des derniers rayons, espère qu’il n’y ait pas la bâche tirée sur le pont de la Cancale. Sinon c’est pas une terrasse au soleil, c’est une terrasse à l’ombre… C’est un peu frustrant parfois. Mais ça repose l’épiderme. Petits plats mitonnés, bon son, jeux d’enfants à proximité pour les parents, caïpirinha pour les plus audacieux. Si tu ne restes pas te finir au concert, t’es chez toi à 22h, relax, avant le coup de fil au flic du voisin, à peine ivre mais bien tanné. Attention, bronzage cycliste. À parfaire à Arc-sur-Tille ou Grosbois à partir du mois de juin.

Allez, mets un peu de biafine et va te coucher. Tu seras en forme pour la messe. Ou Téléfoot. Il va sans dire que dans ce classement « meilleure terrasse », le paramètre « j’aime aller dans cet établissement car je le trouve agréable » joue beaucoup. Sinon, on se serait posé au Mc Callagan, ou place de la Lib’, mais on n’aime pas trop y aller. C’est un choix. Cependant, tous les endroits qui ne sont pas cités ne sont pas désagréables pour autant. Voilà, c’est dit. Vous pouvez aller jeter un oeil au classement 2013 de nos collègues de Jondi. Reward : la terrasse remorque de l’Alchimia… disparue.

– Chablis Winston
Photo : DR