Le très attendu Mad Max: Fury Road est sorti la semaine dernière. Suite de la trilogie réalisée par George Miller dans les années 80, la pression est toujours assez lourde. George a-t-il trahi les fans ? Parvient-il à renouveler le propos ? A réinjecter du souffle 2015 dans tout ça ? Qui joue en première base ? Réponses.

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Charlie Babbitt. Pour ce qui est de Mad Max, soyons franche. Je ne suis pas une vraie cinéphile : je n’ai pas vu les premiers Mad Max. C’est pas grave, prenons cet opus vierge de toute attente. J’en connais pourtant le personnage de Max tant il est rentré dans la culture mondiale. Avec Mel Gibson et Tina Turner dans le 3, plus échevelée que jamais. Monde apocalyptique post choc pétrolier (le premier date de 1979). Des voitures et de la violence. George Miller reprend les ingrédients essentiels de la recette et rajoute quelques ingrédients so 2015. Dans ce nouvel épisode, c’est l’eau qui manque. Et des plantes. Tout cela est détenu par Immortan Joe, un gros gros méchant qui asservit le reste de d’une humanité un peu louche, et moche. Les nouvelles drogues, ce sont l’eau et le sang. On rajoute aussi quelques doses d’expérimentations étranges avec ces Wars Boys, belle trouvaille cinégénique. Sortes de kamikazes qui font terriblement écho aujourd’hui puisqu’ils ont un plaisir énorme à mourir au nom d’une cause, pour rejoindre leur Valhalla. Ajoutons enfin une touche de féminisme. Furiosa (Charlize Theron, sublime très loin de sa robe Dior) emporte avec elles les pondeuses d’Immortan Joe. La PMA pour les grands dictateurs tarés, ça fait réfléchir.

Sinon, vous vouliez revoir Max ? Hahahah, ben non. Enfin si, mais pas aussi rapidement que vous ne l’espériez. Joli petit choix de mise en scène puisque que le personnage qui s’installe c’est l’Imperator Furiosa. Joli pied de nez de Miller à son perso : Max est attaché, empêtré et muselé pendant la première demi-heure de film. Mad Max n’existera que parce Furiosa le décide. Et c’est elle du coup qui s’est installée sur le devant de l’écran.

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Je passe assez vite sur les rares plans un poil nunuches. La finesse psychologique des personnages n’est pas le fer de lance de Miller. Honnêtement, quitte à faire du grand spectacle, vas-y à fond George – ce que tu as fait dans l’ensemble certes. Mais du coup les 20 minutes de pause que tu colles pour nous laisser respirer (c’est gentil hein je dis pas) sont presque de trop et viennent ralentir le film. Mais remonter à la surface, on en n’a pas envie. Le réal se rattrape à pas mal d’endroits cela dit en laissant sous silence ce qui encombre : on n’est pas là pour causer bon sang, mais pour fuir une bande de détraqués. Les détails de qui est là pour quoi : à la trappe.

Bon, passons à ce qui compte dans le film : la mise en scène aussi furieuse que son Imperator, aussi tarée que ses War boys, aussi mutique mais fonceuse que Max lui-même. Disons le tout de suite : ça envoie le bois ! C’est dans la fuite et la poursuite, dans les combats époustouflants que Miller nous file une grosse claque. Aller-retour d’un porte-guerre au milieu de nulle part avec pour objectif d’atteindre un lieu qui n’existe plus. La conquête de l’espace, la bataille pour un territoire ou le western réinventé (encore). La caméra de Miller ne connaît pas l’arrêt et prend le War Rig en marche sans jamais le lâcher. Sauf pour aller titiller les hommes-perchés, sorte de circassiens de la mort. Ce qui fait la différence entre Mad Max et les blockbusters de ces dernières années, c’est le réel. 80% du film est tourné en prises de vues réelles, peu de numérique donc et ça nous fait du bien. Les cascades n’en prennent que plus de matière, les explosions pètent vraiment et le film devient vivant, vibrant, loin de l’uniformité numérique. Même si Avengers 2 n’est pas si mal, Miller arrive à le piétiner en proposant un film d’action qui vit : tout est viscéral et matière tangible. Pas besoin des 456 scènes qui nous expliquent ce qui se passe. Les méchants se tapent vraiment dessus et quand ils tombent de leurs véhicules, on entend le choc du corps sur le sol. Les décors sont là en dur, les véhicules ont été construits et consomment de l’essence en vrai. Les corps, les chutes, les cris, les coups, tout se sent, se voit, se touche, se vit. On crache la poussière qu’on a dans la bouche à la sortie, on s’endort avec une bande son de la mort (au sens propre) pleine de bruit et de fureur entre les tambours fous, les vrombissements de moteurs et la guitare saturée du War Boy – Zicos (une VRAIE guitare lance-flamme !) et grâce à la sublime bande originale de Junkie XL.

Alors la réponse est « oui », George Miller a réussi son retour avec Max en héros toujours colère, en lui collant une gonzesse pas loin d’être plus folle et dangereuse que lui. En revenant d’entre les morts avec ce film épique et furieux, George Miller file une grosse claque aux blockbusters nouvelle génération. C’est clair, George, we don’t need another hero.

 – Melita Breitcbach

À L’Olympia en VF et au Cap Vert en VO les lundis et dimanches soir à 20h00.