Salut c’est cool est un OMNI (Objet Musical Non Identifié) en pleine expansion. Quatre albums publiés sur leur site internet (salutcestcool.com), un cinquième chez Barclay : « Sur le thème des grandes découvertes ». Un succès grandissant qui entraîne pas mal de louanges et critiques. Après leur passage – poubelles sur la tête – au Petit journal de Canal + jeudi, ils étaient le lendemain à La Vapeur à Dijon. On les a rencontrés avant leur concert où ces anciens étudiants en art déglingués et créatifs avaient invité Gargäntua et Rich Aucoin à se joindre à leur rave intérieure, entre sons poppy, confettis, sueur et techno.

SCC

Au départ, vous aviez publié vous-même vos morceaux gratuitement sur votre site, vous utilisez des matériaux recyclés dans vos concerts… Tout ça semble être une démarche proche du DIY punk : refus du consumérisme et de la société. Maintenant que vous avez du succès et que vous êtes chez Barclay, cela change votre rapport à la musique ?

Martin : Quand on joue, sur la scène, on a l’énergie des concerts punks, les gens pogottent presque, c’est ce qu’on nous dit ! Mais notre succès est modéré, on n’est pas des grandes stars non plus.

James : On a fait ça pour l’expérience, mais cela ne change rien à notre façon de travailler.

Louis : On peut garder le contrôle total de ce qu’on fait et puis les gens sont toujours très critiques, ça c’est rassurant ! Hier, par exemple, on a fait un truc à la télé, j’ai lu quelques tweets : “salut c’est naze” , “ils ont fumé la moquette” ! (rires)

Vous n’avez pas peur de vous assagir ?

On a des morceaux sages, d’autres bêtes, certains plus réfléchis, on sera toujours plusieurs choses.

Vous avez un public très jeune, plutôt potache, mais votre démarche est sérieuse, l’art est quelque chose de présent dans vos vies. Comment vous recevez l’idée que certains prennent ce que vous faîtes comme étant seulement une grosse blague ?

On en parlait récemment et on trouvait ça très bien que des gens complètement différents puissent apprécier, viennent aux concerts et se rencontrent. Le fait que notre public nous apprécie pour différentes raisons, c’est assez génial. Au final ils se retrouvent au concert et dansent ensemble. Ils partagent la sueur mais pas forcément leurs idées. C’est chouette que les jeunes s’intéressent à nous, ça peut leur donner des envies de faire des trucs différents et nouveaux. Certains nous disent qu’à travers nous, ils voient une façon de vivre qu’ils n’avaient pas envisagés… que cela les pousse à faire des choses, produire. C’est super motivant d’entendre qu’on peut être une source de motivation. Peut-être le fait qu’on fasse tout nous-même, musique, video, site internet, expos, participe à cette dynamique. On n’est pas des virtuoses, on fait les choses comme on les sent. Certains peuvent penser : « ce qu’ils font, ça à l’air simple, moi aussi j’ai envie de le faire », ou encore « c’est vraiment pourri, moi je peux faire mieux ». Et bien fais-le !

 

Alors, petite présentation quand même ! Vous venez d’où ? (Question à sens multiples, à prendre comme vous voulez : études, pays, ville, galaxie…)

Louis : Moi, je viens de la banlieue parisienne. C’est là-bas que j’ai rencontré James.

James : Si on voulait dire un « on » général, on dirait de la terre, de la life-zone. Ou de la dead-zone.

Martin : Ça veut dire qu’on est des zombies ?

James et Vadim : Non, on vient de la living zone, non du living room ! Ouais ! Ouais ! (rires)

Vous étiez tous étudiants en art ? La musique, c’était une évidence pour vous ?

Vadim : Pas du tout, on a commencé pour s’amuser, puis on a échangé des trucs petit à petit, genre : « Regarde, j’ai téléchargé un logiciel de musique ! »

James : Ouais, c’était rigolo ! Mais, au départ, on a fait des écoles de beaux-arts, de cinéma, de design…

La techno a explosé dans les années 90… Votre look vestimentaire rappelle aussi cette période…Vous êtes restés dans les années 1990, 2000 ?

Vadim: Dans les années 90 il y avait Martin Margiela qui était styliste et qui a fait un défilé de mode avec des mannequins qui portaient uniquement des poubelles, des objets récupérés, recyclés.

Vadim : Moi j’ai aussi une super collection de sandales méduse, depuis tout petit…

James : Ah, ben alors on est à fond années 90 ! (rires)

Martin : Ce qui peut aussi s’expliquer plus rationnellement, c’est qu’on achète des vêtements dans des friperies, ce sont des vêtements usés et qui viennent d’une génération précédente, et ça vient souvent des années 90. Mais, on veut pas se limiter à un style, à une époque. C’est plus nos moyens ou la méthode de travail qui nous apporte une certaine esthétique, ou notre manière de vivre on utilise beaucoup d’outils numériques du XXIème siècle dans nos clips (ordi, appareil photos, etc.) quand même !

James : Et puis, on peut dire qu’on est pas mal inspiré par notre jeunesse en général. Pour la musique, les textes, on puise pas mal dans nos souvenirs et dans notre enfance. On a écrit une chanson par exemple qui s‘appelle Tony Hawk qui est sur un skater, c’est un peu une chanson emblématique qui parle de nous aussi du coup !

Salut c'est cool : Vapeur

On va parler d’art, alors, un peu. Situez-vous par rapport aux mouvements artistiques que je vais vous nommer, ok ? Par rapport à Marcel Duchamp, le père du ready-made et l’emploi artistique qu’il fait des objets du quotidien, vous vous sentez proche ?

Tous : Ah oui, ce serait dommage de ne pas l’être.

Martin : On a fait une expo dernièrement, où il y avait plein de ready-made. On utilise aussi des morceaux de phrases qu’on trouve et qu’on récupère sur internet, qui ne sont pas à nous, on se les approprie, on les réutilise. Les recyclages et les collages de toutes matières qu’elles soient virtuelles, textuelles, ou des objets, c’est très intéressant et c’est souvent très amusant !

James : Et aussi notre musique, la techno, c’est un peu hypnotique quand même et Duchamp a beaucoup bossé là-dessus.

Par rapport à l’actionnisme viennois ?

Tous : Non, on ne se sent pas du tout proche de ça. Ils font peur. Mais respect, respect de leur trip. Je pense que c’est bien que ça ait existé, c’est important. Mais on n’est pas trop sexe et sang, nous, pas du tout. On est plus bureautique et informatique ! (rires)

Fluxus ?

Tous : Ah, oui carrément plus.

Vadim : Moi, j’adore Yoko Ono, son travail est fascinant.

James : Je pense quand même qu’on est assez doux, on est hyper sage, en fait.

Tous : Oui, quand on monte sur scène, on n’enfreint jamais les règles. On peut avoir des morceaux de musique un peu foufou, mais c’est plutôt gentil. C’est de l’énergie, jamais de la méchanceté.

Martin : Mais on aime quand même transgresser certaines choses… (rires) On provoque aussi une certaine idée que sur une scène, ce n’est pas obligé qu’il y ait des acteurs d’un côté et des spectateurs de l’autre, on essaie de renverser cette dynamique… On aime brouiller les codes. On est provocateur contre un certain schéma pré-établi. On essaye de retourner les règles qui n’ont pas lieu d’être, qui pour nous ne servent à rien…

Tous : Bon, on n’est peut-être pas sages, alors… Ouais, on va laisser le doute !

Par rapport à la performance ou au théâtre contemporain, vous aimez, vous y allez ? Parce que Sexy Sushi, par exemple, avait collaboré à un spectacle de Théo Mercier. Ça vous intéresserait de jouer votre musique sur une scène théâtrale ?

Tous : Ah, oui on y était ! Ben, oui, ça nous intéresserait beaucoup. On avait beaucoup aimé d’ailleurs, ça donne plein d’idées. On aimait bien l’idée de collaboration entre plusieurs artistes qui viennent de différents milieux.

Maintenant on vous donne des noms de musiciens et vous dites ce que vous en pensez. Philippe Katerine ?

Il y a pas longtemps, il a passé un morceau de nous à la radio sur France Inter. Il fait une émission tout les samedis “La langue à l’oreille” qui est géniale. On était très contents et un peu fiers, on était seuls dans une voiture et on est tombé dessus par hasard. Ce qu’il y a de bien avec Phillipe Katerine c’est qu’il part dans tous les sens, il se permet des choses. Il n’y a pas de limite dans son champ d’expression, ça donne envie de faire pareil !

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Ceephax Acid Crew ?

Pour la soirée à La Vapeur, on a invité Gargäntua et Rich Aucoin… à Paris on invite Ceephax Acid Crew et une surprise… On aime sa musique et ses clips, on voulait qu’il fasse un remix de nous sur l’EP mais il n’a pas eu le temps malheureusement, c’est partie remise si un jour il a envie. C’est le principe du concert d’aujourd’hui (ndlr : le 09/10 dernier) et de ceux qu’on va faire : on invite des gens qu’on connaît pas forcément très bien mais qu’on apprécie comme Jacques Alifer, on écoute des artistes qui viennent du milieu “teuf Europe”, Alifer est italien, vandale qu’on avait invité est anglais. On a un invité surprise à Paris qui est italien mais on peut pas dire son nom parce qu’il a une date à Paris le soir-même… Enfin on peut le dire mais faut pas le divulguer… c’est R….K

M.Oizo ?

Tous : On aime bien sa musique et ses films. Wrong notamment est le film qu’on préfère. En musique, il a un sens de la boucle trop marrant, très différent et très fort à la fois !

Mansfield TYA ?

James : J’aimais énormément quand j’étais au lycée, j’étais à un de leur tout premier concert.

Martin : C’est au concert de Mansfield TYA qu’on a rencontré notre tourneur, c’est pour ça qu’on est là aujourd’hui donc. Le destin !

Est-ce que vous pensez collaborer avec un artiste dijonnais, Sexy Sushi a collaboré avec Vitalic, vous pourriez peut-être recycler Yves Jamait ou Hubert-Félix Thiéfaine ?

Ah ouais, Vitalic est Dijonnais, on savait pas… Thiéfaine ?! T’es méchant ! Il est pas mort, on s’est retrouvé à jouer dans la même salle… Par contre si tu veux on peut faire la chanson de la, la, la… (air du banc bourgignon) ?!

Ah oui vous connaissez le ban bourgignon ?

Martin : Oui moi j’ai de la famille ici, ma grand-mère habitait à Saint-Apo et mon oncle à Longecourt-en-Plaine… Tu connais le vin Joseph Voillot ? C’est ma famille !

– Propos recueillis par Kochka et Jans
Photos : Salut c’est cool dans les loges de La Vapeur / DR