Spectre, le nouvel opus du gentleman anglais au service de la Reine se pose à Dijon (et partout ailleurs dans le monde). Daniel Craig remet son joli costume cintré pour aller gambader sur les toits à la recherche du grand méchant. Et entre deux jolies filles. Le tout sous le regard trop tendre de Sam Mendes.

007

26 ans : depuis les années 60 James Bond se trimballe sur nos écrans, petits et grands, et à travers le monde pour déjouer les complots les plus ignominieux contre la Reine. Plusieurs acteurs, de Sean Connery en premier, à Daniel Craig, en passant par Roger Moore, Pierce Brosnan, George Lazenby et Thimothy Dalton. Ha oui, et David Niven mais y’a que mon mec qui sait qui c’est. Attention je les ai donnés dans le désordre, à toi de les ranger dans l’ordre chronologique.

SPOILER ALERT

Dans Spectre, James reçoit un message d’outre-tombe de M. Il doit tuer un méchant et se rendre aux funérailles. Ce qu’il fait en bon sujet. Et bien sûr, il va découvrir une horrible société secrète, dirigée par un horrible méchant qu’il va falloir trouver, traquer et éventuellement tuer pour sauver l’Angleterre et le reste du monde.

Non spécialiste de Bond, je m’interroge : pourquoi un scénario aussi faible, aussi simpliste ? Pourquoi ? Pour être dans la lignée du précédent ? Soit. D’aucuns me diront : c’est un divertissement, on ne demande pas autre chose à James Bond. Il est vrai que question divertissement et grand spectacle ça se passe pas mal : 2h30 de guide du routard grandeur nature, du Mexique à l’Autriche avec du cinémascope et de la belle image à en faire tirer un poster pour tes toilettes. La petite galerie de persos qui accompagne notre double-agent fait le job, avec une mention spéciale à Q, l’inventeur de gadgets. Les gadgets qui bien sûr feraient pâlir d’envie l’inspecteur du même nom. Les courses poursuites sont aussi improbables que saisissantes. Beau boulot Sam. Quant aux fameuses James Bond Girls, le choix tient là encore ses promesses. Monica Belluci en veuve italienne pseudo-éplorée et Léa Seydoux pour le suivre dans ses aventures. Belle mention à l’actrice française qui continue une sacré carrière et qui assure un roulement de popotin pas piqué des vers à la limite de la vulgarité, mais j’ai cru comprendre que dans les James Bond on ne demandait pas autre choses aux filles (même Miss Moneypenny y passe).

Voilà voilà. Mais quand même. Je m’interroge sur la nature et l’absence de complexité et surtout l’énorme tour d’ivoire dans laquelle James Bond est enfermé. A l’époque du choix de Craig pour le rôle, la moitié de la population a hurlé au scandale (parce qu’il était blond, trop rugueux…). Il a été question d’Idriss Elba : nouveau tollé. What the fuck. Il me semble que la richesse de tout personnage typé ou codifié comme lui, c’est tout de même la marge. Batman est à cet égard une réussite totale. Tout en respectant le personnage d’origine, chacun des réals qui s’est emparé du personnage en a fait des choses différentes. Le dernier en date (incarné par Bale et filmé par Nolan) parvient en respectant les règles à traduire une angoisse générale révélatrice d’un état du monde (je vais trop loin peut-être ?). Mendes ne semblait pas si mal placé pour donner un peu de mordant (American Beauty) ou de profondeur (Les Noces Rebelles) à ce personnage. James Bond semble engoncé dans un rôle un peu plat, à l’épaisseur psychologique faible (c’est un gentleman, un homme à femmes, il sait bien se battre). Et je m’interroge encore quand même sur le sens de rester aussi impassible face au monde. Peut-être est-elle bien là au fond sa force : son impassibilité, sa capacité à ne jamais être touché, ni par les faits, ni par les gens. Nous avons peut-être tous à apprendre en ce moment de James Bond. Mais je ne crois pas qu’il ait mis les pieds dans la réalité ces derniers temps.

– Melita Breitcbach

En ce moment au Devosge en VO et au Darcy et à L’Olympia pour les plus feignants d’entre vous.