Il y a bel et bien une recette originelle du kir, le fameux apéritif dijonnais que tu trouves un peu partout around the world. Bah ouais, le prosecco ça va deux secondes mais faut pas déconner, y’a qu’un roi de l’apéro par ici. Ce monde tellement fou a si bien dégénéré que tu ne sais pas nécessairement ce qu’est un vrai kir, qui n’est pas un simple « blanc cass’ » ! Forcément, tu es confus. Voici enfin la vérité mise à poil.
Pour les Dijonnais, le kir est une institution. C’est l’apéro tradi, le truc du coin. Ils s’insurgent lorsqu’ils vont à Paris ou à l’étranger et qu’on leur propose du kir au mousseux, ou un kir-mûre. Franchement un kir mûre ?!! On ne peut pas laisser passer ça. Comme tu n’es peut-être pas un puriste qui passe ses soirées à potasser des recettes de cocktails, tu ne connais sans doute pas la recette de cet apéritif délicat. On s’est plongé dans l’Histoire pour enfin savoir, avec moult détails. Tu sens tes poils se hérisser ? Tu vas enfin connaître la véritable composition du kir.
Et franchement, y’a pas de quoi se retourner la tête. À l’époque, il y a un peu plus d’un demi-siècle, on ajoutait une mesure de crème de cassis à deux mesures d’aligoté. L’aligoté, c’est un cépage bourguignon acide et léger, qui avait quelques problèmes à se vendre à l’époque. Une mauvaise réputation. En fait, la crème de cassis, c’était pour arriver à boire l’aligoté, qui se marie parfaitement à celle de Dijon, à condition que cette dernière contienne au moins 19% d’alcool si on en croit la rumeur populaire.
On doit l’origine de cette potion magique au chanoine Kir, illustre maire de Dijon de 1945 à sa mort en 1968, qui n’avait rien à envier à Tom Cruise dans Cocktail. Même s’il était curé, il aimait bien picoler, le Félix. Il paraît même qu’il avait toujours avec lui, pendant ses déplacements, une bouteille d’aligoté et une de crème de cassis pour l’apéro. Félix faisait aussi tiser ses invités de marque à la mairie et le kir est devenu une institution. Cette tradition a perduré après lui et aujourd’hui on continue de se donner soif en début de soirée à base de ce « blanc-cass » que le monde envie aux Dijonnais. Il n’y a qu’un seul kir, bordel.
Par contre, si tu aimes le frisson et les nouvelles sensations, il existe évidemment un paquet de variantes, par exemple le Double K créé en 1960 en prévision de la visite de Nikita Khrouchtchev au chanoine Kir. Bien sûr, les Bretons n’ont pas pu s’empêcher de foutre leur nez dedans donc il existe un « kir breton » avec du cidre. Les Alsaciens ont fait pareil avec du crémant d’Alsace, les Savoyards avec du blanc de Savoie. Tout le monde y va de sa sauce, même si ça n’a plus rien à voir finalement. Comme les Normands qui mélangent du cidre et du calvados et qui appellent ça un « kir normand ». Ok.
Heureusement, les locaux sauvent l’honneur. Dans les campagnes du coin, on trouve le communard, une variante du kir à base de vin rouge et de crème de cassis. Génie.
– Loïc Baruteu
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