Le DFCO, je suis conscient que ça ne fait pas rêver. C’est un club qui n’a que très peu d’histoire, qui n’a pas 20 ans. Quand j’étais gamin, c’est pas le club que je supportais, ni même son ancêtre le CDF, auquel je préférais les épopées d’Auxerre ou la flamboyance de Sochaux, club pour lequel j’ai encore beaucoup d’affection (la crinière du lion, t’as vu). C’est un club qui navigue entre Ligue 2 et fond de la Ligue 1 depuis de nombreuses années, et je comprends même tous mes potes qui, ne vivant pas là, se foutent de ma gueule quand je leur parle de mon club de pécore. Mais il y a quelques moments magiques, comme celui vécu samedi face aux Qataris du PSG, comme d’autres les quelques années passées, où je me dis que cette équipe régale, qu’elle a du cœur, une paire de couilles, si je puis me permettre, et rien à branler de qui est en face. Et ça c’est beau.
Il y avait plus important que le foot ce week-end, comme tous les week-end, dans l’actualité. Mais quand ton club reçoit l’ogre du championnat de France, tu sais depuis des mois que tu ne vas pas rater ça. Comme on n’a pas voulu se précipiter à faire la queue comme des fans de Mylène Farmer quand les places ont été vendues et qu’on ne voulait pas les acheter à des fils de putes qui les revendent à 150 euros au marché noir ou encore supplier des potes sponsors du club pour avoir des tickets, on s’est dit qu’on allait aller le mater dans un bar. Direction le Barbarians, qui paraît une valeur sûre dans le genre sportbar dans le coin.
Y’avait un tournoi de fléchettes ! On dérangeait les participants en regardant le foot ! Y’avait pas le son et les 3/4 des gens n’en avaient rien à branler du match ! Insupportable. Un mec nous a demandé si Dijon jouait en jaune ou en rouge ! Ils étaient plus nombreux et plus balaises, alors on est vite allé au Kings Tavern, juste à côté, où le patron, comprenant notre détresse, nous a mis le match et le son, ce qui a ravi les quelques clients présents.
« Les footix qui supportent le PSG ? C’est des gars qui sont du genre à appeler n’importe qui Papa dès qu’ils croisent un mec plus cool que leur propre père. »
De là, une pinte fébrilement accrochée à ma main droite, j’ai vu mon DFCO fermer la gueule de tous ses détracteurs. Fermer la gueule de tous ceux qui avaient mis la cote à 20 contre 1 avant le match. J’ai vu un stade plein. Un stade malheureusement à un tiers plein de footix supportant le PSG avec un maillot Neymar Jr à 150 balles sur le dos dans le stade de leur ville. Sortez-moi ça de là. Allez jouer à FIFA. Le PSG, je veux bien supporter en Coupe d’Europe, c’est une belle équipe, mais franchement, quand ils viennent au Gaston Gérard (seul stade de France qui porte le nom d’un collabo notoire quand même, c’est ça aussi, le sport à Dijon), tu rêves de les voir se faire dérouiller normalement. Ces gars sont du genre à appeler n’importe qui Papa dès qu’ils croisent un mec plus cool que leur propre père. Ça supportait l’OM dans les 90’s, Lyon dans les 2000’s… St-Etienne dans les 70’s ? Le genre de gars à voter Macron. Bref.
– J’ai vu un stade qui avait de la gueule à la télé.
– J’ai vu Dijon sortir le ballon à la Barcelonaise, avec le flegme d’un Anglais sur un champs de bataille. J’ai vu une défense digne de Stalingrad.
– J’ai vu Olivier Dall’Oglio, toujours aussi bien mis en costard, offrir des cadeaux à Unai Emery alors que celui-ci n’avait même pas eu la politesse de ramener une petite tarte. Ça se fait quand on est invité Unai…
– J’ai vu le petit Rosier, c’était Cafu le type.
– J’ai vu Djilobodji humilier Neymar.
– J’ai vu Jordan Marié marcher sur la gueule de Neymar au milieu de terrain.
– J’ai vu le même Neymar craquer et attaquer lâchement Cédric Varrault par derrière.
– J’ai vu (Rae)Kwon foutre le chantier.
– J’ai vu Papy Varrault tellement guerrier que j’ai cru qu’il allait ramener le scalp de Di Maria.
– J’ai vu Baptiste Reynet faire déprimer Di Maria. J’ai vu Baptiste Reynet calmer Neymar. J’ai vu Baptiste Reynet faire entrer Mbappé en phase de dépression intense. Au début, j’ai cru qu’il y avait un mur, bin non, en fait c’était le Babat’.
– J’ai vu les Lingons prouver encore une fois qu’ils étaient un vrai groupe de supporters. Face aux instances de club itou.
– J’ai vu ce bon vieux Flo Balmont rentrer en jeu alors qu’il venait de faire la sécurité devant le stade avec son escadron de CRS.
– J’ai même pas vu Dani Alves tellement il a été dégueu. D’ailleurs c’est qui Dani Alves ? Le mec peroxydé comme un coureur Festina qui s’est fait manger par Amalfitano ? Ah oui, je vois. J’ai vu Dieu (et la barre transversale) être Bourguignon.
– J’ai vu mon voisin de droite s’enfiler un énorme Burger en 45 secondes chrono.
– J’ai entendu Daniel Bravo débiter des kilomètres de débilités à la télé. (« Si les Parisiens déjouent, c’est peut être aussi parce qu’ils ne sont pas habitués à jouer ça cette heure là »).
– J’ai vu Meunier nous calmer.
– J’ai vu Benjamin Jeannot foutre le but de l’année bordel ! Que même ce patator de Franck Sauzée n’en revenait pas.
– J’ai vu Alphonse Aréola verser une petite larme de sang.
– J’ai vu Meunier marquer un 2e but, le même, et j’en n’ai même pas voulu à Oussama Haddadi, qui n’a juste pas de chance sur ce coup.
– J’ai vu Meunier nous la mettre bien profonde. Oui, « nous », parce qu’à ce moment là du match, tout le monde est le DFCO.
– J’ai vu Meunier nous la mettre profonde et je n’ai même pas été surpris. Ça devait se passer comme ça. Dijon est magnifique mais Dijon est le loser.
– J’ai vu Meunier nous la mettre profonde et j’en ai plus rien eu à foutre de la victoire.
– Je me suis dit : « Putain mais la DFCO, c’est classe, c’est du foot nom de dieu. Et au Gaston Gérard, le PSG s’est chié dessus ». Dijon, c’est Poulidor, C’est Johann Cruyff, c’est Al Gore, c’est Michel Rocard, c’est Pioline, c’est Rocky (dans Rocky 1, pas après), C’est les beautiful losers de Leonard Cohen.
Dijon, c’est beau, et ça va finir par se savoir.
- Chablis Winston