C’est de la tête et des mains expertes de Marie-José Barthélémy que la Nouvelle Vapeur a été conçue. Bâtiment remodelé, fonctionnalité repensée, bois brûlé et acoustique : retrouve le vrai making-off de cette bâtisse à zik flambant neuve. Interview très Brico-dépôt. 

Quand on vous a présenté un projet de salle de concert, qu’est-ce que ça a inspiré chez vous ?

On a déjà travaillé sur ce genre de lieu. Chaque lieu est différent et a son histoire propre. Il n’y a pas de bâtiments et de cultures hors-sol. On ne fait rien hors-sol, c’est très important de comprendre ce qu’il y avait avant, de savoir comment le site a été travaillé. Jamais rien n’est vierge. On travaille pas sans regarder le soleil, l’environnement, le sol, le contexte, le voisinage… Ici on a essayé de faire un bâtiment qui tisse des liens d’amitiés avec le voisinage.

Architecturalement parlant, comment-est ce que ça se traduit ? On a parlé de ces espaces ouverts, de l’esplanade qui est assez accueillante…

On a constaté, en arrivant, que le bâtiment ressemblait à un magasin de la Halle aux Chaussures, avec une grille et un talus qui cachaient l’entrée. L’évidence a été de tout raser, ouvrir et faire une place qui rentre jusqu’à l’intérieur du bâtiment. Après le bâtiment a été conçu en 4 zones, le hall avec le bar double face qui pourrait être toujours ouvert, la partie atelier-travail-cuisine, la grande salle, et enfin les bureaux et les studios qui vont fonctionner en dehors du temps d’exploitation du bâtiment. Ce qui est important pour ce type de bâtiment est d’éviter ce qu’il y a dans d’autres espaces de concert de ce type, à savoir que ces salles ne sont dédiées qu’à écouter de la musique au moment des concerts le soir. Quand c’est fini, c’est fini. La journée, le bâtiment est mort. On milite pour que les bâtiments ne soient pas conçus pour rien et conservent une utilité à chaque moment de la journée. Ici, il y a deux quart du bâtiment qui pourront être utilisés à plein temps. La demande de la ville était de faire un bâtiment qui soit autre chose qu’une salle de concert et fonctionnel le reste de la journée. 

Tout à l’heure, on disait avec le directeur Yann Rivoal qu’elle ressemblait à un village cette nouvelle Vapeur…

C’est exactement ça. En arrivant, vous pouvez reconnaître le petit campanile et les bâtiments qui s’articulent autour, et sur lequel on a gardé l’enseigne La Vapeur. On s’imaginait quand on travaillait, que cette partie soit ouverte le dimanche pour boire un coup. C’est des choses qu’on a observées dans tous nos voyages avec cette idée de mutualiser les grandes salles communes. Ce sont des bâtiments qui ont 2 fonctions en un même espace. Le manque d’argent fait aussi qu’on doit davantage réfléchir.

Parlons technique, pour la grande salle et le club, l’acoustique a été un impératif important dans votre travail…

Une salle de musique est avant tout un écrin dans lequel on peut donner et faire entendre de la musique. Ici, il fallait transformer le son parce qu’il était d’une autre qualité, il fallait inverser la donne de façon à avoir un son ni trop mat, ni trop rugueux. On est assez content de l’acoustique en travaillant avec des matériaux spécifiques qui l’ont permis, et qui servent en même temps l’esthétique. On est contents sur cette tentative de sol en asphalte car, par exemple, quand vous marchez dans le couloir du métro, ça résonne mou, et non dur. L’asphalte absorbe les bruits et dans la salle, ça fonctionne vraiment super bien.

« Un petit gribouillis d’architecte n’est rien sans les gens qui construisent. »

Et le bois brulé ? Expliquez nous ce que c’est.

En fait, dans notre agence, on a pour habitude de ne jamais peindre des matériaux pour donner une couleur à un bâtiment. Ce qu’on essaye de faire c’est que la couleur, l’ambiance, l’odeur soient données par le matériau. Dans ma jeunesse, j’ai appris beaucoup de choses sur le bois. Des pêcheurs japonais utilisent cette technique du bois brûlé pour que leur maison subissent moins les attaques de l’eau salée. Ce bois brûlé ne subit plus les variations du temps, ni l’humidité, ni les insectes. L’objectif était d’offrir un bâtiment qui allait nécessiter moins d’entretien mais également que la couleur et l’ambiance soient données par les matériaux, avec l’odeur.  

L’odeur va se maintenir pendant des années et des années…

Ouais, dès qu’il pleut, l’odeur revient fortement. J’ai pu constater ça dans des bâtiments construits de longue date. La journée et quand il ne pleut pas, l’odeur disparait.

Vous êtes heureuse de cette salle ?

Oui, on est contents du résultat. Sans tous les compagnons, la ville de Dijon, les financements, l’équipe, on n’aurait pas fait grand chose. Un petit gribouillis d’architecte n’est rien sans les gens qui construisent. 

 

  • Interview réalisée par Martin Caye et Thierry Binoche

Photos : Edouard Roussel.