Rencontre avec Marouane Sista, humoriste franc-comtois qui fait actuellement le buzz avec ses vidéos visionnées des millions de fois (plus de 20 millions de fois en cumulé). Marouane fait des caméras cachées sur des sujets du quotidien comme le port du masque, le respect des gestes barrières, ou encore dernièrement sur la maltraitance des animaux… pour sensibiliser la populat’, nous explique t-il. Petit protégé d’Ahmed Sylla, on a voulu en apprendre un peu plus sur le type et sur la situation du stand-up en France.
Comment t’es venue l’idée de devenir humoriste ?
Quand j’étais jeune je regardais des stand-up et déjà en primaire ma prof me disait : « il faut que tu fasses du théâtre ». Du coup j’ai commencé à en faire à l’école. J’ai vu que ça me plaisait mais ce n’était pas vraiment mon truc. Ensuite on m’a parlé des scènes ouvertes sur Paris. Du coup je faisais des allers-retours un peu là-bas et je me suis penché sur le stand-up. Et c’est là que je me suis dit : « ah ouais, c’est ça que je veux faire en fait ».
Ça fait maintenant 3 ans et demi que je fais du stand-up et 7-8 ans pour le théâtre on va dire. Aujourd’hui, c’est mon métier dans le sens où je suis en contrat avec le Barbès Comedy Club quand c’est ouvert (rires). Mais sinon je suis en passe de devenir intermittent du spectacle.
On a pu t’apercevoir dans la série Access sur C8, tu envisages une carrière par la suite ?
C’est grâce à Ahmed Sylla. J’avais déjà eu la chance de faire ses premières parties dans ma carrière et après il a eu la gentillesse de m’appeler et me faire venir sur sa série Access. Ma finalité après ça sera vraiment le cinéma, mais je veux d’abord me perfectionner dans le stand-up parce que c’est un art que j’aime beaucoup. C’est une thérapie et ça me tient à cœur car j’ai un message à faire passer. Maintenant quand j’aurais fait ce travail-là, j’espère vraiment une finalité dans le cinéma.
Faire des films ou incarner des rôles, c’est vraiment quelque chose qui m’intéresse. C’est ce que j’essaie de faire aussi à travers les vidéos. D’ailleurs quand je fais des pranks (des caméras cachées, ndlr), j’essaie d’incarner des personnages différents, tenter de jouer des rôles, avoir de la réplique quoi.
Comment ça se passe pour toi avec la situation actuelle et les salles, cafés, théâtres fermés… ?
Moi j’existe pas aux yeux de l’État pour l’instant. Dans le sens où je ne suis pas intermittent du spectacle. Même si c’est ce que je veux faire et ce que je veux devenir. Mais donc j’ai pas d’aide, j’ai rien. Si je bouge pas, personne ne pourra rien faire pour moi. J’ai pas le droit à l’aide des intermittents car je l’ai encore jamais été, et je suis seulement en train de faire mon dossier d’intermittence, donc j’ai pas encore atteint le statut. Ce qui fait que je coule tout doucement, dans le sens où je ne joue pas et donc je ne suis pas payé.
La scène, c’est vraiment compliquée en ce moment. Et pas que pour moi. En France on dit : « oui, on a débloqué ci pour les stands-upeur », très bien, c’est super. Mais ça c’est pour les confirmés. Maintenant pour les non-confirmés ? Et il y en a énormément en France. Il y en a, ils sont à deux cachets d’être intermittent du spectacle, et ils le seront jamais avec ces évolutions, confinements, couvre feu… C’est hyper compliqué.
C’est pour ça en gros que tu as voulu te « réinventer » et utiliser les réseaux-sociaux ?
C’est même pas me réinventer, c’est juste exister artistiquement parlant. Au niveau de la scène, j’avais pas besoin d’être forcément sur les réseaux, dans le sens où j’étais actif. Mais je suis quand même un artiste donc il faut que j’existe. C’est pour ça qu’avec mon acolyte Kader Bueno on a commencé à faire des p’tits pranks sur Internet. Ils ont marché et ils sont vite devenus viraux.
Ce qu’on faisait pour les premiers pranks, c’est qu’on baissait un peu le masque pour pas avoir de soucis d’enregistrement. On a beaucoup eu un commentaire qui revenait souvent : « remettez le masque ». Du coup on s’est dit que ça pouvait être marrant de faire une vidéo sur le masque et les gestes barrières, et c’est pourquoi on a fait cette vidéo. L’engouement du truc a fait que maintenant on va faire un Masque Tour. On nous demandait de venir dans différentes villes et voilà pourquoi on va aller faire des vidéos dans différents centres commerciaux. C’est une période compliquée, et si on peut rigoler et essayer d’être actif quand même c’est magnifique.
Tu tournes beaucoup de tes vidéos sur Paris, qu’est-ce qui te manque le plus de la capitale, en Franche-Comté ?
La culture et l’activité en elle-même. La culture n’est pas assez présente à Montbéliard malheureusement. Dans le sens où par exemple, j’habite à la Petite Hollande et on a une salle de spectacle… Bon bah y’a pas de spectacle là-bas (rires). C’est carrément trop dommage. Et moi j’ai proposé plusieurs fois de faire des spectacles. J’ai la chance de connaître Ahmed Sylla, Kader Bueno, Shirley Souagnon, Inès Reg… j’aurais largement de quoi faire un spectacle, sur un plateau comme à la parisienne. Et ça c’est mon rêve en réalité, mais ça ne se concrétise pas.
Ça me tient à cœur et c’est très important pour moi de faire quelque chose pour ma ville. J’ai connu des moments difficiles et ma ville a su me soutenir quand il fallait, et j’ai besoin d’avoir cette reconnaissance envers elle. En essayant de faire que le côté culture ne se passe pas qu’à Paris. Parce que c’est une phrase qui revient souvent : « ah t’es bon, il faut monter à Paris ». Quand j’ai commencé, c’est ça qu’on me disait. Mais le problème c’est qu’on devrait pouvoir dire : « t’es bon viens sur Montbéliard, on va faire quelque chose avec ta carrière par exemple ». Quand j’ai commencé sur Paris, j’avais pas d’argent, je prenais des amendes et c’était galère. Maintenant c’est dommage parce qu’il y en a des talents en province, à Montbéliard il y en a plein et on met pas la lumière sur eux. Il faut qu’ils bougent, qu’ils se fassent une image et qu’ils reviennent dans la ville en conquérant pour qu’on puisse donner la parole, et je trouve ça dommage.
- Julian Marras // Photo : Christine Coquilleau
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