En ces temps covidés de tous sens, la culture, on le sait, a un genou à terre. Bien que les lieux d’expositions recevant du public ne soient plus vraiment accessibles, les activistes de Vortex nous proposent une exposition de l’artiste Mona Rocher. Une bouffée d’air frais dans une atmosphère suffocante.

Alors pour ceux qui ne le savent pas, les ateliers Vortex, c’est une association qui organise des résidences d’artistes et des expositions dans une ancienne fabrique du côté de la stéarinerie (là où on fabriquait des la glycérine et principalement des bougies) à Dijon. Installés là-bas depuis 2012, l’endroit est vaste et dispose d’un étage, plateau atypique d’exposition.

C’est là que Mona Rocher, l’artiste dijonnaise diplômée de l’ENSA, nous présente son univers coloré, sensiblement désuet. On est d’emblée séduits par l’appropriation de l’espace et de la couleur : c’est aérien et léger. On y retrouve des sensations liées à l’enfance, par le jeu notamment. Notre oeil est vite attiré par des oeuvres posées au sol, comme un jeu de plateau que l’on aurait laissé en pleine partie, un genre de Risk sans information complémentaire. Un peu plus loin, on retrouve un plateau digne d’un solitaire, vestige d’un travail d’étude autour du jeu de plateau. Mona, nous explique que le jeu a une importance particulière dans son travail. Cependant, elle se détache des codes et des règles rattachées à leurs utilisations. Le spectateur n’a pas d’autre choix que de s’approprier le jeu pour créer ses propres règles. Pratique si tu n’aimes pas perdre.

La poterie possède également une place importante dans le monde de l’artiste qui nous explique qu’elle a eu littéralement un coup de foudre pour cette pratique qu’elle a découverte lors d’un stage. Pour Mona, cette pratique est introspective, elle fait appel à la patience et transporte le sujet dans une réflexion et une approche méditative que l’on ressent dans la salle d’exposition. Accompagné de l’artiste, on passe d’une oeuvre à l’autre, permettant de tisser un fil conducteur entre les différentes pratiques artistiques. Je l’interroge sur la présence animalière dans son travail. Pour Mona, l’animal est un sujet d’étude simple et docile, « il y a une certaine douceur et une harmonie dans les formes animales. » Cependant, l’artiste n’a pas de velléité à reproduire les animaux de façon naturaliste. À la place, elle utilise des formes qui s’évadent pour ne laisser qu’une interprétation du sujet.

On finit par s’arrêter sur l’oeuvre la plus imposante, une enfilade de cartes de couleurs posées contre un mur. On pense à des cartes à jouer géantes et interchangeables, qui définissent un code inconnu par le visiteur. Mona nous confie que son travail est parti de la découverte de vieilles cartes de visite de son grand-père qui se sont vite transformées en carte test de couleurs, avant de finir à cette grande échelle. Une fois de plus, on retrouve dans son travail les marqueurs du temps et de l’affect dans le travail de Mona. Cependant on ne peut que saluer la façon d’ingérer l’information de base pour en proposer une interprétation différente, souvent plus poétique afin de rendre le monde qui nous entoure un peu plus beau. Et avec ce qui nous arrive en ce moment, on ne peut qu’accueillir cela à bras ouverts.

  • Franck Le Tank // Photos : Chablis Winston

L’exposition de Mona ROCHER est visible aux ateliers Vortex du 19 mars jusqu’au 24 avril 2021. Etant donné la situation sanitaire, l’exposition est uniquement accessiblesur RDV du mercredi au samedi de 14h à 18h.