Natan Jannaud, directeur de CirQ’ônflex, association dédiée au développement, à la structuration et la promotion du cirque contemporain en BFC, nous fait part de la situation de cet art en pleine expansion et stoppé net depuis la crise sanitaire.

En partenariat avec Radio Dijon Campus

Comment va la santé financière de l’association ? CirQ’ônflex est encore solide sur ses appuis ?

Sur cette dimension-là, ça va. Avec les différentes aides de l’État et d’autres collectivités, on arrive à s’en sortir. Finalement on s’aperçoit que nos plus grands soucis ne sont pas forcément économiques, ils sont plus profonds : on se demande toujours pourquoi on est là.

CirQ’ônflex, c’est le festival Prise de cirque qu’on connaît très bien à Dijon et qui s’implante dans le quartier de la Fontaine d’Ouche. Est-ce que vous serez encore beaucoup dans ce quartier jusqu’au mois de décembre ? Puisque le festival a forcément évolué au gré de la pandémie.

On a mis tous les composants du festival de juillet à décembre. Ce n’est plus vraiment un festival mais on tenait à garder cette appellation quand-même. On sera dans le quartier Fontaine d’Ouche mais aussi à l’échelle de la métropole dijonnaise : à Quetigny, à Talant, au théâtre Mansart et au jardin de l’Arquebuse… On va essayer d’être un peu partout sur différents territoires et à différents moments. C’est un nouveau défi pour nous aussi car on a l’habitude de communiquer sur un mois donné, là ça sera sur sept mois de l’année.

Je parlais de la Fontaine d’Ouche parce qu’il y a quand même un temps fort : le festival Jours de fête où vous faites souvent des ateliers. C’est sûrement l’une des actualités les plus proches de vous. Vous êtes encore investis sur ce festival, vous nous proposez quoi dans les semaines à venir ? 

On prévoit, ou on prévoyait -je ne sais pas comment il faut parler en ce moment (rire)– un spectacle familial le mercredi de la dernière semaine de mai : Hands some Feet un duo de jongleur et une fil-de-ferriste (une discipline d’équilibre, ndlr). Et juste après, habituellement, on propose plusieurs spectacles très grand public. Avec un manège animé, des spectacles et des animations artistiques qui devraient se déplacer dans le collège Rameau théoriquement. Il faut une jauge fermée, on ne sait pas encore exactement comment ça va se passer, c’est à l’étude actuellement avec les services de la ville. Tout est prêt de notre côté. On se dit que si on ne peut pas le faire fin mai, on essaiera de reporter dans le quartier à d’autres moments, éventuellement avec la Maison Phare. Dans tous les cas on le fera, la seule question c’est : quand ?

© Alexis Doré

Le festival et l’asso sont inscrits sur Dijon, vous travaillez avec les acteurs du territoire, et notamment Le Dancing, le centre national de danse à Dijon. C’est peu banal de réunir du cirque et de la danse on ne peut plus institutionnelle.

C’est ce qu’on pourrait croire. Effectivement, on n’a pas du tout les mêmes histoires entre le cirque et la danse contemporaine. Mais finalement ça paraît assez naturel, parce que l’outil central du circassien est son corps. C’est très chorégraphique. Simplement on rajoute des agrès et un aspect plus performatif qu’il peut y avoir dans la danse contemporaine. Il y a des artistes qui rejoignent autant la danse contemporaine que le cirque. D’ailleurs, l’artiste qu’on voulait programmer, qu’on prévoit pour décembre, Alexander Vantournhout, est à la fois acrobate-contorsionniste et puis danseur. Il a un double cursus, une double formation et il joue dans les 2 réseaux.

Comment prévoyez-vous le rattrapage ? C’est des mois où vous avez travaillé, où vous savez que des artistes des compagnies sont en résidence ici et là et ont vite du travail à proposer ? Comment entrevoyez-vous la suite après le mois de décembre ?

Là j’avoue que c’est un peu compliqué, car comme on est en cours de festival à faire au jour le jour, j’ai du mal à me projeter dans le festival 2022. À force de s’être fait recaler tous ces derniers mois, on a du mal à se projeter. J’ai forcément des idées en tête mais on verra ce qu’on pourra faire pour avril 2022. Même si la situation était réglée, ce sera certainement une édition qui sera chamboulée et différente.

Est-ce que tu sais comment va globalement le milieu du cirque contemporain en France en 2021 ? Est-ce que cette crise a été une hécatombe pour les compagnies et pour les structures qui diffusent ? Ou est-ce que, grâce aux subventions publiques, on arrive à maintenir les choses à flot ?

D’une manière générale et hors contexte sanitaire, le cirque contemporain va plutôt bien : il est très dynamique, il y a énormément de productions. C’est un art qui est encore assez jeune, à peine 40 ans, et qui est en plein développement. Même si institutionnellement, on est encore très peu reconnus, c’est aujourd’hui encore un combat. Les structures et les compagnies les plus reconnues par les institutions, que ce soit l’État ou autres, s’en sortent pas trop mal grâce aux financements supplémentaires, aux aides… Les équipes administratives savent les chercher. Le plus problématique, c’est pour les petites équipes artistiques qui débutent et qui n’ont pas forcément un administrateur avec eux et qui ne sont pas identifiées par les institutions. Ce sont ces compagnies-là qui sont le plus en difficulté. Donc on essaie d’en rattraper certaines, on verra après coup quels seront les dégâts.

  • Propos recueillis par Martin Caye et Martial Ratel et retranscrits par Emma Lahalle // Photos : CirQ’ônflex et Alexis Doré