On a bu un coup avec Gystère et son Funk cosmique aux saveurs prog’ enfumées à l’occasion de sa venue à VYV festival, à Dijon. Les chevaliers du Zodiaque, X-Or, les dents de la mer, la Keytar, Stevie Wonder… On a parlé de tout pour se faire une idée de l’univers zinzin de ce musicien qui est aussi réalisateur de clips, animateur radio, et amoureux d’une certaine idée de la musique artisanale.
Toi, t’as beaucoup joué pour d’autres gens et avec d’autres gens avant ce projet perso ?
Gystère: Alors un petit peu, j’ai été compositeur pour des gens. J’ai fait un peu de concerts vite fait en clavier ou batterie pour des potes.
T’as joué pour Ceronne aussi ? Il est comment ?
Oui mais c’était une petite tournée avec 4 dates. C’est cool. C’était mon batteur du coup (rires).
Le Gystère Live Gang, c’est ton propre projet. Tu as quand même mis 7 ans à monter ça. Comment ça se fait que la gestation a été aussi longue pour monter ton truc à toi ?
Je sais pas. On fait de la zik et on a envie de changer des trucs puis des trucs puis il y a des lives et des nouvelles idées. On enregistre au début, y’a des chansons et comme c’est un peu produit, je vais tout remettre ensemble. Il y a aussi des thèmes qui reviennent etc… Ça prends longtemps. On voit pas le temps passer parce qu’on fait tous d’autres trucs à coté aussi.
À la base c’était pas un truc pour faire du live ? C’était pas un truc pour monter sur scène et faire des tournées ? C’était un truc plutôt depuis ta chambre.?
Je sortais d’un autre projet avec Drixxé de Triptik, ça s’appellait Mc Luvin. Et moi je faisais toujours mes maquettes. Je faisais toujours mes démos de crooner. Et je postais plein de démos sur le net. Un jour il y a le label sodasound qui m’a checké. Et j’avais un vieux trucs sur soundcloud où j’avais mis les 50 morceaux que j’avais fait pendant l’été, ça leur a plu et ça s’est enchaîné comme ça.
En fait, l’idée te vient du label sodasound qui te dit « Viens, on fait un album » ?
C’était un peu ça. Après personnellement je faisais toujours mes chansons dans ce but là. J’ai toujours eu un peu envie de faire un projet qui soit entre X-OR et les chevaliers du zodiac.
Oui, c’est très B.O. d’animés des années 80 au final ce côté clavier et cosmique.
Ah ben bien sûr. C’est ce dont je me suis nourri on va dire. 70-80. J’essaye de créer le truc que j’ai pas dans ma bibliothèque , le truc dont je serais jaloux. Je veux un truc trop cool où je me dis « ouais ce serait les chevaliers du zodiac avec des pyramides » et c’est parti. On a mis longtemps à monter le concept.
Mais toujours très analogique, très organique. Tu n’avais pas envie de prendre des ordinateurs, des machines, des trucs qui aurait pu être plus facile ?
Non parce que je suis attaché à l’artisanat. Du coup on paye de nos personnes avec nos gros instruments…On a des gros machins. Même dans les vidéos. Tous les clips je les réalise. Ce qu’on sent de 70/80, c’est qu’après à partir des années 90, il y a beaucoup de synthèses. Que ce soit dans la musique avec les logiciels et tout, dans l’enregistrement. Jusqu’à la fin des 80’s, les gens bricolaient. Ça veut dire que maintenant dans un film quand on veux mettre des dinosaures, il n’y a pas besoin de les filmer. On les met en images de synthèse. Y a un côté un peu froid , direct, à plat.
Toi, tu voulais mettre les mains dans le cambouis ?
Exactement. Tu vois le clip de Thriller ? Michael Jackson ? ils ont galéré pendant 9 h à le maquiller en chat. Les dents de la mer, le requin c’est une machine. C’est de l’artisanat. On est vraiment accroché à cet artisanat au maximum. Et ça se ressent. Et donc sur scène c’est pareil avec les tenues, les instruments…C’est pareil avec la musique.
C’est un peu un bordel artisanal mais c’est quand même super chiadé. T’avais envie de cette espèce de dichotomie ? Un univers tout foutraque mais une musique super lêchée.
C’est parce que je suis vraiment accroché à ces trucs comme des musiques de film ou du Yes, du Genesis, du Stevie Wonder. Vraiment a des trucs qui racontent des choses. Je suis pas accroché aux albums où les dix chansons sont différentes. Je préfère qu’il y ait un son de kick, un son de basse tout le temps, même si ça raconte des choses différentes.
un concept album quoi…
Ouais voilà. Même l’homogénéité. Quand j’avais 11/12 ans on jouait beaucoup à Sonic, le jeu sur console. Et Sonic quand il va dans des marbles zones, dans l’espace, dans la lave, il y a toujours le même graphisme, les mêmes télévisions, les mêmes chaussures, les mêmes thèmes musicaux…. C’est cool.
Tu peux aller partout. Et c’est pas parce que tu vas dans le désert que tu vas avoir un son sec et que tu vas dans la glace que tu vas avoir un son froid. C’est juste que tu interprètes un peu, comme dans Street Fighter, tu interprètes ton idée du désert, et puis ton idée de l’espace et de l’eau. Mais il y a toujours les mêmes trucs. Nous on utilise toujours les 10 mêmes objets. Parce que ça a toujours ce coté artisanal.
Alors par contre, il est beaucoup plus revendiqué dans les vidéos cette espèce de coté kitsch, à la Nollywood (le Hollywood Nigérian, très très kitsch, ndlr).
Ouais
Parce que ça te fait marrer ?
Ben oui et encore c’est hyper artisanal. À un moment on a commencé à faire des maquettes beaucoup trop réalistes du coup ça se voyait pas que c’était des maquettes, c’est un peu relou. On a réalisé le clip de Vaudou game avec mon petit frère récemment. Le dernier clip là où il est en vaisseau il va dans une planète. Je sais pas si tu l’as vu celui-là mais en gros il y a un vaisseau, un thunderbird, un dinky toy, on a mis des photocopies dessus pour faire une vue et un vaisseau personnalisé. Et là, au lieu de mettre des petits arbres bien faits, on a utilisé des majorettes pour les arbres on a pris des pommes de pin et des brocolis. Il y a quand même un côté maquette qui est stylé. L’image est cool mais c’est pas trop vrai. Du coup on ne croit pas qu’on a filmé. C’est mieux si ça ressemble à des maquettes avec ce côté artisanal. On voit que le requin des dents de la mer c’est un robot mais… Moi, j’étais dans X-or. X-or c’est mon gars. Le shérif de l’espace. C’était mon héros X-or. Un truc artisanal revendiqué comme ça.
En musique, c’est toi qui composes tout ?
C’est moi qui compose tout, après on fait pas mal de repets avec le gang. Après on fait un peu d’images ensemble avec mon petit frère. C’est quand même la famille.
C’est un sport d’équipe mais c’est toi qui drive…
Après on a des petits coups de bols où on se fait repérer par des gens. C’est cool. En vrai, je trouve ça assez marrant. Ça montait bien et après il y a eu 2020. On s’est fait repérer aux Transmusicales, on devait jouer au Brésil…et puis plus rien…. On s’est vraiment fait carotte par 2020. Mais là ça repart, c’est cool.
Et du coup on parle de cette keytar que tu portes sur scène ?
Bien sûr.
Jusqu’à ce que je te vois tout à l’heure, je t’aurais dit c’est le summum du ringard...
Bien sûr. T’es plus libre parce que tu peux bouger avec. Avec ton clavier, c’est plus compliqué de bouger. Et il y a le côté guitare. Honnêtement en France je ne connais pas de keytariste. Je me dis : wesh ! il y a un créneau énorme à prendre. L’accordéon du futur quoi. Personne n’en fait.
Gystère, c’est le mec à la keytar.
Exactement. C’est singulier. Des guitaristes, t’en a vu, mais franchement des mecs au keytar, jamais. Depuis le début je kiffe ce truc-là.
Avec ta keytar et tes fringues sur scène, on dirait Rick James.
C’est ça. La scène c’est un film. C’est une expérience. Et là encore, il n’y avait pas les lights et tout parce qu’il était 15h.
Pour toi, la musique et la vidéo sont toujours très liées ?
Bien sûr. Je suis en train de réaliser un clip en ce moment, c’est un morceau bonus de l’album. Après c’est compliqué. C’est pour ça, c’est cool le fond vert. T’es pas obligé de demander à 8 personnes de venir chez toi de tel à tel heure. Tu peux faire 2 par 2, 4 par 4. Quand les gens sont dispos. Pareil pour la déco, t’es pas obligé d’attendre qu’il fasse beau, d’attendre qu’il pleuve, qu’il fasse froid. Ça c’est vraiment cool. Là y’a des clips qui sont prêts. Il y en a un qui est prêt depuis un an, qui devrait sortir là.
Propos recueillis par : Antoine Gautier // Photos : Anne-Sophie Cambeur