« Fiers d’être fondeurs ! Face au capitalisme dévastateur, les sourires des fondeurs résistent». C’est ainsi qu’est référencé le projet sur le site web de l’artiste français JR. Depuis New-York où il est installé JR a accompagné le projet « Inside Out » lancé par un groupe d’habitants de Saint-Claude (Jura) en soutien aux salariés de la fonderie MBF Aluminium en lutte depuis novembre 2020. Le projet se nomme ainsi à cause, de la gestion des repreneurs successifs – une enquête est ouverte pour abus de bien social – et les baisses de commandes des constructeurs Renault et Stellantis (PSA). La fonderie a cessé toute activité à la fin mars. Blocages, grève de la faim, ses salariés ont tout tenté pour éviter la liquidation, finalement décidée par le tribunal de commerce le 22 juin. Leur cri de rage a résonné sur toutes les ondes. 260 salariés restent sur le carreau. certains ex-MBF tentent de faire adhérer clients et instances publiques au projet d’une Scop.

1- Le collage des 63 portraits a débuté le samedi 16 octobre dès 10h du matin sur le mur de la médiathèque au cœur de la ville de Saint-Claude. Si les photos ont été prises au sein de l’usine à l’issue de plusieurs AG auprès d’ouvriers intéressés, les affiches ont été réalisées dans l’atelier de JR à New-York cet été selon un protocole précis puis ont traversé l’Atlantique jusqu’au Jura.  

2- Samedi jour de marché, tout au long de la journée les ex-salariés de MBF, comme la population Sanclaudienne passent voir l’œuvre en cours, donnent un coup de main, voire laissent de l’argent dans la caisse de soutien aux salariés qui commencent à toucher leur solde de tout compte. 

3- Brian colle le visage de Nail Yalcin, délégué CGT et figure de proue du mouvement des MBF en lutte.

4- Lise Truptil, prof de français à Saint-Claude a initié ce projet. Elle a été bouleversée par l’angoisse qu’exprimaient certains collégiens sur le sort de leurs parents. Alors elle est allée à la rencontre des salariés de MBF, a commencé à leur tirer le portrait qu’elle a exposé à la Fraternelle, la Maison du Peuple de Saint-Claude. On lui a suggéré le projet «  Inside Out », elle a postulé, et début juillet JR validait.

5- Tout au long de la journée des salariés passent voir la création en cours. Fabienne a été de quasi tous les déplacements pour défendre les emplois des MBF.

6- Samedi après-midi ensoleillé, au pied du mur Murat, Saverio et Yucel se détendent en suivant l’évolution du collage. Missel un ami DJ est venu avec ses vinyls pour un set de plusieurs heures.

7- Il est 18h, la lumière rasante éclaire la cathédrale Saint-Pierre-Saint-Paul-et-Saint-André. Sur le mur de la médiathèque les visages sont en large majorité ceux d’ouvriers Italiens, portugais, maghrébins, turcs, laotiens. Quelques français et même un breton. Saint-Claude a toujours été une terre d’immigration.

8- De manifestations en blocage de dépôt, de grève de la faim en garde à vue, de Dijon à Bercy en passant par Sochaux, Villeroy (Yonne), Saint-André-de-l’Eure (Eure), Nevers et Le Touquet, Nail et Nusrat, ont été de toutes les actions pour défendre les emplois à Saint-Claude. 

9- La commune a perdu 2000 habitants en 10 ans il ne reste plus que 9500 personnes. « Ce territoire est déjà en déprise économique, avec un chômage contenu mais plus élevé qu’ailleurs dans le Jura. Quand il y a cette fragilité, perdre 260 emplois est un choc », explique le préfet du Jura David Philot au journal Le Monde.

10- Saint-Claude est devenue la capitale de la pipe, une industrie qui a presque disparu mais est à l’origine de nombreuses PME toujours actives. Un tiers des actifs dépendent de l’industrie. Cependant, 10 % des emplois du secteur ont été détruits en une décennie. Or un emploi dans l’industrie, c’est trois emplois induits. La fermeture de MBF ébranle tous ses sous-traitants. A divers endroits de la ville on trouve de grandes peintures murales de maitres pipiers, il y a maintenant les ex-MBF. 

©Raphaël Helle

Pour plus d’informations consulter le site : https://www.insideoutproject.net/fr/explore/group-action/fiers-detre-fondeurs

Textes et photos : Raphaël Helle