Sous la forme d’une installation-performance d’art numérique carrément inédite, « À l’origine fut la vitesse » : Le testament de Sov Strochnis de Philippe GORDIANI et Nicolas BOUDIER est une adaptation du roman de science-fiction : « La Horde du Contrevent » d’Alain DAMASIO. En vrai c’est une adaptation encore plus conceptuelle, avec du matos plus ouf qu’un casque de réalité augmentée. C’est à voir absolument à l’Espace des Arts de Chalon-sur-Saône, du 8 au 10 février. 

L’origine tout court

L’ouvrage d’Alain DAMASIO « La Horde du Contrevent » écrit en 2004 et ayant remporté le Grand Prix de l’Imaginaire en 2006, présente un monde dystopique dans une époque non définie dans lequel le vent souffle toujours dans le même sens. On nous dépeint la société de ce monde aride qui fait face à cette situation climatique, où l’on suit un groupe de 23 personnes surentraîné : La fameuse Horde du Contrevent, où chacun tient un rôle bien défini pour braver à pied les courants du vent jusqu’à l’Extrême-amont, la source ultime de ces vents. (Un genre de Mordor).

Parmi eux, se trouve Sov Strochnis, scribe et partiellement amnésique, il est le dernier survivant de la Horde. C’est à travers ses souvenirs et sa mémoire brouillée que nous revivons l’épopée de cette Horde du Contrevent grâce au dispositif scénique et musical immersif développé par le scénographe Nicolas BOUDIER et le metteur en scène et musicien Philippe GORDIANI.

Certaines éditions du livre de Damasio étaient vendues avec un CD qui faisait office de bande-son, mais Philippe et Nicolas ne l’ont jamais écouté pour justement ne pas s’en inspirer et composer une création originale. 

« Le roman raconte l’épopée des 23 personnages de la Horde mais il y a un focus sur Sov parce qu’il est scribe et qu’il incarne la parole de Damasio. Sov s’interroge tout du long, car le roman commence par la fin. On peut donc revivre l’expérience avec lui et se rendre compte de ce que lui a apporté cette traversée.» Expliquent Nicolas & Philippe.

Connexion à Sov Strochnis

Cette adaptation propose de revivre cette aventure mais où le vent n’existe plus, sous la forme d’un spectacle d’art numérique en immersion totale, à l’aide du dispositif appelé « le combo ». Développé par Philippe et Nicolas, ce combo est constitué d’un casque occultant et d’un écran de vidéo-projection, en plus d’un casque auditif à conduction osseuse. (Le casque repose sur l’os de la mâchoire, ce qui permet d’entendre la voix du comédien Thomas POULARD incarnant Sov Strochnis, résonner directement dans le crâne). Les mecs sont quasi dans le métaverse (Vous savez le nouveau jouet de Zuckerberg).

La musique et le son du vent sont les éléments principaux de ce spectacle et grâce au combo, les spectateurs sont immergés et amenés à développer leurs sens. 

Dans la pièce le vent et les sons sont liés par leurs déplacements dans l’air. Afin de retranscrire l’épopée ainsi que ces éléments de la plus belle des façons, l’immersion était alors indispensable pour projeter le public dans la pièce. L’ambiance sonore renforce cette proximité. 

Photo : Borabora Productions

Le casque à conduction osseuse permet, quant à lui, une double écoute intérieure/extérieure, c’est-à-dire qu’en plus de l’ambiance musicale, ce casque permet « d’amener la voix du narrateur au centre du son, comme une voix intérieure pour chaque spectateur ». En fait, ça permet d’ajouter un relief sonore, et ça a l’air archi-stylé. 

Pour récupérer le son du vent, l’équipe artistique et technique ont développé des outils spécifiques dans le but de prélever les DATA du vent. « Un système de capteur (anémomètres et girouettes connectés) qui permet d’enregistrer les courbes d’intensités et les mouvements réels des vents ».

« La mise en scène donne à se questionner sur la proximité avec le son, la lumière, etc. La fabrication du combo par imprimante 3D et laser a nécessité au moins 2 ans d’expérimentation (à part le casque audio à conduction osseuse) grâce à des résidences et des soutiens, dont l’Espace des Arts de Chalon. Ces résidences ont permis de développer, d’essayer, des questionner ces objets que ce soit sur les temps de recherches, de maquettages puis de productions. » Expliquent Nicolas & Philippe.

« Toute la mise en scène est inter-connectée, c’est-à-dire que les différentes variations du vent récoltées en montagne ont été réinjectées dans l’ambiance sonore et varient également en fonction de la lumière et de la vidéo. » Nous confient Nicolas & Philippe.

Cette installation de 44 places assises sur la scène donne l’occasion de vivre cette épopée de manière collective. Déjà à l’époque, Alain DAMASIO nous questionnait sur l’urgence climatique. Cette adaptation propose une sensibilisation autour de ces questionnements à notre époque.  « L’objectif est de questionner le monde de demain, du futur proche voire très proche par la pratique artistique. Les questions climatiques sont très importantes à tous les niveaux du projet. » Précise Nicolas.

Ce qu’il faut retenir : « À l’origine fut la vitesse » : le testament de Sov Strochnis c’est du 8 au 10 février 2022 à 20h à l’Espace des Arts de Châlon-sur-Saône, pour en avoir pleins les yeux et les mirettes.

Texte : Maia Mignotte // Photos : Nicolas Boudier, Borabora Productions