Les Vulves Assassines c’est le groupe qui vient te tabasser des punchlines de l’espace tel que « j’aime la bite mais pas la tienne » à 1 heure du mat’ au VYV Festival. Un gang de meufs (et leur ingé son), qu’on a rencontré quelques heures avant leur show, détendu à l’ombre des arbres, en matant passer un écureuil comme dans une chanson de Tryo, mais en mieux.
Je n’ai pas l’habitude du parler du nom des groupes mais là on est obligé. Je me suis demandé est-ce que les Vulves Assassines c’est la réponse de la bergère au berger Malcolm Mclaren qui a inventé les Sex Pistols ?
DJ Conant : Alors il faut arrêter de croire qu’on a de la culture ! Une fois on nous a dit « c’est un peu les fleurs du mal de Baudelaire remis au goût du jour au 21ème siècle ». Non, on a juste eu une période où on avait un gang…
MC Vieillard : …Et on s’est dit qu’on ferait un blason, qu’on allait le coudre sur les blousons et qu’on allait arrêter de se faire emmerder dans la rue. On s’appellerait les Vulves Assassines, ça a de la gueule. Finalement on n’a jamais fait le gang, on n’a jamais cousu les machins mais on a fait un groupe.
Vous aviez quand même des motos ou pas ?
Mc vieillard : Pas du tout, moi j’ai une bicyclette !
DJ Conant : Moi j’ai peur à vélo
MC Vieillard : T’as une moto toi ?
DJ Conant : Non
MC Vieillard : Mais tu m’avais dit que c’était un clin d’œil à Kill Bill et les Vipères Assassines…
C’est bien ça je vais créer des dissensions dans le groupe… Du coup les Vulves Assassines sont nées comment et pourquoi ? Donc le comment on a à peu près l’explication du gang de Bandidos non autorisé et le pourquoi alors ?
DJ Conant : On s’est dit que ce serait assez marrant de faire un groupe, et ce qui nous faisait encore plus marrer ce n’est qu’aucune de nous à l’époque ne savait faire de musique.
MC Vieillard : On a rencontré Sammy la guitariste en cours de route quand on s’est un peu plus appliquées.
DJ Conant : Au tout début on s’est vraiment dit que ça manquait de gonzesses sur scène et qu’en fait nous on n’avait certainement pas fait de musique parce qu’on n’avait pas vu de meufs qui faisait vraiment de la musique.
C’était avant le mouvement More Women On Stage ?
DJ Conant : Ohlala oui c’était il y a longtemps, 2013, mais ça a mis du temps avant qu’on rencontre Sammy (rires).
MC Vieillard : Il y a aussi ce truc où il y a plein de mecs qui font de la musique entre eux dans leur garage, ils se marrent c’est assez médiocre mais ils s’en foutent, ils vont quand même sur scène. Les nanas, elles attendent que ce soit excellent pour monter sur scène, et elles sont souvent excellentes en musique. Nous on n’a pas attendu ce stade-là, on est montées sur scène quand on avait un set de 13 minutes, et on l’a fait. C’était bien mais tu vois ça prend le temps que ça prend.
DJ Conant : Ça nous a pris 10 ans (rires)
C’est ce que j’ai lu, qu’il y avait une envie de s’amuser au début en évitant « l’excellence musicale » mais finalement ça a évolué un peu avec le temps, surtout quand tu joues dans un gros festival comme VYV…
DJ Conant : L’excellence musicale on ne l’aura jamais. MC Vieillard et DJ Conant je pense qu’on a fait une croix dessus, heureusement on a l’excellente Sammy à la guitare qui nous fait une caution musicale parfaite donc c’est vrai que les gens arrivent à voir l’intérêt du projet parce que nous on amène autre chose. Et Sammy, les gens reconnaissent que tu es une bête à la guitare.
La formule a évoluée depuis le début, vous étiez toutes les deux et toi t’es arrivé à la guitare...
MC Vieillard : On était pas toutes les deux, à la base on était 4 copines, on faisait les cons à 4 copines.
Donc les 2 autres sont enterrées où ?
MC Vieillard : Les 2 autres ont préféré continuer à bosser parce que faire de la musique quand t’as pas de thunes c’est pas si simple parce que ça te prend tout ton temps.
DJ Conant : Moi je suis passé par le RSA, là je suis chômeuse, vraiment on est très précaires et c’est un choix.
MC Vieillard : C’est un choix chiant et les copines sont retournées au boulot quand ça n’avançait pas et nous on a poursuivi…
C’est une aventure humaine.
MC vieillard : Mais c’est un sacrifice. Un sacrifice financier et pas festif, c’est la balance à choisir. Donc on était 4, après on était 2, et après dieu merci on était 3.
DJ Conant : Et pour le coup Samy on l’a recrutée.
Ce serait mentir de dire qu’il n’y a pas de militantisme dans votre musique derrière le côté festif, du féminisme bien sûr, mais pas que j’ai l’impression...
DJ Conant : Non pas du tout, il y a du féminisme évidemment c’est de là que c’est parti mais très rapidement on a senti qu’on avait aussi besoins de parler d’autres trucs principalement parce que MC Vieillard et moi DJ Conant on est issues d’une culture politique, on a été dans toutes les manifs depuis qu’on est gosses et aujourd’hui encore c’est hyper important pour nous d’être engagées. Là c’est une période où c’est de plus en plus difficile de garder un soupçon d’espoir donc ça nous semblait crucial de mettre un peu de joie dans le militantisme via la musique. La musique est devenue un vecteur pour pouvoir parler de la retraite ou des problématiques féministes. Là notre prochain album qui va sortir en octobre Das Capital est beaucoup plus politique que le premier. On a essayé de traverser des sujets comme…Les écolos de droite.
MC vieillard : Non mais on parle de vrais problèmes : le capitalisme dans toute sa splendeur et parce que aussi, je pense qu’on ne voulait pas être un groupe, sans être méprisantes, un groupe de meufs qui parle de problèmes de féminisme. On voulait aussi parler de nos aspirations communistes, encore une fois je mets DJ Conant et moi dedans. Mais clairement, le truc s’appelle Das Capital, marxisme à fond les ballons, ça parle de lutte des classes et compagnie, mais voilà c’est pas le temps des cerises c’est autre chose un peu plus au goût du jour.
Gaga, l’Ingé son : Il y a le féminisme inclusif aussi. Moi je trouve qu’on n’en parle pas assez du fait que le bonhomme ne soit pas écarté.
DJ Conant : On n’a pas forcément fait ça en se disant » il faut que les mecs viennent voir notre concert « . On avait envie que le message passe et je ne sais pas comment on s’y prend mais on a suffisamment d’autodérision pour que les mecs qui n’étaient pas du tout sensibilisés au mouvement féministe disent « ah ouais là j’ai compris un truc ». J’ai l’impression que ça marche un peu notre démarche.
MC vieillard : Être agressif sur un système con mais pas sur la personne, l’individu.
DJ Conant : Ou alors si on le fait c’est vraiment au millième degré et ça fait que le message passe la plupart du temps.
Et du coup le côté festif il ne réduit pas un peu l’impact du message ? Par exemple, que vous passiez ce soir à 1 plombe du mat’ et qu’il y a un truc de super frontal ?
MC Vieillard : Bien sûr que si on allait militer et faire des trucs intelligents à la place ce serait plus efficace mais en vrai on a la flemme, on préfère faire de la musique et s’amuser.
DJ Conant : Non, on est un peu sur le terrain en vrai mais c’est deux choses différentes. En fait c’est comme toutes sectes. (rires)
C’est plus un gang c’est une secte maintenant. (rires)
DJ Conant : C’est le fonctionnement de la propagande, le soir tu joues devant 1000 personnes et il y en a 30 le lendemain qui sont abonnés à ta page insta et c’est 30 personnes qui vont aussi bénéficier de tous les messages qu’on fait passer au quotidien à des heures plus raisonnables que l’heure de notre concert et l’idée c’est de progressivement redonner goût à la révolution et donner de l’espoir.
Du coup pour toi ce n’est pas antinomique de faire un truc festif avec un vrai message ?
DJ Conant : Ah non pas du tout au contraire, alors sinon on se plante complètement mais nous on vraiment dans l’idée de réussir à faire la fête tout en restant un peu la Mano (Negra NDLR).
MC Vieillard : Notre seule référence musicale.
Il y a pourtant un côté assez anglo-saxon dans l’approche de votre musique, ça me fait penser à Sleaford Mods qui délivre un message assez vénére, ce sont des refs qui vous parle ?
MC Vieillard : Nous deux on a zéro culture.
DJ Conant : C’est juste qu’on est en mode puissance tout le temps, c’est l’énergie. C’est plus rock. T’as pas une autre référence comme La Mano Negra ?
Vous êtes pas du genre La Mano Negra ?
Tous : Exactement (rires)
Propos recueillis par FLT // Photos : Thomas Lamy