Ça a fait doubler la population de l’agglo de Nevers en une journée.

C’est l’histoire de deux mecs passionnés qui ont lancé une idée « à la con », laquelle est devenue un projet dingue parce que tous les fans de bagnole de France et de Navarre ont surkiffé et (trop) largement financé. Son épilogue se déroule dans la Nièvre ! Il s’agit bien sûr des deux zozos de Vilebrequin, la chaîne Youtube qui cause bagnole sans se prendre au sérieux, devenue référence en la matière. Ce Merguez Tuning Show, c’est leur évènement.
La veille, le parking de l’hôtel regorge de véhicules qui trahissent la raison de leur présence. Les propriétaires échangent quelques regards complices, histoire de vérifier qu’ils sont bien tous là pour la même raison, et quelques mots pour cultiver l’enthousiasme et l’impatience.
Le lendemain matin, c’est la douche froide ! Toutes les voies d’accès convergent en un seul et unique point, aux abords de Magny-Cours, créant un goulot d’étranglement monstrueux. Par la sympathie d’un habitant local, nous arrivons à stationner avant d’atteindre la destination et finissons le trajet à pied, gagnant quelques précieuses heures. « On n’avait pas revu ça depuis les premiers Grand Prix de F1, il y a longtemps, quand les choses n’étaient pas très bien organisées », nous dit-il en rigolant, conscient qu’il ne pourrait pas sortir de chez lui ce dimanche. Plus de 50.000 personnes sont attendues. Il est presque 11h, et le soleil promet déjà de bons coups de chaud, quand nous passons les contrôles de sécurité du festival. De suite, une impression de gigantisme se dégage. Le circuit impose sa masse au centre, et tout autour s’aperçoivent des attroupements accompagnés de clameurs ou de bruits mécaniques.


Par ici des monster trucks, par là une course de tracteurs tondeuses, ou des carcasses de voitures. Le bus qui drifte ne drifte plus, mais il trône en bonne place, couché sur le flanc. Les visiteurs se marrent en montant à bord pour faire un selfie souvenir. Bien d’autres icônes de la marque Vilebrequin sont là. Le dos d’âne. Le mur en blocs béton aussi. Tout comme le confessionnal du père Chabrier ou la roue du forçage. La déambulation du festivalier sur le site est ponctuée de références aux épisodes cultes de la chaîne Youtube de Pierre et Sylvain. Le plus fun, pour les plus motivés : l’atelier « CPT ». Deux minutes chrono pour défoncer une carcasse à l’aide d’un outil choisi aléatoirement.
Défouloir garanti !
Pour ceux qui viennent admirer de la voiture, un showroom permet aux contributeurs de la cagnotte d’exhiber leur véhicule. Sportives, anciennes, japonaises, américaines, faux tuning second degré, ou youngtimers, il y en a pour tous les goûts.
Au milieu trône la partie circuit, abritant son attraction principale, celui pour qui tous sont venus aujourd’hui. La blague potache devenue projet sérieux et démesuré : le Multipla.

« On n’avait pas revu ça depuis les premiers Grand Prix de F1, il y a longtemps, quand les choses n’étaient pas très bien organisées »

« Il » est là, derrière une porte, inaccessible. Des sportives de luxe (Ferrari, Porsche, Lambo, Mustang) sont visibles et attirent fièrement le regard des spectateurs perchés sur les gradins. A leurs côtés, des consœurs plus racoleuses, en livrée de rally : Ford Escort ou Toyota Supra et Aygo. Toutes sont loin, intouchables, dans la ligne des stands. Puis, une par une, elles prennent d’assaut le ruban sinueux d’asphalte et font le show, entre rugissements et crissements. Quelques heureux élus, tirés au sort, auront droit à un baptême dans ces bolides tout au long de la journée. Il y a même un bus qui fait des tours de circuit avec à son bord qui veut, juste pour le fun. Mais quand « il » sort, l’attente qu’il suscitait et le bruit assourdissant dans lequel il s’élance relèguent tous ses congénères au rôle de simples faire-valoir. Les loulous n’ont d’yeux et d’oreilles que pour lui. Beaucoup d’admiration et un peu de déception, car les apparitions sont brèves et espacées, ce qui laisse le spectateur sur sa faim. Tout comme les stands de merchandising Vilebrequin, incapables d’absorber l’afflux des fans, dont un bon nombre repartira les mains vides.


Pour autant, ceux venus pour faire la fête plus que pour les voitures ne se seront pas ennuyés : pêche au canard géante, grand roue, tir à la carabine. L’automobile se mêlait à une plus classique fête foraine, entièrement gratuite, tout comme les concerts.
« Ouais, pour occuper les meufs… ». Eh bien non ! Si le cliché veut que la bagnole soit une passion de mâle, force est de constater que nos youtubers ont su s’attirer la sympathie de gens de tous les horizons. La foule se mêlait et s’exclamait dans tous les accents, arborait les oripeaux de toutes les classes sociales. Peu importait l’âge, le genre ou la région d’origine, l’essentiel était ailleurs. Se marrer et kiffer.
Les grincheux objecteront que la voiture est un symbole du passé, que la mécanique est un hobby de beauf et qu’il fallait être fou pour traverser la France dans le seul but de voir de loin quelques bolides en plein cagnard. Que les files d’attente paraissaient interminables, mais finalement, chez Disney tu fais largement autant la queue.
Les loulous leur répondront que l’espace d’un jour, ils étaient les beaufs les plus heureux du monde. Et ça, ça n’a pas de prix !

Texte et photos : Thomas Lamy