On a tapé la discute avec le jeune chanteur de soul Jalen N’Gonda à l’occasion de son passage à Dijon, à La Vapeur précisément, le 30 mars dernier. On revient sur son début de carrière ultra prometteur, ses influences, sa signature avec Daptones Records…

Tu as grandi entouré par la musique soul, notamment influencé par la collection de Motown de ton père. Tu as commencé à jouer très tôt, d’abord le violon, puis la guitare et le piano. Quand est-ce que tu t’es dis que tu voulais faire carrière dans la musique ?

J’avais 14 ans. Pour info, mon père n’a pas de collection de Motown, j’ai dis ça y’a longtemps dans une interview à la fac, et c’est resté depuis (rire). Mon père écoute plutôt Prince, Michael Jackson, il aime beaucoup Stevie Wonder. Il avait une collection de quelques CD de Marvin Gaye. Et la soul, tu sais la plupart des américains en écoutent, ça fait partie de l’histoire américaine, et particulièrement de l’histoire afro-américaine. Donc en tant qu’afro-américain en grandissant, la soul allait toujours faire partie de mon univers musical. Mais concernant mon propre parcours avec, comme apprendre la guitare et reprendre des Motown etc, ça a commencé quand j’avais 11 ans. J’ai été complètement obsédé par deux chansons des Temptations, The way you do the things you do, et My Girl, et c’est comme ça que j’ai découvert le son Motown mais surtout le son des 60s, via ça.

J’ai entendu que tu joues plutôt à l’oreille, et que tu ne lis pas la musique. Tu es autodidacte ? Comment tu as maîtrisé ces instruments ?

Oui j’ai appris seul quand j’étais jeune. J’avais des amis qui m’ont montré les quelques « trucs » qu’ils avaient dans leur manche… J’ai fait un mois de cours quand j’avais 17 ans, mais c’était pas tenable sur le plan financier… Du coup, ouais j’ai appris seul le piano et la guitare.

Tu as grandi aux US, avant de partir en Angleterre pour étudier au Liverpool Institute for Performing Arts. Pourquoi cette décision de traverser l’Atlantique ?

À vrai dire, c’était surtout que cette école était la seule à être vraiment intéressée par ma candidature. C’était pas vraiment que je voulais venir en Angleterre, c’était plus que cette école dans laquelle je voulais aller s’y trouvait quoi. J’ai toujours voulu aller à New-York ou L.A. et je me suis intéressé à une fac dans l’Indiana quand je finissais le lycée. Au final j’ai passé deux ans sans école, je suis allé dans une université communautaire et puis par hasard en regardant la télé j’ai découvert cette école à Liverpool. Et elle m’a vraiment plu. Et de leur côté, ils ont été super réceptif, et m’ont vraiment encouragé à candidater. C’était la première fois qu’une école, quelle qu’elle soit, s’intéressait vraiment à moi. Parce qu’aux Etats-Unis, tu es obligé d’avoir des bonnes notes, des bons résultats au test pour le supérieur. Du coup, ça semblait être la voie la plus simple pour commencer tu vois ? Et avec le soutiens de mon église et de ma famille, on a fait un passeport et acheté un aller simple pour Liverpool.

Du passage entre les Etats-Unis et le Royaume-Uni, ça a changé beaucoup de choses dans tes influences musicales ? Tu as découvert de nouvelles choses à Liverpool ?

Oui énormément. À D.C., c’est évidemment très riche, y’a la gogo music avec laquelle j’ai grandi, que j’écoutais. J’ai été dans quelques groupes à la fin de l’adolescence. Mais quand je suis arrivé à Liverpool, et je pense que c’est parce que j’étais entouré d’étudiant et tu sais à la fac t’es entouré de gens qui écoutent de tout. Et pour la première fois, j’étais pas jugé parce que j’écoutais du Motown ou Chess Records. Ou même des trucs comme les Doors, les Beatles – surtout à Liverpool (rire). Et tu vois, j’étais juste accepté par mes nouveaux amis sur place, et ça m’a donné de l’assurance en terme de musique. Donc beaucoup de choses ont changé, c’était juste un environnement différent, par rapport au Maryland et surtout aux banlieues de DC, où c’est très conforme.

Y’a une scène funk en Angleterre dont tu te sens faire partie ?

Une scène funk ? Non pas vraiment. Je fais pas vraiment de la funk, même si je pense que je peux être un peu funky dans quelques morceaux. Je pense que la funk fait partie de la musique soul, c’en est une forme tout comme la soul est une forme de RnB, et le RnB est une forme de rock, jazz et tout. Donc tout ça fait partie de la même grande famille, soul, funk, rythm&blues… C’est dans le même panier. Donc je dirais que je fais plus partie d’une communauté RnB mais surtout de la communauté musicale en général plutôt que d’un genre en particulier.

Marvin s’inspirait de Nat King Cole… Ou les Beatles de Chuck Berry, mais ils ont fait leurs propres parcours, et je veux juste faire mon « truc » aussi.

Ta musique est souvent comparée à celle de Marvin Gaye, et ta voix à celle de Curtis Mayfield, tu dirais que tu t’inscrits dans leur héritage musical ?
Ils sont leur propre héritage. Et comme beaucoup, ils font partis des musiciens les plus influents. Personnellement, j’écoute pas tellement de Curtis Mayfield. J’ai clairement écouté beaucoup de Marvin Gaye en grandissant, mais parmi beaucoup d’autres artistes comme les Beatles, Phil Spector, David Ruffin, The Temptations, Martha Reeves, Mary Wells… La liste est infinie, et Marvin est juste un parmi d’autres. Bon je pense que c’est quand même mon chanteur préféré et… Bon je vais pas développer trop, mais tu vois j’essaie de pas trop penser à tout ça. J’essaie de me concentrer sur ma vie, ma musique et… Oui Marvin etc, ils avaient leur propre style et j’ai pas l’impression de continuer leur travail. C’est plus que je fais mon propre parcours dans la musique et puis, Marvin s’inspirait de Nat King Cole… Ou les Beatles de Chuck Berry, mais ils ont fait leurs propres parcours, et je veux juste faire mon « truc » aussi.

Comment se passe ton processus d’écriture ? Tu travailles seul ? Avec des musiciens ?

Je travaille avec des musiciens. En fait j’écris tout le temps, c’est quelque chose que je fais toutes les semaines, et presque tous les jours même. Donc j’écris toujours de mon côté, mais je fais aussi des sessions d’écritures en groupe en même temps.

Et le processus, pour répondre à ta question, ça va dépendre de chaque morceau. Tu sais en toute honnêteté, la plupart des morceaux que je compose ne sortirons jamais. La plupart de ce que vous entendez, c’est les morceaux que j’ai écris avec d’autres gens. Et pour la manière dont on procède… Bah ça dépend vraiment, des fois quelqu’un arrive avec un rythme de batterie et on part de là, parfois c’est une ligne de basse, parfois moi avec une mélodie… Il n’y pas une manière de faire, ça vient très naturellement.

Tu viens de sortir un nouveau single, Illusions, en février, est-ce qu’on peut s’attendre à un petit EP ou autre ?

Mon boulot et mon but est de continuer à sortir des choses régulièrement. Je suis toujours entrain de travailler sur un truc, et je vais pas donner de date ou de titre, je pense que c’est bien de laisser ça à l’imagination, mais clairement il y’aura d’autres sorties à venir.

Photo de couverture, propos recueillis et traduis par Emma Sko // Photos : Lange Vert pour La Vapeur