Aujourd’hui encore un livre qui devrait augmenter le taux de rebond et affoler les robots Google : Timides tentatives de finir tous nus, d’Ibn al Rabin. Classe le titre, Timides tentatives de finir tous nus

Qu’est ce qu’on peut bien trouver dans ce livre ? La couv’ est très belle… Joli bord de l’eau montagneux. Photo couleur, plein de bleus différents. On est sûrement sur un lac d’altitude. Quelques sapins, des nuages dessinés à la main et… un monsieur tout nu un peu bedonnant qui rentre dans l’eau…

L’auteur s’est amusé à ajouter à la main des personnages, sortes de bonhommes patates, se baignant. Hein ? Pardon ? … ça sent la ???… Partie fine ? Le truc « tête bêche » et tout et tout ? Béhhh, peut-être… Mais vous allez être  vachement déçu… Si partouze il y a dans le bouquin, c’est partouze cérébrale. Les neurones d’Ibn al Rabin tournent à 2000 à l’heure. Ces bonhommes patates, c’est tout le bouquin et le monsieur tout nu d’la couv’, c’est bien le seul en habit de ver de terre de tout le livre.

Ibn c’est un peu le prof de math qui se met au dessin, le mec capable de te faire une bédé rien qu’en partant du théorème de pythagore ou suivant le principe que  : 4 couleurs suffisent à colorier tous les pays du monde sur une mappemonde, ça j’vous jure il me l’a expliqué en septembre dernier du coté d’Besançon. Dans son Timides tentatives… Ibn compile plusieurs années d’expériences sur le média BD. Ses bonhommes patates tous noirs et souvent de profil sont peut-être l’avenir de la bédé. Alors pas forcément dans la forme, pas forcément dans le style mais plutôt dans la narration. Ibn fait rebondir les cases entre elles comme d’autres à l’époque les explosaient.

Faire aujourd’hui de la pleine planche, c’est banal. Faire des trous dans les cases, s’en affranchir, faire péter le cadre c’est vu et revu… Qu’est-ce qu’on peut faire aujourd’hui pour faire avancer la machine ? C’est la question que beaucoup se posent dans la bédé. Comment raconter des histoires pas trop vu mais pas trop pourries. Ibn Al rabin nous offre de magnifique pistes. Pour vous aider à voir le truc, imaginez des flipbook, ces petits livres qu’on feuillette et laisse filer à toute vitesse sous le doigt. Ca donne l’impression de mouvement, comme un petit film d’animation. C’est pareil dans le bouquin sauf que votre vot’ doigt… c’est l’œil. Ses situations sont souvent bancales, un couple qui s’engueule, un service au resto qui tourne mal. Magie et talent du coco, il arrive à animer de simples taches, vagues d’encre pour en faire des histoires quasi métaphysiques.

Bon, très bon, génial mais hélas pas assez connu du grand public et pis il le sera pas tant qu’y jouera au gars qui sait pas dessiner… A vous de faire l’effort vers ses bouquins. A vous de faire l’effort, aussi, à la lecture ! Et oui désolé, pas d’fion dedans ! Tout comme bibi, Al Rabin a bien compris que s’il voulait attirer le chaland fallait racoler… et c’est pas beau.

J’vous cause aussi, à vous qui me lisez après avoir tapé une recherche honteuse sous google ou juste cliqué sur cette article grâce au titre. Z’êtes obligé maintenant, si vous voulez pas avoir l’air ridicule, de chopper le bouquin ! Alors, dès la semaine dernière, j’avais prévu de vous parler de la réédition de vieilleries bien vieilles et bien décalées, pas du tout dans l’air du temps mais j’imaginais pas que l’actu allait me rattraper. J’y vais quand même ? Allez banzaï !!!!

Buck Danny est de retour ! Dupuis réédite les aventures du commandant de la navy le plus français. J’sais pas pour vous mais moi c’est du pur retour en enfance : du gros navions, d’la baston, d’l’héroisme et du méchant bien méchant. Mais ce que j’ai redécouvert dans ces 5 premières histoires c’est de la caricature de nippon ! Le Japonais alias « le jaune » est vraiment « jaune », c’est pas des humains, c’est des Simpsons ! Et le caractère « du niak », c’est méchanceté et perfidie. A l’inverse bien sur, l’Américain est courage et honneur. Là, les aviateurs ricains sont à deux doigts de penser que le séisme, le tsunami et les catastrophes nucléaires, c’est bien fait pour eux ! Alors, outre les « sympathiques expressions » genre « face de citron », ou « face de prune », que je ne connaissais pas, le style, le rythme sont quand même magnifiques. Là où les deux premiers volumes traînaient un peu, les tomes 3 et 4 commencent déjà à donner le ton de ce qui fera le succès de cette série culte dessinée et scénarisée par Charlier et Hubinon.

Et puis, ça a le charme de l’ancien. Les cases sont super petites, au moins six bandes par pages, la couleur bave un peu… Les perso sont pas encore totalement définis. Les fidèles Sony et Tumbler apparaissaient. Et puis dans cette édition, les couv’ d’époque sont somptueuses. Par exemple , c’est Jijé qui réalise la couverture du tome 1 « Les Japs attaquent ». Superbe acrylique. A l’intérieur, en ouverture des récits, c’est plaisir des hiers : fac similé de Spirou, récit historique, contexte de création, conditions du taf des deux auteurs, salariés d’agence de presse, machine à pisser du dessin, et véritables tâcherons. Loin, très loin, de ce qu’ils deviendront plus tard : d’immenses stars de la bédé franco-belge. C’est un vrai bonheur !

La réédition est très belle, le travail d’édition mérite le détour mais simplement en terme de bédé, c’est un peu d’l’arnaque, du resucée. Parce que Dupuis à déjà réédité tous ces bouquins dans les années 90. Bingo en double bande pour l’éditeur mais toute la mise en contexte mérite votre attention.

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Timides tentatives de finir tous nus -– Atrabile, 19 €euros

Buck Danny, intégrales 1 et 2 -– Dupuis, 25 € euros chaque

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Retrouvez la chronique bédé de Martial sur les ondes de Radio Dijon Campus tous les mardis à 8h40 et vers 12h20.