Deux bonnes bédés coup sur coup, c’est cool ! La semaine dernière, j’vous disais comme Celle qui Réchauffe la Nuit était bien, et ben là j’pourrais faire un copier-coller pour Beauté des Kerascoët et Hubert.
Bon, c’est vrai qu’y’a deux trois différences notables entre les deux : celle-ci se déroule dans des châteaux avec des princes et des princesses alors que l’autre c’était… au pôle nord. C’est pas tout à fait pareil.

Mais dans Beauté y’a aussi des bestioles bizarres et d’la sorcellerie très poétique. Y’a surtout une chouette ou une bestiole volante qui prend la forme d’un oiseau noir, sympa avec un grand bec, de grands yeux et un grand sourire. En plus, y’ cause et réalise vos vœux… Vous admettrez sans problème que s’bestiau est une super occaze quand elle vous a à la bonne ! Surtout si vous vous appelez Morue, comme notre petite héroine, et que vous avez la touche glamour qui va avec.

Notre petite Morue est bien vilaine, c’est un p’tit souillon d’un bled paumé qui passe son temps à nettoyer des poissons. Elle pue. Elle a la tronche de travers et tout le monde se fout d’elle. Elle est tellement vilaine qu’hormis un obèse du village, sa seule copine d’un soir…. c’est un gros crapaud. Elle chiale dessus et bingo ! C’est vraiment la chance des moches, ce gros crapaud c’est une fée. Une fée qui lui exauce un vœux. Et tu devines lequel ? Non non non pas une place au stade pour voir le DFCO ? Un badge Sparse ou un ukulélé ? Ben non ! Elle demande … la beauté.

Et c’est là que tout s’emballe, la fée lui offre ce que tout le monde désire, et quand je dis ça, je pense pas seulement à la dernière paire de pompes que t’as flashé sur la vitrine du magasin tellement elles sont belles. Là, c’est un autre calibre : tout le monde, tous les types la désirent. D’un coup, ils sont prêt à s’étriper pour chopper la gamine, à quitter sur le champ mères et filles… Comme dans un Sofitel ! Alors que deux heures avant, ils lui jetaient des pierres. Là, ils choppent la Morue, l’embarquent dans le bois et, heureusement, à deux doigts de l’agression sexuelle au deuxième degré, le genre de truc qui peux valoir au bas mot, 75 piges de zonzon du coté de New-York, le Prince Charmant du bled arrive et la sort des pattes de tous ces mecs devenus des détraqués sexuels…

Et qu’est-ce que vous croyez qu’il arriva au Prince Charmant ? Qu’est ce que vous croyez qu’il arrive, quand on aime, qu’on habite avec une beauté ensorcelée et que votre Q.I est inversement proportionnel aux tours de votre château ? Est-ce qu’on peut être heureux, baigner dans l’amour et le bonheur quand on se sait et se sent complètement bidonné ? Et ben faudra le découvrir dans ce tome 1 de Beauté qui s’appelle Désirs Exaucés.

Une fois de plus, le duo de graphistes Kerascoët sublime le conte à Papa. Après Miss Pas Touche ou Jolies Ténèbres et leur poupée venimeuse, les deux, sur un scénario d’Hubert, mélangent avec talent traits légers, sourires enjôleurs et gravité du ton. Visuellement, y’a un gros boulot sur les décors, les perspectives et les aplats de couleurs qui offrent des paysages supers classes. Y’a aussi des clins d’oeil à l’esprit graphique années 50/60 d’Anna Barbera et consorts. On sent chez les dessinateurs, un plaisir lié au design rétro d’aprés-guerre, influencé par le cubisme et des peintres comme Matisse. C’est très joli. Y’a aussi un truc à la manière des dessins, des gravures de l’Europe de l’est fin XIXème, début XXème avec Mamouchka et autres femmes en foulards.

Mais là, on n’est pas seulement dans la dérision et le détournement. On est, et c’est maintenant classique chez les Kerascoët, dans la perversion du genre. Comme dans un gant, on enfile la main pour retourner le bazar et derrière le conte miévre, on découvre… une histoire pour ados et adultes.

Bref, c’est encore une super réussite et il faut vraiment que tout le monde choppe ce livre !

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Beauté, tome 1, Kerascoët et Hubert – Dupuis, autour de 13€

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