Pauline et Axel sont les deux membres du groupe PI JA MA. Un groupe qui, comme son nom l’indique, est aussi chaleureux et réconfortant qu’une grenouillère en pilou-pilou. Une musique joueuse, enchantée et rêveuse, teintée de synthés qui la rend encore plus légère. On a causé avec Pauline à La Vapeur à Dijon lors du concert de Pomme, où le groupe était en première partie.

Ta musique est très douce, bien axée synthé et guitare avec un style un peu vintage, tu me fais bien penser à des artistes comme Weyes Blood.

Ah, c’est sympa ça.


C’est sympa ?

Dans les artistes que j’ai écoutés, on peut reconnaître des choses. En effet, pendant l’écriture de ce deuxième album, j’ai pas mal écouté « Titanic Rising », y’a de ça. Mais j’écoute pas mal de vieux artistes et des nouveaux, et je mélange tout ça pour faire ma musique. Je crois que c’est un peu commun chez les artistes 2023.


Et chez les vieux alors, y’a qui ?

J’ai énormément écouté à une période les Beach Boys, les Beatles, les Doors, les Jefferson Airplanes, Janis Joplin, j’étais en obsession avec ces gens. Après, je me suis un peu éloigné de ça pour revenir vers la chanson française. J’ai pas mal écouté Gainsbourg, Françoise Hardy, Jane Birkin, j’étais un peu fan. Axel m’a fait découvrir la musique des années 90 que je ne connaissais pas, et moi je lui ai fait découvrir des trucs de comédies musicales qu’il déteste a priori et en fait qu’il a fini par apprécier, des trucs comme Starmania ou ABBA, je suis une grande fan d’ABBA et donc on partage souvent nos goûts.

C’est quoi l’identité de PI JA MA, ce qui t’a fait te lancer avec Axel dans ce projet ?

À la base, c’était très chill, c’était une rencontre entre nous deux, on voulait juste faire de la musique. Bon derrière, Axel avait sûrement l’idée de se faire énormément d’argent sur mon dos (*rires), mais on a créé les morceaux en se disant qu’on aimait bien les mêmes choses. Axel était plus dans la composition et l’écriture et moi dans l’interprétation et tout ce qui était image, dessin… On a créé le projet vraiment en se disant que ça ne deviendrait pas public, moi j’avais jamais fait de disques, j’avais jamais enregistré, jamais répété, jamais de concerts. Tout était nouveau, et c’était un peu un jeu, ça fait 6/7 ans qu’on fait ce projet en faisant des blagues et en improvisant des choses, en étant aussi libres que possibles. Donc, on a changé de partenaires de travail plusieurs fois en ne se pliant aux règles du music business qui sont un peu reloues.

Le music business, tu l’as connu avec la télé, via la Nouvelle Star, ça a participé de quelle manière à ce que tu fais maintenant ?

Après la Nouvelle Star, je me suis très rapidement tournée vers l’indé, parce que je préférais cette musique-là et les gens qui travaillaient autour de la musique indé. Naturellement, j’avais reçu des propositions qui me correspondaient pas vraiment. Avec Axel, j’ai senti la vibe bricolo du gars, j’ai senti cette lenteur sympa. À la base je suis illustratrice, donc la musique, c’est un bonus pour moi et je me suis dit que si je devais faire de la musique, il fallait que je m’amuse, pas que ce soit un truc qui me dise quoi faire, comment m’habiller.

Le dessin, c’est vraiment partout, j’ai tout le temps des crayons : c’est mon talisman pour aller bien.

Tu dessines et tu chantes dans des moments différents ?

Le dessin, c’est vraiment partout, j’ai tout le temps des crayons : c’est mon talisman pour aller bien. Même pendant les balances, je dessinais. La musique, c’est parfois un truc impulsif, mais c’est surtout des moments où je suis obsédée par une idée et je me dis que je vais la mettre en chanson, car ça ne pourra qu’être hyper honnête.

Y’a la notion de jeu qui est super présente sur le premier album. La chanson « Ponytail » est comme ça, dans l’absurde, dans l’amusement.

C’est la première chanson que j’ai écrite. Avant j’osais pas. Et puis un moment je me suis dit qu’il n’y avait qu’Axel qui pouvait me juger. Composer, je pensais que c’était un don que t’avais à la naissance, tu te réveillais et tu avais pleins de chansons dans la tête. Mais j’ai commencé à comprendre qu’en creusant autour de certaines suites d’accords, autour de thèmes, tu pouvais créer des chansons. Et surtout, il faut comprendre qu’il n’y a pas vraiment de règles pour composer des chansons, contrairement à ce que des directeurs artistiques et des labels peuvent te faire croire, notamment sur les timings. J’ai vu que Flavien Berger avait sorti une chanson de 15 minutes sur son dernier album, et j’étais contente de me dire qu’il y avait encore des gens qui faisaient des trucs un peu foufous comme ça. Parce que la peur, c’est qu’on nous dise qu’on doit faire des chansons de 7 secondes adaptées à TikTok. J’adore les réseaux sociaux, mais y’a l’idée que tu ne peux plus faire autre chose que des petits contenus, parce qu’après les gens se déconcentrent. Et faut lutter contre ça, parce qu’après, il ne restera que des vidéos de 1 seconde, et des gens qui ne voient plus rien. Je suis un peu un boomer en disant ça, moi j’adore consommer aussi mais j’en vois les dangers.

« Seule sous ma frange », ton deuxième album, un titre révélateur d’un peu plus de dévoilement. Déjà beaucoup plus de titres en français et t’abordes d’autres thèmes ?

C’est né d’une frustration avec mon premier label, dès que j’étais un peu trop dark, on me le faisait sentir. Je suis quand même 50% du temps de bonne humeur, arc-en-ciel, mais aussi 50% du temps archi dark et je me disais qu’en fait, ça faisait pas vendre. Mais maintenant y’a une espèce de trend où tout le monde parle de sa dépression et de sa santé mentale ce qui est cool parce que tu peux en parler plus librement. Mais d’un coup, c’est plus grave d’aller mal. Alors que depuis longtemps j’allais mal et j’avais envie qu’on me laisse parler de ça. Donc dans « Seule sous ma frange » y’a de ça, des sujets un peu redondant chez moi, sur la solitude, mon rapport aux autres, au couple, à la famille, aux amis. Je suis tellement obsédée par ce thème que j’en fais des livres et des chansons.  

Texte et photos : Paul Dufour