Décrit comme le “nouvel enfant terrible de la chanson française”. On a rencontré Voyou, avant son concert à la Rodia de Besançon début décembre.
Dans une interview, en mars, pour France 3 Pays de la Loire tu disais que tout s’enchaînait très vite : ton album, la création du live, la promo, la tournée qui commençait à peine. Du coup, 9 mois après, comment ça va ?
Ça va très très bien. La période de création du live avec les promos de la sortie de l’album à été intense. Et là, j’ai un nouveau disque qui sort courant janvier, un EP, ça revient un peu…La tournée est lancée, on est en plein dedans, et j’ai cette sortie de disque à prévoir. Je me laisse pas trop de repos, mais en même temps je profite de l’action tant qu’elle est là.
Ta musique c’est un peu des bonne vibes, même quand tu parles de sujet pas super drôles. Tu produis tes sons comme une bouffée d’air frais ?
Ça me permet de faire de vraies pauses sur des choses pas toujours faciles dans la vie, comme dans l’hiver, qui parle de dépression. Quand j’écris, ça me force à penser à ces sujets-là pour mieux les comprendre et mieux les vivre quand je les vois autour de moi. Et en tout cas avoir l’impression de mieux contrôler ça. Il y a toujours un aspect auto-thérapeutique dans le fait de faire des chansons, surtout quand on essaie de mettre des paroles qui ont du sens. Mais ça ne m’appartiens plus quand les chansons sont sorties, c’est aux gens de prendre ça et d’en faire ce qu’ils veulent; mais je vois l’effet que ça peut avoir sur eux via les messages qu’on m’envoie. Ça me fait toujours plaisir de sentir qu’une de mes chansons peut aider à créer un espace de sécurité ou une bouffée d’air au milieu de situations parfois compliquées.
Dans ta musique y’a un côté très enfantin, ça ressemble à des comptines. Visuellement aussi, ta pochette d’album c’est une maquette très colorée avec un petit train. Dans ton clip d’hiver, on évolue dans un décor minuscule comme dans une maison de poupée. Est-ce que tu es nostalgique de ton enfance et de ton insouciance ?
J’ai pas de nostalgie de l’enfance parce que je suis très heureux d’avoir l’âge que j’ai. Il y a plein de choses que je découvre, et qui me font du bien, avec le fait de vieillir. Par contre j’essaie de rester connecté à une manière de voir les choses très liée à l’enfance. C’est un endroit où on a le droit de regarder les choses différemment et d’en faire ce qu’on veut. J’ai l’impression qu’être artiste, c’est une place privilégiée où on nous octroie le droit d’avoir un œil assez différent.
Tu parles beaucoup de faune et de flore dans tes musiques, d’oiseaux pour parler d’amour. Est-ce que parler de la nature c’est un moyen pour toi de parler d’autres sujets, sociaux ou politiques comme l’ont déjà fait Georges Orwell ou Jean de la Fontaine avant toi ?
Oui, disons qu’il y a cette façon d’utiliser les animaux pour parler des sentiments humains, qui permet de faire admettre beaucoup de choses sans avoir l’impression de viser les gens. Il y a beaucoup de choses qui me choquent, me frappent et m’attristent sur les agissements humains. Et le dire très frontalement, ça n’amènera personne à réfléchir à ce que je raconte. Alors qu’utiliser les animaux ça adoucit un peu le propos, ça permet aussi de créer un 1er niveau de lecture, qui fait que les gens qui ont pas envie de se reconnaître dedans peuvent quand même écouter. Et puis, ça infuse peut-être inconsciemment, je sais pas.
Mais j’ai l’impression que parler d’écologie en montrant des forêts qui brûlent c’est pas forcément aider la cause. Alors que parler d’écologie en montrant une belle forêt verdoyante en disant “regardez comment c’est trop stylé” ça aide vachement plus à se dire “c’est bien, on a envie d’avoir encore ça devant les yeux”.
Tu mets la musique en images via tes paroles et ça nous frappe. J’imagine que tu continues cet effort sur scène, qu’est-ce qu’on voit quand on va à ton concert ?
Le décor, c’est moi qui l’ai dessiné, il y a un vrai prolongement de mon imaginaire sur scène. C’est tout un décor en 4 parties : très naturelles, très colorées, très solaires. Ça va aussi avec mes musiciens qui ont des costumes très colorés, pareil pour les lumières chaudes. Il y a quelque chose de très bienveillant, c’est souvent des grandes fêtes, les gens ressortent de là avec le sourire et tout le monde est content. C’est très axé sur les instruments aussi, y’a pas d’ordinateur, et très peu de choses électroniques. On est juste sur scène à improviser, à jouer beaucoup de musique, c’est très réjouissant pour nous.
On dirait que tu contrôles tout : t’es au décor, à la musique, aux paroles, t’es partout.
C’est beaucoup de contrôle pour finalement plus contrôler grand chose. C’est surtout que je juge beaucoup la musique, j’ai des goûts très particuliers. J’en voudrais jamais à personne de faire de la musique, mais j’ai vraiment des goûts très précis et il y a beaucoup de choses que je trouve mauvais. Et ce serait la pire chose pour moi que de me rendre compte que ce que je fais est de mauvais goût.
C’est quoi tes points forts dans ta musique ?
J’ai très confiance en moi dans la musique, dans l’écriture des paroles c’était moins le cas avant, parce que je m’y suis mis d’un coup. Autant la partie musique, je fais ça depuis que j’ai 3 ans, je maîtrise et je me sens capable d’accepter les jugements. L’écriture c’était pas si facile que ça. Et en fait les 1ers retours que j’ai eu c’était plus sur l’écriture que sur la musique, donc ça m’a donné confiance. J’essaie à la fois de pas trop cérébraliser ce que je fais, mais j’essaie aussi d’être super précis sur les images que je donne dans mes paroles. Mais aussi d’être précis dans les histoires, leur but : que ça raconte vraiment quelque chose et que ce soit pas insignifiant.
As-tu un petit rituel avant de monter sur scène ?
Le rituel c’est qu’on se retrouve toujours 1h avant le changement de plateau, avec mes musiciens et techniciens, tous ensemble dans la loge et on se prépare ensemble. Tout le monde s’occupe de soi, s’habille, se maquille, on se coiffe des fois les uns les autres. C’est un moment où on met de la musique, où on chante, où on danse, où on se raconte des choses aussi parfois très intimes les uns aux autres. Pour moi, c’est ça qui est important, on se retrouve et on partage ensemble tout ce qu’on est, et tout ce qu’on a. Et ça nous permet de nous recentrer les uns sur les autres et de créer une cohésion qu’on va amener après sur scène.
Propos recueillis pas Morgane Modin // Crédits photo: Charlotte Ronot – Emma Brisk
En partenariat avec Radio Campus