Déjà sacré futur Zaho de Sagazan, le parisien aux lunettes ronde Claude est en tournée aux 4 coins de la France après avoir sorti son premier album « In Extremis ». Dans sa course folle, on l’a rencontré lors de son pit stop à Dijon pour un concert à La Vapeur.


Ta musique assez reconnaissable, mélange entre de la musique électronique et de la chanson à texte, je te sais assez fan d’acid, c’était ton premier amour musical ?

Claude : J’étais très fan d’acid, mais d’acid sereine et tranquille. Ça a été énormément exploité dans plein de morceaux. Certains qui s’apparentent presque à des choses que font Kraftwerk, avec un côté très pop parfois ou alors des trucs assez breakbeat plutôt tranquille. J’avoue que la techno n’est pas un genre vers lequel je me tourne beaucoup, mais tout ce qui est house et musique électronique, électronica c’est des choses qui ont forgé toute ma culture musicale.

Pourtant, quand tu commences la musique, on t’oriente vers les cours de solfèges. Comment tu t’es créé toute cette culture ?

Claude : Quand j’étais gosse et que je suis allé au conservatoire, je faisais du solfège. Ce n’était pas tant qu’on m’imposait un style musical, mais plutôt que la formation de solfège est quelque chose de très théorique qui part plutôt de la musique classique. T’apprends pas la musique avec de la techno, de l’acid ou de la house, c’était pas les genres de références. Mais j’ai construit ma culture quand je découvre YouTube à 12/13 ans. Y’avait pas tant de musique classique, c’était plutôt des vieux cuts de musiques soul, rap, hip-hop, musique électronique, jazz, funk… Je suis juste tombé sur des gens là en fouillant sur Internet.

Et t’es pas pour autant devenu DJ, tu t’es fait remarquer aussi par ton phrasé et tes textes. Ça te vient d’où cet amour du texte ?

Claude : Je pense que c’est plus un amour du langage, du parlé que d’un amour de l’écriture. Je suis pas un grand littéraire, je lis pas beaucoup de bouquins. Je suis pas du tout fan de chanson française, j’en écoute pas. Je pense que ça vient d’une passion pour le rap qui est le genre que j’ai le plus écouté en grandissant en termes de chansons en français. J’ai un vocabulaire qui m’est assez propre : c’est pas très littéraire, c’est pas très poétique. C’est plutôt hypra-réaliste et descriptif. Souvent j’écris 90% des morceaux puis je le laisse, puis j’y retourne pour voir si je peux retrouver des phrases et ça dure pendant des semaines. Mais la plus grande partie du travail elle se fait dans le moment et assez rapidement. Je me base souvent sur des phrases que j’ai écrites sur mon téléphone, dans les transports ou je ne sais trop où. Mais ce sont des phrases de description, écrites un peu en mode pilotage automatique où je me pose pas de questions. J’écris comme ça me vient, sans me soucier des rimes, nombres de pieds, de la rythmique. Sur ça, 5% sont bons et je vais les garder pour faire des morceaux.

Quand tu montes le projet Claude, c’est en fait la suite d’un premier projet que tu as fait sous le nom de Geisler. Claude n’est pas non plus ton vrai prénom. Alors je crois que tu donnes toujours des raisons différentes pour ces pseudos, on peut avoir le fin mot ?

Claude : Tu veux dire la vérité ? Non. C’est mon petit secret à moi, je le garde, j’aime bien.

Parlons de l’histoire de cet album. On a des passages assez intimes et fragiles avec des sons comme In Extremis ou Signes Vitaux et des sons instrumentaux comme La Nausée où on est presque dans une ambiance de club. Comment t’as imaginé ta narration ?

Claude : C’est un album de présentation donc je l’ai vécu comme ça. Je devais me présenter auprès des gens et j’ai décidé de la faire à travers les défauts. Quasiment tous les morceaux ont vocation à décrire quelque chose de moi que je n’aime pas, quelque chose qui me gêne ou que je ne comprends pas. Donc ça peut être la colère et la perte de contrôle sur In Extremis, la peur de l’engagement sur l’Addition, ça peut être le fait que je suis hypocondriaque sur Signe Vitaux ou la pression sur La Pression. Les morceaux instrumentaux disent ce qu’il faut avec juste l’instrument. La Nausée c’est littéral. Je l’ai créé comme un boucle acid qui progresse en spirale. Sur la construction de l’album, on commence avec réveille-toi, un morceau instrumental et le sujet c’est l’idée que tu es dans un cauchemar avec un pétage de câble absolu, tout vas extrêmement vite…

J’ai un vocabulaire qui m’est assez propre : c’est pas très littéraire, c’est pas très poétique. C’est plutôt hypra-réaliste et descriptif.

Dans le thème des chansons on a des thèmes assez sensuels et assez dramatiques. Une chanson qui représente peut être les deux d’une manière détournée c’est Ode à Mark, où tu joue un jeu d’amour/ haine avec Mark Zuckerberg. Comment elle vient cette chanson ?

Claude : C’était une vanne faite pendant un confinement quand j’avais le COVID. J’étais enfermé devant mon ordinateur toute la journée, je trouvais ça ridicule et je me suis retrouvé à en faire un vrai sujet. C’était tout con, facile à écrire. C’est tellement une vanne ce son qu’il n’y a pas une rime, rythmiquement parlant ça marche, mais rien d’autre n’est vraiment fouillé parce que je l’ai écrit sans me poser de question. C’était une manière de traiter de notre relation avec les réseaux sociaux en personnifiant tout ça. C’était parler de cette relation un peu toxique, où les algorithmes connaissent tous tes goûts, tes déceptions, tes remords, ils connaissent tout alors que toi tu ne connais rien d’eux. Y’a ce truc toxique et en même temps je suis ultra dépendant des réseaux.

J’espère que t’avais Mark Zuckerberg devant toi pour faire ce clip quand même ?

Claude : C’était une bonne vieille exploitation d’une autre interview de Mark Zuckerberg. On a bien exploité le truc mais on s’est fait strike par Meta qui a voulu retirer mais finalement ils l’ont laissé. Merci, c’est gentil. Mais évidemment c’est faux. Mais dans les commentaires j’ai eu des gens qui disaient « je n’aime pas sa proximité avec les puissants » mais non c’est un montage, Thierry (j’imagine qu’il s’appelait Thierry).

Texte et photos : Paul Dufour