À Semur-en-Auxois, à deux pas du Lycée Anna Judic, des chimères ont envahi le Bahut, ces ateliers bientôt en vogue chez les artistes de BFC. La Fabrique à Berlue, association qui organise des spectacles toujours plus farfelus y prépare sa nouvelle prouesse : le Bal des Chimères, qui se tiendra samedi 15 juillet au château de Bussy Rabutin.
La devanture te fera sortir une goutte de sueur, te rappelant tes DM de maths finis dans le couloir, le stress des exams, les clopes fumées hors de la vue de tes profs. Mais passée la porte, c’est une toute autre ambiance qui s’installe. Dans ces anciens bâtiments appartenant à un lycée siègent costumes, cerbères pailletés et casques de taureaux un peu zinzins. Benoît et Elie, respectivement président et trésorier de l’association La Fabrique à Berlue, ont lâché la pédale de leur machine à coudre pour nous parler de leur séjour au Bahut et de leur nouvelle création. Ils ont bien pris possession du lieu, comme me le dit Élie : « On est dans ces locaux depuis environ 1 mois et demi, depuis fin mai ». Nouveau paradis pour des artistes qui en ont marre de répéter dans leur appart, Le Bahut est un lieu en pleine transition, comme nous l’explique Benoît : « C’est un site qui va être transformé dans 2/3 ans en un écofaubourg. Pendant la période de latence, l’association « Le Bahut » est chargé de faire vivre et d’animer le lieu avec des résidences d’artistes, des expositions, quelques festivals, des colloques. » D’abord à l’abandon, c’est la team des cultureux de coin qui ont vu le potentiel d’y faire vivre un cœur artistique pendant quelques temps. Pour la Fabrique à Berlue, le lieu est d’autant plus pratique puisque l’association peut compter sur 80 bénévoles pour aider à leur nouvelle création, chacun et chacune se transformant en chimère pour l’évènement, ça fait du monde et du matos.
On avait déjà rencontré ces éberlueurs pour un défilé de mode dans des stabules au lieu-dit de Chaudot, à quelques kilomètres de Flavigny et on avait été épatés. Ne t’inquiète pas qu’on sera donc au front-row pour ce spectacle qui a l’air encore plus ambitieux. Au programme du Bal des Chimères : un spot dingo, le château de Bussy-Rabutin : de la danse, un concert et des performances drag sur la cour d’honneur, exposée plein sud pour un max de mélanine, mais Benoît nous informe qu’ils ont prévu pleins d’autres surprises : « On investit la cour d’honneur pour le bal et il y aura des tableaux vivants dissimulés tout autour pour un aspect d’autant plus immersif. ». Élie m’a même balancé que dans le lot se cachait un flamand rose monté sur échasses. Une dinguerie.
L’idée leur est en fait venue du Château de Bussy-Rabutin himself. À la Secrets d’Histoire, Benoît m’explique : « Bussy Rabutin a été exilé de la cour parce qu’il avait bavé sur les autres, la cour c’était « Voici » à l’époque. Exilé dans le château, il se représentait souvent en phénix dans l’idée de renaître de ses cendres… Donc y’a beaucoup de symboliques comme ça, dont on s’est inspirés ». Musique à fond et cours d’histoire, comment te dire que j’ai connu des journées du patrimoine moins fun. Le but des éberlueurs, Élie nous le résume : « On crée des réactions de surprises et maintenant les gens ne viennent pas vraiment pour le spectacle, pour un concert mais pour voir ce que leur ont pondu La Fabrique à Berlue. Notre évènement est éphémère, et c’est un temps de rencontre entre plusieurs générations avec un collectif comme Gangreine qui a 15 ans de moins que nous ».
Mais parce que les éberlueurs sont avant tout à fond dans le partage, ils ont fait appel au collectif Gangreine et au groupe de rock Maninga pour une ambiance complète : Élie nous explique leur vision du spectacle : « On a pas fait quelque chose sur le modèle de sets qui s’enchaînent : les danseurs les musiciens jouent ensemble en même temps, les bénévoles de La Fabrique à Berlue dansent avec Gangreine… on est pas sur du festival ».
L’évènement rassemble donc à fond et les organisateurs ne sont pas peu fiers de nous dire que toute l’installation technique, logistique et même la buvette a été conçue sur mesure pour le spectacle par des bénévoles. Classe, on est même un peu jaloux. Mais faire un évènement aussi extravagant et zinzin dans un milieu rural, avec des costumes et du drag ; assez instinctivement on pense que ça peut amener à des réactions diverses. Alors Benoît nous affirme qu’en effet, les réactions sont là, mais jamais vraiment de véhémence autour de leurs créations. Surtout qu’Elie nous précise : « le côté queer n’est certes pas présent en milieu rural, mais notre soirée n’est pas LGBT, ni queer : elle intègre ces thèmes parce qu’on aborde la question du genre en lien avec la chimère et le château, parce que quoi de plus drag que Louis XIV finalement ? ».
D’ici le 15 juillet, t’as le temps de passer devant le Bahut s’il te manque un atelier d’artiste et tu penseras à déterrer les masques de ton mariage sur le thème « gondoles de Venise » pour arriver complètement pimpé au Bal des Chimères : dress code « chimère » pas obligatoire, mais les costumes seront distingués.
Texte et photos : Paul Dufour