Créer la discussion, abattre les barrières et principes arriérés par l’humour, c’est ce que tente de faire Guillaume Meurice, sur scène et sur les ondes. En vadrouille pour son one-man-show “Que demande le peuple”, le bourguignon d’origine passe près de Dole, à Mont-Sous-Vaudrey, ce samedi. Rencontre.

De la Haute-Saône à Paname, il est aujourd’hui tous les jours sur les ondes de France Inter, où il s’attaque, dans une chronique, aux communicants, aux puissants, aux absurdités de notre société. Il foule la scène pour son premier one-man-show en 2007, après être monté à Paris pour faire les Cours Florent. Animé par les pitres aux discours qui bousculent, les yeux qui pétillent devant les VHS des Inconnus, Guillaume Meurice a grandi avec ce fond d’humour, sans pour autant se dire “aller, c’est pour moi”, et pourtant…

Je t’ai connu via tes chroniques sur les ondes de France Inter, dans l’émission Par Jupiter, mais tu es comédien, tu viens du théâtre… 

Eh oui, après m’être planté dans une formation en administration publique, je me suis souvenu des réflexions de ma mère. Elle se disait que le théâtre pourrait canaliser l’enfant turbulent que j’étais. Et puis j’ai toujours été animé par les trucs marrants, je me souviens passer du temps devant les VHS des Inconnus, sans pour autant me dire “aller, c’est pour moi”. J’ai finalement intégré les Cours Florent, puis fais des petites scènes comme Le Populaire, où je testais mes sketchs au bar au début, directement sur le zinc, et puis mon premier spectacle en 2007. 

C’était quoi ce premier spectacle ? C’était comment tes débuts sur scène ? 

Alors déjà, j’ai eu la bonne idée de l’appeler “Annulé”, ce qui est le titre le plus pourri, je le dis à tout ceux qui débutent, n’appelez jamais votre spectacle comme ça, parce que même mes potes ne venaient pas parfois. Donc j’ai assez rapidement changé ce titre.

Je jouais des symboles, des allégories, je jouais la mort par exemple, avec des costumes. Le truc, c’est que je suis arrivé dans le one-man-show sans en connaître les codes, les modes, mais j’ai choisi de ne pas les suivre et la scène c’est un espace de liberté au final. C’est ce qui fait ma particularité je pense. 

Le principe du spectacle c’était qu’il ne commençait jamais. Je jouais tous les personnage qu’on peut croiser autour, le marchand de glace, le vendeur de chouchous mais aussi Marianne, Ronald MacDonald etc. Au fur et à mesure il a évolué pour devenir l’histoire de Dieu qui découvre le monde. Il l’a créé en 6 jours, il s’est reposé le 7ème et ne s’est pas réveillé le 8ème, il se réveille sur scène et découvrait les dégâts. Je l’ai joué longtemps, jusqu’en 2014, donc à la fin il n’avait plus rien à voir avec sa forme initiale. 

 

Pour revenir à “Que demande le peuple”, tu colles cette fois à l’actualité mais tu joues ce spectacle depuis 2014, comment est-ce que tu as fait évoluer l’histoire vers la Macronie ? 

Je joue le conseiller personnel d’Emmanuel Macron donc un communicant, qui explique que tout va bien au peuple de France, le plus dépressif du monde. Je me suis adapté parce qu’évidemment, à la base, c’était Manuel Valls. Je me renseigne toujours un peu en fonction des salles que je fais parce que j’aime bien interagir avec le public aussi.

Je pointe du doigt surtout des procédés de communication politique donc entre Valls et Macron il y a des différences marquées, le premier était bien plus frontal, plus autoritaire même, alors que l’autre est plus filou. En fait, on croyait qu’on allait se faire chier avec la start-up nation, en pensant que les macronistes seraient lisses et mous, mais ils le sont en surface seulement, dès que tu creuses un peu, c’est la même chose. Par exemple avec ce qui se passe avec les migrants, c’est la même politique qu’avant mais ils te l’a vendent mieux. 

« Susciter un rire spontané a quelque chose de jouissif. C’est ce qu’on essaie de faire avec Charline dans la matinale, on fait un peu de taquinage artistique » 

 

Francisco E Cunha est le metteur en scène de ton spectacle et Julie Duquenoÿ, la technicienne lumière. Comment vous avez travaillé cet aspect de la représentation ? 

Oui, c’est ça, Francisco est un ami de longue date, il m’a fait confiance et on a collaboré pour mes premières scènes. Julie, on s’est rencontré au festival d’Avignon et plus tard, elle a postulé à l’annonce que j’avais publié pour ma tournée. En fait, comme je venais du théâtre classique, assez outrancier, avec les costumes comme je disais, et des textes très travaillés, il a fallu élaguer, faire en sorte que la parole soit plus directe. Il fallait gommer les artifices, les tics et codes de jeux du one-man… Le plus gros du boulot ça a été la prise de parole et Francisco ma beaucoup aidé là-dessus. 

 

Tu es toujours allé vers l’humour, comme par instinct, en y mêlant tes réflexions sur l’actualité, la politique. Quelle intérêt tu trouves à l’humour pour porter tes messages ? Est-ce que tu vois ça comme votre forme de militantisme ? 

J’aime pas trop le mot militantisme parce que ça fait très « j’impose ce que je pense ». Je vois juste l’humour comme un média, un mode d’expression et je ne me force pas à utiliser cette forme là parce que c’est la plus naturelle pour moi. Après ça va souvent pas plus loin que l’amusement, on change pas le monde avec des blagues. Mais ça me permet avant tout de me soulager et les gens me disent que ça leur fait du bien que je formule ce qu’ils pensent, et ça, ça fait plaisir. 

Aussi, ce qui est pratique avec l’humour, c’est que le rire que provoque une blague est un réflexe. Quelqu’un peut ne pas être d’accord avec ce que tu dis, si tu l’as fait marrer c’est trop tard, le lien est créé. L’enjeu c’est d’amener un propos avec ça. Mais voilà, susciter un rire spontané a quelque chose de jouissif. C’est ce qu’on essaie de faire avec Charline dans la matinale, on fait un peu de taquinage artistique quoi !

« On change pas le monde avec des blagues »

En terme d’écriture, comment tu t’organises, est-ce que tu as tes petites routines comme certains ? Où est-ce que tu puisses l’inspiration ? 

Alors je déteste ça, je fuis toute forme de rituel, j’aime pouvoir écrire n’importe où. Ma méthode c’est plutôt de toujours avoir de quoi noter les idées qui me viennent à l’esprit, ça me décharge en plus, donc c’est pas mal. 

Photo: Arlo

Au niveau de l’inspiration, je recherche plutôt un angle, comment je vais articuler ce que je pense face à un sujet. Par exemple, souvent je prends à rebours un thème, j’endosse le rôle de personnages très loin de moi, de mes opinions. Plus que le propos lui-même, c’est le positionnement qui est important.  

 

 

 

Et pour la suite, de nouvelles envies, un nouveau spectacle peut-être ? 

J’aime tenter de nouvelles choses donc oui, j’ai un projet en cours. Je suis en train de monter un spectacle musical avec plusieurs amis, dans lequel je chante. On a appelé ça « The disruptives », le premier groupe de rock En marche de l’Histoire. On reprend le programme du parti pour le tourner en satire, c’est comme si des macronistes formaient un groupe. Entre des titres comme « Coup de foudre dans l’open-space », « Jaloux » et « Humanité et fermeté », les membres du groupe reprennent tout le lexique de la start-up nation. Ça ne sera pas un concert à proprement dit parce qu’on va scénariser un peu entre les morceaux. 

J’avais envie d’un projet collectif, le one-man-show ça faisait une dizaine d’années et j’ai eu l’opportunité de lancer ça suite à la rencontre avec le guitariste. On part tous ensemble, une semaine en août pour finaliser tout ça et on sera dès le 7 septembre au Café de la Danse à Paris. Ça sera donc les quatre derniers mois de « Que demande le peuple », je joue jusqu’en décembre. 

 

  • Chloé Guillot

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Photos: Fanchon Birbille.