On a connu Thoineau, le leader du groupe TH Da Freak en mode grunge / slacker complètement fondu des années 90. Après 5 albums enregistrés sur le vif, parfois à l’arrache, on le retrouve, posé avec un nouvel album aux accents plus seventies : Coyote. L’album de la maturité ? On ira pas jusque-là, mais à n’en pas douter, un des meilleurs disques de 2022.

Une interview menée en compagnie des trublions de Radio Dijon Campus.

Pour ceux qui ne te connaissent pas Thoineau, on décrit souvent TH Da Freak comme de la musique 90’s, slacker, branleur avec des fortes influences grunge, c’est ça ?

Oui mais il y a plus que ça, il y a plein de choses. Il y a aussi de la pop sophistiquée des années 70 et puis la musique d’ermites, comme R Stevie Moore. Des bricoleurs du son.

C’est vrai que tu nous as twisté un peu tout ça avec le dernier disque Coyote, qui a des influences qui vont lorgner vers la pop 60’s-70’s, ambiance pop à papa, ça vient d’où cette envie de faire ça ?

C’est venu assez naturellement, j’avais fait plusieurs albums dans le pan grunge / indie rock et là j’avais envie de calmer le jeu. C’est peut-être aussi parce que je grandis, j’avais envie de guitare folk, des trucs jolis… Et puis il y a eu le confinement qui a participé à cette ambiance posée.

Sur ce nouveau disque il y a moins le côté photographique et instantané c’est plus un tableau, où on prend le temps de prendre les bonnes couleurs.

On peut dire que l’on est face à un artiste qui produit énormément, si j’ai bien compté 12 sorties depuis 2014…

J’ai un besoin compulsif de faire de la musique. Et en plus d’en faire ce qui me fait kiffer, c’est surtout d’enregistrer des choses. Je fais ça depuis que j’ai 12 ans, à l’époque c’était avec un mp3 pourri et c’est une sorte de jeu que j’ai continué à faire et qui est devenu vital pour moi.

La dernière fois que l’on s’est parlés en interview, c’était avant le COVID, tu venais de sortir Freakenstein, un album home studio bricolé et tu parlais déjà d’une envie de faire un disque plus produit. Est-ce que le COVID en plus de cette volonté déjà présente t’a entraîné, voire forcé, à une gestation plus longue et t’a poussé à taffer autrement ?

C’est un peu ça, mais il faut aussi prendre en compte que c’était aussi la première fois que je travaillais avec un producteur, un Bordelais que j’admire énormément et qui s’appelle Stéphane Gillet. Son processus d’enregistrement est différent du mien, ça prend pas mal de temps ; on est revenus sur les chansons à plusieurs reprises, on a revu des parties, chose qu’on n’avait jamais faite au préalable… Sur ce nouveau disque il y a moins le côté photographique, instantané c’est plus un tableau, où on prend le temps de prendre les bonnes couleurs.

C’était la volonté du producteur de faire sonner le disque plus 60’s / 70’s, de s’éloigner du côté grunge et des 90’s ?

Son but avec ce disque, c’est que l’on ne puisse pas forcément trop le dater. Il adore les albums qui sont plus intemporels. C’est pour ça que l’on trouve des morceaux 60’s, un peu folk, des morceaux 90’s, un peu slacker, il y a aussi un titre avec du vocoder et du synthé…

Qu’est-ce que ça représente pour toi la musique des 70’s ? puis la musique des 90’s ?

C’est le début des expérimentations, des nouvelles manières d’enregistrer. C’est ça qui m’intéresse là-dedans. L’arrivée aussi du home studio, notamment avec R Stevie Moore, le God Father of DIY, le premier qui faisait des albums chez lui. Pour les années 90, j’aime le second degré, l’ironie de faire de la musique et beaucoup d’auto-dérision. Cela permet de créer un détachement entre la musique et nous. Sans se prendre la tête en remettant la musique en tant que chose fun. 

L’album s’appelle Coyote, c’est un clin d’œil au dessin animé Roadrunner (Bip Bip et Coyote) ?

Non mais ça rentre dans le délire, le Coyote c’est un dieu de la mythologie amérindienne, c’est un peu comme Prométhée chez les Grecs qui apportait le feu aux hommes. Le coyote apporte plein de choses : la connaissance, la folie, l’amour… Du négatif, du positif, des sujets variés que j’aborde dans le disque.

À la fin de Coyote, on entend une paire de mot en français, est-ce que tu te tâtes à passer au français pour la suite ou tu te dis que ça dénaturerait le propos de ta musique qui est bien anglo-saxonne ?

Ah non pas du tout ! Le français je ne le ferai pas pour ma musique. L’anglais c’est la langue, et les sonorités que je vais rechercher. Naturellement dans ma chambre avec ma guitare, ça sort en anglais. Les trois petits mots de la fin étaient là pour illustrer la chanson, j’avais acheté un bouquin de contes sur le coyote pour m’inspirer et c’est une référence qui est restée.

Propos recueillis par : FLT et Martial Ratel // Photos : Paul Dufour